
Le professeur Riad Sarkis, chirurgien oncologue à l’Hôtel-Dieu de France et à l’hôpital Saint-Antoine à Paris, titulaire d’un doctorat d’État français d’innovation.
On connaissait la capacité des chiens à détecter drogues et explosifs. Aujourd’hui, le flair de nos amis à quatre pattes est mis à contribution pour tenter d’identifier les porteurs du Covid-19. En avril dernier, des essais ont débuté simultanément en France et au Liban. Le porteur du projet est libanais, il s’agit du professeur Riad Sarkis. En concertation avec Dominique Grandjean, professeur à l’École nationale vétérinaire de Maisons-Alfort, en région parisienne, il a mis en place le protocole expérimental pour chiens renifleurs du coronavirus.
Chirurgien oncologue à l’Hôtel-Dieu de France et à l’hôpital Saint-Antoine à Paris, titulaire d’un doctorat d’État français d’innovation, Riad Sarkis travaille au sein du programme Nosaïs pour le développement d’une technique permettant de dépister de façon précoce des maladies, tels les cancers, grâce au formidable odorat des chiens. Baptisés Nosaïs Covid-19, les tests sur la formation des chiens à la détection du coronavirus ont été lancés en France ainsi qu’au Liban pour lutter contre la redoutable pandémie. Sous l’égide de Riad Sarkis, les essais se déroulent dans une école de dressage, à Barbara, au Liban-Nord. « Depuis avril dernier, quatre chiens sont entraînés à détecter les composés odorants du coronavirus. Oui, les patients positifs au Covid-19 émettent une odeur corporelle distinctive, que les chiens peuvent repérer grâce à leur flair très développé », indique-t-il, ajoutant que cette petite brigade à quatre pattes pourrait être opérationnelle d’ici à la fin du mois de juin.
Riad Sarkis est un condensé d’enthousiasme et d’idéalisme. Outre sa passion pour Baalbeck, son village natal, dont témoigne sa page Facebook intitulée « Baalbakiyati », c’est la passion du métier et la foi en l’humain qui l’animent. Habitué à une double gestion du temps, entre le soin au patient et la recherche au sein du programme Nosaïs, le voilà confronté, dans le cadre de la pandémie de Covid-19, à une nouvelle urgence. « Nos études ayant démontré que les tumeurs émettent dans l’air des composés organiques volatils (COV) qui sont détectés par les chiens, je me suis dit qu’il ne serait pas impossible qu’il en soit de même pour le Covid-19. Il n’y a pas de raison pour que le virus ne laisse pas de traces olfactives sur une personne contaminée. C’est là que j’ai eu l’idée de mettre à contribution le flair des chiens pour lutter contre la pandémie. »
Le berger malinois durant son entraînement au centre Mario k-9. Photos DR
Un jeu pour nos amis à quatre pattes
Si les essais sont concluants, les chiens deviendront de redoutables agents pour le dépistage précoce des personnes asymptomatiques, contaminées sans le savoir puisqu’elles n’ont pas développé de symptômes de la maladie. Comment les chiens pourraient-ils les identifier ? Riad Sarkis explique sa méthode : « Des compresses spéciales sont plaquées sous les aisselles des patients testés positifs au virus, pour prélever leur transpiration. Les compresses sont ensuite mises dans des bocaux stérilisés puis acheminées à l’école de dressage où elles sont placées dans une petite trappe, près du jouet préféré du chien. Ce dernier doit alors retrouver ces compresses parmi d’autres non contaminées. Il devra alors se coucher ou s’asseoir devant le support contenant la compresse positive pour se voir récompenser de son jouet. » « Nous multiplierons les essais jusqu’à atteindre le niveau de détection nécessaire », ajoute-t-il.
Le professeur Sarkis signale que sur les 240 tests nécessaires, ils en sont aujourd’hui à 200 qui ont tous donné des résultats à 100 % fiables. « Les chiens ont pu, à chaque fois, trouver le prélèvement positif. Ils ne se sont pas trompés une seule fois », affirme-t-il. La technique est actuellement en attente de validation scientifique.
« Le flair des chiens est infaillible »
Le but du projet est d’enrôler de nombreux chiens afin de les déployer dans des lieux de forte affluence, dans les aéroports, les écoles, les stades de sport, à l’entrée des restaurants, etc. À Beyrouth, la banque Mawared, par exemple, a d’ores et déjà demandé à pouvoir bénéficier de ce programme. « Le procédé, facile à mettre en œuvre, est une solution complémentaire aux tests PCR qui ont une fiabilité de moins de 80 %. Il promet plus de sécurité, moins de retard pour détecter le virus et des interventions plus rapides pour prévenir la propagation du virus », précise encore le scientifique. Cette méthode qui aide à sauver des vies a déjà intéressé une quarantaine de pays, dont Abou Dhabi et Dubaï, le Koweït, Qatar et tout récemment l’Égypte. « Tous vont suivre le même protocole de travail », précise Riad Sarkis. Avec ce dispositif « simple » et « non invasif », il espère à terme « étendre ce processus à tous les pays ».
Mais ce qui lui tient particulièrement à cœur, c’est d’enrayer, grâce à ces dépistages, la comorbidité, qui aggrave l’état de santé des malades. « L’association de plusieurs maladies dont les effets néfastes vont se cumuler entraîne la dégradation de l’état de santé du patient. Le corps déjà fragilisé par d’autres pathologies est moins disposé à résister à un virus aussi puissant. » Et d’ajouter : « Il m’est insupportable de voir souffrir ou mourir les personnes âgées. Nous sommes dans une nécessité de dépistage massif et je pense que tous les moyens sont bons à prendre. »
Les recherches ont démontré que des chiens ont pu être entraînés à renifler l’odeur de l’infection paludéenne avec un niveau de précision « supérieur aux normes de l’Organisation mondiale de la santé pour un diagnostic ». Pour le professeur Sarkis, la détection du Covid-19 est dès lors assurément dans leurs cordes : « Le flair des chiens est infaillible ! » Et de relater une histoire parmi tant d’autres, celle d’un labrador qui a détecté les premiers signes du cancer de sa maîtresse et lui a sauvé la vie. Un étrange changement de comportement et ses démonstrations d’affection insistantes et inhabituelles ont alerté la dame qui a été consulter son médecin. Sa biopsie et sa mammographie ont confirmé qu’elle avait un début de cancer. Sans son labrador, elle ne serait sans doute pas allée chez le médecin à temps.
PRIERE LIRE RENIFLER. MERCI.
17 h 21, le 09 juin 2020