Rechercher
Rechercher

Politique - Contestation

Que cherche le Hezbollah par sa participation aux manifestations ?

Des partisans du tandem chiite se sont mêlés jeudi soir aux protestataires pour crier leur colère face à la dégradation des conditions socio-économiques. Une scène aux antipodes de la guerre civile frôlée samedi.

Que cherche le Hezbollah par sa participation aux manifestations ?

Des manifestants à moto venus de Khandak el-Ghamik se sont joints jeudi soir aux centaines de protestataires en colère dans le centre de Beyrouth. Anwar Amro/AFP

Quand les manifestants rassemblés sur le Ring jeudi soir ont vu affluer des mobylettes venant du côté de Khandak el-Ghamik, un quartier de Beyrouth acquis au tandem chiite, ils se sont préparés à une confrontation. Pourtant, c’est en alliés que les manifestants de ce quartier sont venus se joindre à eux. Le soulagement était perceptible au sein du rassemblement, et les slogans contre la cherté de vie se sont croisés. La scène observée jeudi était aux antipodes de celle qui a marqué la manifestation du samedi précédent, quand ce même « public » du tandem chiite a été à l’origine de trois confrontations, l’une avec les manifestants du centre-ville (dont une minorité seulement scandait des slogans en faveur de l’application de la résolution 1559 de l’ONU pour le désarmement des milices), la deuxième avec les habitants de Aïn el-Remmané sur l’ancienne ligne de démarcation et la troisième avec le public de Tarik Jdidé, sur fond d’insultes contre une figure vénérée par les sunnites, Aïcha, femme du Prophète. Et le slogan « Chiites, chiites, chiites » de samedi a été remplacé jeudi par des appels à l’unité nationale.

Comment interpréter ces différences ? Que cherche le Hezbollah par cette implication dans le mouvement de contestation et pourquoi ses partisans ont-ils insisté à concentrer leurs attaques contre la Banque centrale et son gouverneur, alors que les autres manifestants revendiquaient un changement pur et simple de gouvernement ?

Lire aussi

... Et de trois !

Pour l’analyste Kassem Kassir, proche du Hezbollah, il faut commencer par comprendre qui sont les manifestants de jeudi. « La situation économique est catastrophique pour tous les Libanais sans exception, et cela inclut ce qu’on appelle le public du Hezbollah, dit-il. N’oublions pas le contexte de rumeurs sur le taux de change record de la livre libanaise (7 000 LL pour un dollar) qui prévalait jeudi. » D’après ses informations, ce ne serait donc pas le Hezbollah qui aurait mobilisé ses partisans pour descendre dans la rue. « J’ai même senti à certains moments que les partisans d’Amal étaient plus organisés, dit-il. À mon avis, le Hezbollah n’a pas mobilisé ses troupes, mais il ne les a pas empêchées de manifester non plus. Au final, il était utile pour lui de lancer un message au gouvernement afin de le pousser à œuvrer plus activement au rétablissement économique et un autre à l’intention du gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé. »

Effacer les images de samedi

Cela exclut-il une mobilisation bien organisée de ces manifestants, dont l’arrivée sur le Ring semblait être parfaitement synchronisée ? Selon notre informateur Mounir Rabih, le Hezbollah a une stratégie d’implication dans la « thaoura » depuis ses débuts le 17 octobre dernier, l’objectif du parti chiite étant d’en définir les tendances d’une façon ou d’une autre, que ce soit par la confrontation ou l’intégration au sein du mouvement. « Le Hezbollah semble déterminé à faire le contrepoids aux pressions américaines, dit-il. Après les nominations administratives de mercredi, que le Hezbollah et le camp du président de la République Michel Aoun ont considérées comme une victoire, le parti est allé un peu vite en besogne en voulant imposer l’idée du limogeage de Riad Salamé. Toutefois, ce limogeage n’est pas souhaité par l’autre composante du tandem chiite, le président de la Chambre, Nabih Berry, et il est peu probable qu’il soit dans la ligne de mire du Hezbollah lui-même, peu désireux d’assumer la responsabilité de l’effondrement économique s’il remplace M. Salamé par un proche. »

Lire aussi

À Tripoli, une mobilisation « pas si spontanée »

La participation de partisans du Hezbollah et d’Amal à la manifestation de jeudi n’est pas nécessairement une démonstration de force. Suivant des sources du 8 Mars à L’OLJ, le Hezbollah aurait été surpris par la réaction virulente de la communauté sunnite samedi, et aurait cherché hier à estomper l’impression laissée par les confrontations de la semaine précédente. Toujours selon cette source, ce serait aussi un message adressé aux alliés, notamment au Courant patriotique libre, sur le fait que la population proche du Hezbollah, comme le reste des Libanais d’ailleurs, ne supporte plus cette situation en chute libre.

« Tiraillés » entre la colère et l’engagement partisan

Car ce « public » considéré comme partisan du Hezbollah souffre bel et bien de la dégradation de la situation socio-économique, ce que les groupes de la contestation reconnaissent volontiers. « Les partisans du Hezbollah sont tiraillés, estime Serge Dagher, coordinateur des relations politiques du parti Kataëb. Je crois qu’ils sont fatigués et qu’ils ont faim comme les autres. Mais le conditionnement idéologique auquel ils sont soumis depuis des années fait qu’ils hésitent à participer à des mouvements qui pourraient nuire à leur parti, selon eux. » M. Dagher ne se fait cependant pas d’illusion sur le caractère orchestré de l’arrivée de ces manifestants sur les lieux jeudi, ni sur les slogans scandés. « Je pense que le Hezbollah est présent dans la rue depuis le début de la thaoura et qu’il tente d’y être influent, dit-il. Ce qui s’est passé samedi lui convenait bien parce qu’il joue sur la fibre communautaire. Hier, il a une fois de plus essayé de faire avancer son agenda, ce qui était clair par le ciblage de la BDL et de son gouverneur, réputé pour être soutenu par les Américains. Et il a mis par la même occasion sous pression ses alliés du CPL, peu prompts aux concessions. En d’autres termes, au sein de la contestation, le Hezbollah ne recule pas devant la confrontation quand ses intérêts sont menacés, alors qu’il essaie de s’y intégrer quand cela lui est utile. »

Lire aussi

La révolution et le piège de la sédition

Pour Amine Issa, coordinateur politique du Bloc national, « l’appel à la démission du gouverneur de la BDL par les manifestants proches du Hezbollah montre bien que le parti servait ses objectifs par le biais de cette participation ». Toutefois, il met en garde contre « le jour où, la détérioration de la situation aidant, le parti ne pourra même plus contrôler ses partisans » car « comment penser que ces gens-là n’étaient pas en colère ? »

Les groupes de la contestation craignent-ils une mainmise du Hezbollah sur le mouvement ? « Ces tentatives ont commencé avec le début de la révolte et sont demeurées sans succès, assure M. Issa. Ces techniques éculées ne sont pas à la hauteur du changement en marche. Le pays se transforme, et ils n’y pourront rien. »

« Voilà pourquoi il est important de rester au sein de la thaoura afin de contrebalancer l’influence que le Hezbollah a toujours voulu y exercer, affirme pour sa part Serge Dagher. Personne n’est dupe de ces stratagèmes. »

Quand les manifestants rassemblés sur le Ring jeudi soir ont vu affluer des mobylettes venant du côté de Khandak el-Ghamik, un quartier de Beyrouth acquis au tandem chiite, ils se sont préparés à une confrontation. Pourtant, c’est en alliés que les manifestants de ce quartier sont venus se joindre à eux. Le soulagement était perceptible au sein du rassemblement, et les slogans contre...

commentaires (15)

Le Hezbollah veut la tête de Salame pour mettre un de ses hommes mais il a oublie que à ce point la , l' Occident n'aidera pas le Liban

Eleni Caridopoulou

13 h 14, le 14 juin 2020

Tous les commentaires

Commentaires (15)

  • Le Hezbollah veut la tête de Salame pour mettre un de ses hommes mais il a oublie que à ce point la , l' Occident n'aidera pas le Liban

    Eleni Caridopoulou

    13 h 14, le 14 juin 2020

  • LE HEZBOLLAH VEUT LA TETE DE RIAD SALAME POUR RAISONS BIEN CONNUES ET LA MAINMISE SUR LE PAYS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    17 h 40, le 13 juin 2020

  • Le cancer est insidieux et se camoufle pour s'assurer d'une métastase complète : la présidence du parlement en premier, de la République en deux, celle des ministres ...et voilà qu'il s'attaque peu à peu au peuple affamé en feignant être l'un des leurs.. Ce même cancer a dévasté la Syrie et l'Iran ainsi que le Yémen...le cancer n'est ni chiite ni sunnite ni druze ni chrétien, ni libanais ni syrien ni PSP ni forces libanaises ni communiste ni ...il est juste là pour anéantir la notion d'état dans notre région... Allah yihmina...et qu'il nous ouvre le yeux

    Wlek Sanferlou

    16 h 03, le 13 juin 2020

  • QUELLE PRESENTATRICE DE QUELLE CHAINE TV AVAIT SAUTE DE JOIE ET APPLAUDI LES VOYOUS INDEPENDANTS MOTORISES SE JOINDRE AUX REVOLUTIONNAIRES DU JEUDI SOIR ?

    Gaby SIOUFI

    15 h 01, le 13 juin 2020

  • Ne cherchez pas trop ! C'est bien plus simple : Le Hezb est toujours logique avec lui-même en participant à la pseudo-révolution il unifie la rue libanaise contre la politique américaine visant à anéantir le Liban et garantit ainsi une résistance populaire à toute tentative de continuer à americaniser les orientations de la BDL .

    Chucri Abboud

    13 h 36, le 13 juin 2020

  • Il ne manquait plus dans l’univers Libanais que le covid-19 pour venir compliquer notre tâche ô combien déjà perturbé par le virus Ebola et la bactérie Bacille du Levant. Nul doute qu’il faut rendre à César ce qui appartient à César Act et que nous nous dirigeons vers de multiples guérisons car la charge virale et bactérienne étaient devenus insoutenables!

    PROFIL BAS

    12 h 06, le 13 juin 2020

  • Que cherche le Hezbollah par sa participation ? Capturer les slogans du soulèvement , en se les appropriant faussement, pour les dénaturer....ça rappelle son appui à la création du Tribunal Special pour le Liban en 2005...

    LeRougeEtLeNoir

    11 h 53, le 13 juin 2020

  • Le monde politique libanais est composé de plusieurs partis sponsorisés par des états étrangers en direct ou en proxy. Ces états appartiennent à trois catégories : 1. Des démocraties exigeantes d’un minimum de valeurs humanistes. 2. Des dictatures éclairées exigeant une allégeance servant leur intérêt. 3. Des états voyous et mafieux, asservissant et pillant. Qui va gagner?

    DAMMOUS Hanna

    10 h 53, le 13 juin 2020

  • je ne voudrais pas etre a la place de nasrallah ! devoir subir les desiderata mais surtout les caprices de aoun et jobran alors qu'il risque perdre l'initiative face a ses propres ouailles ! mais bon c la strategie qu'il s'etait choisie: couvrir absolument ces 2 personnages car sinon ....il risque de se retrouver seul face a KELLOUN !

    Gaby SIOUFI

    10 h 50, le 13 juin 2020

  • Quelle supercherie !!

    LeRougeEtLeNoir

    08 h 37, le 13 juin 2020

  • Étant à court d’argent il ne cherche plus qu’à s’emparer de l’argent du Liban en scandant des slogans anti Salamé.

    PROFIL BAS

    07 h 49, le 13 juin 2020

  • Que cherche le Hezbollah? Cela me semble évident: détourner à son profit la légitime colère populaire. Les appels à la démission de Riad Salamé suffisent à le prouver.

    Yves Prevost

    07 h 13, le 13 juin 2020

  • Manifester ensemble et côte a côte avec les mêmes elements et Chemises Noires qui ont battu, agresse et violente nos jeunes lors des dernieres manifestations constitue a mes yeux un acte Irresponsable, aberrant et revoltant. Quest devenu l'esprit de notre jeunesse d’avant guerre, cette jeunesse fiere, patriote et courageuse ?

    Cadige William

    07 h 08, le 13 juin 2020

  • Tableau trompeur. Ils viennent casser et bruler le centre-ville. Méfiez-vous.

    Esber

    03 h 39, le 13 juin 2020

  • LE HEZBOLLAH CHERCHE LA TETE DE RIAD SALAME. LA PARTICIPATION DE SES PARTISANS A LA CONTESTATION EST BIEN BIZARRE. IL CHERCHE PAR TOUS LES MOYENS A DISCREDITER LA REVOLUTION ET LA DEVIER DE SON VRAI BUT.

    LA LIBRE EXPRESSION

    00 h 58, le 13 juin 2020

Retour en haut