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Moyen-Orient - Éclairage

Coronavirus : les éléments qui pèsent sur le conflit israélo-palestinien

Comme ailleurs, la pandémie pourrait confirmer ou accélérer des tendances pré-existantes.

Des Palestiniens se reposent à l’ombre du mur érigé par Israël près de Ramallah. Ammar Awad/Photo d’archives Reuters

Annexion, fin des accords de coopération, effondrement économique de l’Autorité palestinienne : ils sont annoncés ou redoutés depuis des années, mais leurs destins pourraient être accélérés par les retombées indirectes, politiques et économiques de la pandémie du coronavirus.

Malgré une épidémie contenue et un nombre de victimes relativement limité en Israël (279 morts), à Gaza comme en Cisjordanie (2 morts), le coronavirus a eu pour conséquence première de favoriser un accord d’alliance, dans l’urgence, entre deux anciens rivaux, Benjamin Netanyahu et Benny Gantz, clôturant ainsi un an et demi de crise politique et de paralysie des institutions. « Aujourd’hui on sait que l’épidémie en Israël a finalement été peu meurtrière, sauf pour les ultra-orthodoxes qui représentent 10 % de la population, mais la majorité des morts. Toutefois, au moment où Benny Gantz a décidé de trahir son parti et ses électeurs, on ne savait pas que l’épidémie serait aussi peu meurtrière : il y avait un vent de panique, très largement amplifié par la propagande, sur lequel Netanyahu a joué », estime Dominique Vidal, écrivain et journaliste.

Le gouvernement d’union nationale fraîchement intronisé à la faveur de l’urgence épidémique devra trancher en juillet sur l’annexion prochaine d’une partie de la Cisjordanie, suite au « plan de paix » de Donald Trump annoncé en janvier dernier. Une des missions principales du nouveau ministre de la Justice, Avi Nissenkorn, sera alors de traduire le plan d’annexion en termes juridiques, notamment en introduisant le droit israélien à ces nouveaux territoires de Cisjordanie, officiellement toujours soumis à la loi martiale.

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Côté palestinien, la catastrophe sanitaire redoutée, notamment à Gaza, n’est pas arrivée. « Pour une fois, l’embargo contre Gaza a joué un rôle positif en isolant la population des possibles transmissions de virus depuis Israël », note Dominique Vidal. En Cisjordanie, la gestion de la crise par l’Autorité palestinienne a été largement saluée, malgré les larges flux de Palestiniens travaillant en Israël, qui jusqu’à la restriction des déplacements auraient pu massivement importer le virus.

La crise a donc été gérée séparément par les autorités locales avec peu de coopération et d’envoi d’aides matérielles vers Gaza et la Cisjordanie. « La logique aurait été de rentrer dans une phase de coopération active dans la lutte contre le virus. Mais il n’y a quasiment pas eu de coordination entre les systèmes de santé », fait remarquer Dominique Vidal.

Troisième intifada ?

Malgré le faible taux de contamination, les retombées économiques des mesures de confinement ont accéléré une crise économique déjà très forte en Cisjordanie et précipité l’Autorité palestinienne au bord du gouffre économique, social et politique. « L’effondrement de l’Autorité palestinienne est une des conséquences importantes possibles de la crise actuelle. Ajoutée à la décision d’annexion attendue, cela peut amener à une explosion de violence tout à fait inédite : les gens n’auront plus rien à perdre », observe Dominique Vidal, en référence notamment à l’incapacité croissante de l’Autorité palestinienne de payer les salaires de ses fonctionnaires. « S’il n’y a plus de salaires, il n’y a plus rien à perdre », explique le journaliste, avant de poursuivre : « Je n’annonce pas une troisième intifada tous les 15 jours, mais il n’est pas exclu que tout ce cumul amène à une explosion de violence. »

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L’annonce mardi par le président Mahmoud Abbas de la volonté de se retirer des accords de coopération avec Israël en réaction aux projets d’annexion, jugée impraticable par beaucoup d’observateurs, a renforcé certains questionnements quant à l’avenir de l’Autorité palestinienne. Elle a également relancé le débat sur les conditions d’existence d’une Autorité palestinienne en pratique entièrement dépendante de la tutelle israélienne. « Une décision qui n’a rien à voir avec la Covid-19, mais qui vise simplement à envoyer un message à Donald Trump et à Benjamin Netanyahu : s’ils comptent violer le droit international et imposer une politique unilatérale, les accords d’Oslo n’ont plus de raison d’être », note Dominique Vidal. Même indépendante de la crise sanitaire, cette décision, si elle se confirme, pourrait donc s’ajouter aux tendances existantes, précipitant le cours du conflit et rendant de plus en plus chimérique la possibilité d’une coexistence de deux États viables.

Annexion, fin des accords de coopération, effondrement économique de l’Autorité palestinienne : ils sont annoncés ou redoutés depuis des années, mais leurs destins pourraient être accélérés par les retombées indirectes, politiques et économiques de la pandémie du coronavirus.Malgré une épidémie contenue et un nombre de victimes relativement limité en Israël (279 morts),...

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