C’est en plein Conseil des ministres que le président de la République Michel Aoun a répondu hier à ceux qui, selon lui, l’accusent d’empiéter sur le prestige et les prérogatives de la présidence du Conseil. Le chef de l’État enfonçait ainsi le clou dans la querelle avec le courant du Futur.
Il est vrai que les rapports entre le Futur et le tandem Baabda-Courant patriotique libre sont rompus depuis le 14 février dernier, date de « l’enterrement définitif » du compromis présidentiel par Saad Hariri. Mais la querelle avait repris de plus belle à l’issue de la séance gouvernementale du 29 mai dernier. À la faveur d’une entente politique préalablement conclue entre Michel Aoun et le Premier ministre Hassane Diab, le Conseil des ministres a, ce jour-là, approuvé le plan pour l’électricité voté sous le gouvernement Hariri. Ce texte stipule la construction d’une centrale électrique à Selaata dans le caza de Batroun, fief du chef du CPL Gebran Bassil. Le cabinet revenait ainsi sur une décision antérieure, stipulant la seule mise en place des centrales de Zahrani (Liban-Sud) et de Deir Ammar (Akkar).
Le courant du Futur a vu dans cette démarche une décision imposée au cabinet par le binôme Baabda-CPL, en dépit de l’opposition de l’écrasante majorité des composantes gouvernementales. Le groupe parlementaire haririen s’est donc empressé de mettre en garde contre « un empiètement politique et partisan voulu sur les prérogatives de la présidence du Conseil », comme on pouvait le lire dans un communiqué publié mardi à l’issue de la réunion hebdomadaire du groupe. Les députés du Futur avaient également stigmatisé les tentatives de « transformer le Conseil des ministres en une institution dépourvue de toute constitutionnalité, un instrument d’exécution de l’agenda du parti au pouvoir », et dénoncé « une volonté d’instaurer un régime présidentiel ».
Cette prise de position avait provoqué l’indignation de la présidence de la République qui a publié un communiqué, dans lequel Baabda s’était défendu de vouloir instaurer un régime présidentiel.
Hier, Michel Aoun est personnellement intervenu pour mettre les points sur les i. Prenant la parole au début de la réunion gouvernementale, il s’en est pris à ceux qui critiquent le cabinet et ses choix. Il s’est dit « désolé » de constater que « l’opinion publique assiste à des campagnes menées contre le pouvoir et le gouvernement, articulées autour des raisons de la crise actuelle ». « Tout le monde sait que ni vous ni moi-même ne sommes responsables de la crise actuelle. Nous n’avons pas volé les deniers publics. Et personne ne peut nous accuser de quoi que ce soit », a-t-il ajouté. Et le président Aoun de poursuivre : « Je suis désolé de voir ces campagnes. Mais il ne faut plus rester les bras croisés et nous ne pouvons plus continuer à supporter les accusations lancées à notre encontre. » « J’use de toutes mes prérogatives. Et je connais bien celles de tous, en particulier celles de la présidence du Conseil », a-t-il martelé, dans ce qui sonne comme une réponse directe au communiqué publié mardi par le bloc haririen.
Il va sans dire que la diatribe contre la présidence de la République est également adressée à Hassane Diab, cible régulière des critiques du courant du Futur. Aussi, le Premier ministre a-t-il profité de son intervention lors de la séance ministérielle d’hier, pour réagir face aux flèches décochées en direction de son équipe. M. Diab a déploré le fait que « depuis sa formation, son gouvernement est la cible de préjugés et d’attaques politiques ».
La réaction de Siniora
Quelle sera la prochaine étape de la querelle entre le Futur et le pouvoir en place ? Interrogé par L’Orient-Le Jour, Fouad Siniora, ancien Premier ministre et faucon du parti haririen, assure que sa formation « n’est pas en guerre contre Michel Aoun et son mandat ». « Mais il est probable que le chef de l’État soit en guerre contre nous », souligne-t-il, précisant que le Futur ne fait que « protéger la Constitution, l’accord de Taëf et les lois en vigueur ». Réagissant aux propos de Michel Aoun, l’ancien chef de gouvernement se contente de déclarer que « ce sont les choix exécutés en pratique qui démontrent les intentions des uns et des autres ». Commentant l’affaire Selaata, Fouad Siniora la qualifie de « scandale ». « Il est grand temps pour Hassane Diab de prendre les choses en main et d’arrêter de permettre aux faucons du pouvoir de lui imposer les décisions qui leur conviennent », conclut M. Siniora.
commentaires (15)
précisant que le Futur ne fait que « protéger la Constitution, l’accord de Taëf et les lois en vigueur ». ca arrange tout le monde en particulier les voleurs si ce n est pas son cas qu il montre son patrimoine , Mr Sanioura connait la musique le meilleur défense c est l attaque
youssef barada
18 h 05, le 05 juin 2020