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Société - Épidémie

Il est possible de se baigner dans l’eau de mer, assurent les experts

Aucune étude n’a prouvé, à ce jour, la contamination de l’eau de mer par le coronavirus, qui est par contre présent dans les matières fécales et par conséquent dans les eaux usées. Les substances contenues dans l’eau de mer atténuent l’impact des matières polluantes.

Des Libanais ont bravé la décision du ministère de l’Intérieur et se sont baignés dans l’eau de mer. Joseph Eid/AFP

Dimanche soir, à l’issue de la réunion gouvernementale consacrée à l’évaluation des quatre jours de bouclage total pour lutter contre une recrudescence des cas de coronavirus, le ministre de l’Intérieur, Mohammad Fahmi, autorisait la baignade dans les piscines. Mais pas dans la mer. M. Fahmi affirmait que cette décision avait été prise « après avoir consulté de nombreux experts ». Il a expliqué que les aérosols, à savoir la dispersion en particules extrêmement fines d’un liquide, résultant des vagues « peuvent causer une transmission du virus ».Des déclarations qui ont enflammé les réseaux sociaux. Les uns affirment que cela fait plusieurs semaines qu’ils se baignent dans l’eau de mer et qu’ils se portent bien. Les autres évoquent la salinité de l’eau de mer qui, selon eux, tue tous les virus. D’autres encore qualifiaient les arguments avancés par le ministre comme une « science à deux sous ».

Mais que disent les organismes scientifiques et les experts ? « Il n’y a pas encore de preuves d’une contamination de l’eau de mer par le coronavirus, ou si celui-ci survit dans cette eau », explique à L’Orient-Le Jour le Dr Jacques Mokhbat, spécialiste en maladies infectieuses. Selon lui, s’il existe un risque, il se poserait au niveau des plages contaminées par les eaux usées. « La présence du coronavirus dans les matières fécales a été prouvée, note-t-il. Mais il ne peut être transmis que par les aérosols. Or, en se brisant sur la plage, les vagues contaminées par les eaux usées en produisent. Théoriquement, selon certains départements de santé publique aux États-Unis, ceux-ci pourraient être chargés du coronavirus qui se suspendrait alors dans l’air et serait projeté par le vent sur une distance allant au-delà des deux mètres évoqués jusqu’à présent. Le risque serait moindre dans les centres balnéaires parce qu’on est loin de la plage. Toutefois, dans ces endroits et partant du même principe, les plongeons pourraient présenter le même risque. De plus, qui va contrôler que les enfants ou tout autre individu ne vont pas cracher ou se moucher au bord de la piscine, ce qui présente le même risque de transmission du virus, surtout s’ils sont des porteurs asymptomatiques. »

Traiter les eaux usées

Revenant sur les mesures sanitaires publiées par le ministère de l’Intérieur à l’intention des centres balnéaires, le Dr Mokhbat note qu’elles sont bonnes à condition d’être appliquées à la lettre. Et de se demander, au sujet de ces mesures : « Qui va le faire ? Comment peut-on contrôler la distanciation dans ces endroits ? Va-t-on interdire aux enfants de jouer ensemble ? Quid de l’hygiène ? Les visiteurs vont se partager les mêmes transats et chaises. Qui va contrôler qu’ils sont bien désinfectés avant chaque utilisation ? À mon avis, cette décision d’interdire la baignade dans l’eau de mer n’aurait pas dû être prise, d’autant que les gens vont continuer à le faire, surtout les plus démunis d’entre eux qui n’ont pas les moyens de s’offrir l’entrée à ces centres balnéaires ayant souvent des tarifs d’admission exorbitants. Une telle décision ne favorise-t-elle pas ces endroits ? »

Pour le Dr Mokhbat, « on ne doit pas avoir plus peur du coronavirus que d’autres virus, comme l’hépatite A et la salmonelle, qui se trouvent en grande concentration dans les égouts et par conséquent dans l’eau de mer. Il est grand temps que le gouvernement pense à s’occuper sérieusement du traitement des eaux usées et du problème des décharges sanitaires ».

Même son de cloche au sein du Conseil national de la recherche scientifique (CNRS) dont les experts ne cachent pas leur étonnement face à la décision du ministre de l’Intérieur. Milad Fakhri, directeur du Centre national d’océanographie au CNRS, explique à L’OLJ « que l’eau de mer renferme plusieurs substances qui constituent des antiseptiques naturels, comme le sodium qui se trouve en grande concentration (39 g par kilogramme), le chlorure de sodium et l’iode ». « À cela s’ajoutent les rayons UV qui ont un effet de purification, ainsi que le mouvement hydrodynamique de l’eau et la vaste étendue de la mer qui atténuent l’impact des matières polluantes, poursuit-il. Donc, il est possible de nager et de plonger dans l’eau de mer et même de pêcher le poisson et d’en manger. Toutefois, nous conseillons toujours aux gens de nager à une distance allant d’au moins 50 à 100 mètres de la bouche d’égout. En nous basant sur la carte de la pollution de la côte que nous publions chaque année, nous pouvons assurer qu’il y a des endroits où on peut nager sans encourir de risques. »

« Les sources de pollution sur la côte sont connues, renchérit Gaby Khalaf, conseiller scientifique en océanographie au CNRS. D’ailleurs, depuis près de vingt ans, nous effectuons des études sur la mer, et les résultats sont annoncés vers la mi-juin. Cette année aussi, nous avons poursuivi nos activités au Centre d’océanographie relevant du CNRS, malgré l’épidémie de coronavirus et la crise économique. Nous les annoncerons prochainement. »

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En ce qui concerne le coronavirus, « le peu d’études et statistiques obtenues dans ce cadre soulignent qu’il serait présent en plus grandes quantités dans les eaux polluées par les déchets ménagers et les égouts », poursuit-il. « Mais il n’existe pas encore de test pour mesurer la concentration du coronavirus dans ces eaux. Il n’en reste pas moins que l’eau de mer tue le coronavirus », précise M. Khalaf

Réitérant leur appel à la nécessité de penser sérieusement au traitement des eaux usées, les deux experts concluent en affirmant que la précaution consiste à nager loin des bouches d’égout, que le CNRS a d’ailleurs identifiées et définies dans la carte de pollution, mais surtout à respecter la distanciation.

Dimanche soir, à l’issue de la réunion gouvernementale consacrée à l’évaluation des quatre jours de bouclage total pour lutter contre une recrudescence des cas de coronavirus, le ministre de l’Intérieur, Mohammad Fahmi, autorisait la baignade dans les piscines. Mais pas dans la mer. M. Fahmi affirmait que cette décision avait été prise « après avoir consulté de nombreux...

commentaires (4)

Ils ont bien raison les expert, et j'ajouterai même que si l'on n'est pas mort de la pollution de notre littoral on a peu de chance d'y mourir d'autre chose.

Christine KHALIL

13 h 39, le 20 mai 2020

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Commentaires (4)

  • Ils ont bien raison les expert, et j'ajouterai même que si l'on n'est pas mort de la pollution de notre littoral on a peu de chance d'y mourir d'autre chose.

    Christine KHALIL

    13 h 39, le 20 mai 2020

  • Déjà en temps normal, il est déconseillé de se baigner sur une grande partie du littoral libanais cause pollution et saleté ( sans parler des ordures ménagères qui dégoulinent et flottent à la surface de l'eau..ou dans ses profondeurs... Donc parler de "nager" au liban en plein virus et échange de salives, pisses et autre rejets des gens de leurs corps... Ca sera un covid doublement plus dangeureux les gars !!! attention... Relancer le tourisme aux dépends de la vie des gens..pas bon...pas bon... Les gros bonnets veulent faire du fric aux dépends de la vie des gens ( une fois de plus ) .

    LE FRANCOPHONE

    12 h 04, le 20 mai 2020

  • RIEN N,EST SUR AVEC CE FLEAU. MAINTENIR LA DISTANCIATION A LA PLAGE ET SURTOUT DANS LA MER N,EST PAS POSSIBLE. IL FAUT SE CONTENTER DE SE BRONZER AU SOLEIL.

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 48, le 20 mai 2020

  • Vous n’avez qu’à tester l’eau de mer et vous serez fixés...

    Gros Gnon

    04 h 26, le 20 mai 2020

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