Rechercher
Rechercher

Nos Lecteurs ont la Parole

Quand on n’a que l’amour...

Notre histoire se passe au Metn-Nord, au Mont-Liban. Bhersaf, le 11 octobre 2019. La veille de la fameuse « intifada » du 17 octobre.

Chaque fin de mois, Salim devait consacrer un montant de 100 $ à peu près pour se procurer des médicaments à lui et à son épouse. Mais ce jour-là, il apprit par les nouvelles l’imminence d’une pénurie qui allait toucher un grand nombre de médicaments et qui risquait de durer vu la situation économique désastreuse du pays. Il décida alors de se constituer une sorte de réserve médicamenteuse à lui et à son épouse. Il se dit qu’avec 600$, il pourrait s’approvisionner pour une période de six mois pour tous les deux.

À la pharmacie, il s’inquiéta davantage lorsqu’il apprit de la bouche même de l’apothicaire que l’ordre des pharmaciens s’apprêtait à entamer une grève pour protester contre le manque de certains médicaments essentiels, le monopole des cartels, la flambée des prix… Il décida alors de dépenser tout l’argent qu’il possédait pour se procurer exclusivement les médicaments de son épouse, n’acquérant rien pour lui.

Et c’est avec un stock de près de 12 mois, constitué exclusivement de médicaments pour sa femme, qu’il quitta la pharmacie, apaisé et serein, tel un enfant sur les genoux de sa mère. Le sentiment de quiétude et de tranquillité qui l’envahissait balayait de loin l’angoisse qu’il pouvait ressentir sur son cas. Il se sentait bien plus tranquillisé sur le sort de son épouse qu’inquiet sur sa propre situation. Et sur le chemin du retour, il se disait qu’il allait toujours pouvoir se débrouiller pour se procurer ses propres médicaments.

De retour au foyer, alors qu’il rangeait les boîtes et les flacons dans l’armoire à pharmacie, il remarqua la présence d’un grand sac. Voulant s’enquérir de la provenance de ce sac et sur son contenu, il appela son épouse Sara. Et là, il l’entendit lui murmurer : « Quand j’ai appris qu’il pourrait y avoir une grève et une pénurie de médicaments, j’ai craint le pire. J’ai pris alors tout l’argent que j’avais sur moi et je t’ai acheté avec tes médicaments à toi. »

Cet homme, cette femme ou ce couple pourraient être aussi bien chrétiens que juifs, aussi bien musulmans qu’hindous, que bouddhistes ou même athées. Ils pourraient également être noirs, blancs ou jaunes.

Comme ils auraient tout aussi bien pu appartenir à une autre époque. L’amour (le vrai) transcende la religion, plane au-dessus des races et des ethnies, traverse les époques et le temps. Et nous sommes également bien d’accord que la véritable religion est celle qui tolère toutes les autres religions.

On peut penser que Salim a aimé sa femme plus que lui-même ou que Sara a aimé Salim plus qu’elle-même. Mais on peut aussi penser qu’il l’a aimée autant que lui-même ou qu’elle l’a aimé autant qu’elle-même car, elle et lui, lui et elle ne faisaient qu’un.

« Aime ton prochain comme toi-même », nous scande le Christ. Mais au fond, de proche en proche ou bien de prochain en prochain, n’aboutissons-nous pas aussi à « Aime ton lointain comme ton prochain » ? et donc finalement à « Aime ton lointain comme toi-même » ?


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Notre histoire se passe au Metn-Nord, au Mont-Liban. Bhersaf, le 11 octobre 2019. La veille de la fameuse « intifada » du 17 octobre.Chaque fin de mois, Salim devait consacrer un montant de 100 $ à peu près pour se procurer des médicaments à lui et à son épouse. Mais ce jour-là, il apprit par les nouvelles l’imminence d’une pénurie qui allait toucher un grand nombre de...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut