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Culture - Cinéma

Et si Hitchcock était le simple témoin de la psychose humaine ?

Cela fait quarante ans que ce grand cinéaste est décédé, le 29 avril 1980 plus exactement. On l’appelait le maître du suspense, mais c’est peut-être lui-même le plus grand mystère à élucider. Et son œuvre derrière lui.


Hitch, le mystérieux maître du suspens. Photos DR

Comment ce Britannique est-il arrivé à Hollywood ?
Dans les années 1930, Alfred Hitchcock est considéré comme le cinéaste le plus important d’Angleterre. Le metteur en scène désormais adulé et jouissant d’une grande liberté a déjà tourné une vingtaine de longs métrages (dont certains muets) qui ont rencontré un large succès dans son pays, notamment The Man Who Knew Too Much (1934) The 39 Steps (1935). Mais le cinéaste est un passionné. Il voudrait transmettre cet amour au plus grand nombre de personnes possible. Et pour cela, il serait capable de s’envoler vers les cieux hollywoodiens qui le courtisent. C’est David O. Selznick, ce découvreur de talents et producteur indépendant de King Kong (1933) et Autant en emporte le vent, qui va finir par lui mettre le grappin dessus. Avec une certaine appréhension, mais beaucoup d’attentes, Hitchcock embarque au début de l’été 1939 pour la Californie avec sa femme (la scénariste et monteuse Alma Reville), sa fille de 11 ans Patricia et sa secrétaire, Joan Harrison. La Seconde Guerre mondiale éclate le 1er septembre. Et le tournage de Rebecca débute sept jours plus tard.

Huit actrices, toutes blondes ? Shocking !
Alors que son épouse Alma qui veillait sur sa carrière était rousse, Hitch fantasmait sur les blondes sur le plateau de tournage. Et pas n’importe lesquelles. Elles étaient du genre chevelure platine au tempérament glacé. Tellement qu’on les appelait les blondes hitchcockiennes. Huit femmes, huit actrices qui ont hanté son cinéma et qui ont incarné, outre le fantasme, le mystère. Ces frustrations à l’égard de ces femmes ont pourtant créé les plus grandes œuvres. D’abord Tippi Hedren, la maman de Mélanie Griffith. Elle était non seulement l’objet de son fantasme mais de son obsession. Révélée par le maître dans The Birds (1963), elle vivra par la suite un véritable calvaire lors du tournage de Marnie quand elle refusa ses avances. Un harcèlement qui, à cette époque, restait malheureusement impuni.

La princesse Grace Kelly, elle, le fascinait par son côté lointain et froid. Trois collaborations au compteur, Dial M. for Murder (1954) qui l’a révélée, Rear Window (1954) et To Catch a Thief (1955) pour cette élégante comédienne tout en retenue. En 1956, lorsqu’elle abandonne le monde du cinéma pour devenir princesse de Monaco, c’est la chanteuse Doris Day qui la remplace dans son deuxième The Man Who Knew Too Much. La Suédoise Ingrid Bergman s’illustre dans son univers dans Spellbound (1945), Notorious (1946) et Under Capricorn (1949). Elle était plus mystérieuse encore que les autres. Et si Kim Novack, la blonde glaciale, remplace Vera Miles dans Vertigo (1958), c’est parce que cette dernière était enceinte. Le chignon en spirale, elle était cependant la moins aimée du maître. Joan Fontaine, elle, a obtenu une nomination aux Oscars pour le film Suspicion où elle incarne Rebecca. Quant à Eva Maria Saint, elle n’a interprété qu’un seul rôle dans North by Northwest (1959). Elle était cependant durant le tournage une marionnette que Hitchcock a transformée de la tête aux pieds, allant jusqu’à l’emmener lui-même choisir ses tenues dans les grands magasins. Enfin Janet Leigh, malgré son seul rôle pour Hitchcock en 1960 dans Psycho (qui n’aura duré que 40 minutes), la scène de la douche aura été d’une influence sans pareille sur le cinéma mondial.

Alfred Hitchcock est-il lui-même un voyeur ?
« Nous sommes devenus une race de voyeurs », affirme, dès le début de Rear Window (1954), l’infirmière qui vient chaque jour masser le photographe immobilisé dans son appartement. Tourné quasiment en huis clos, dans un décor unique, ce film questionne la position du regardant-regardé. Hitchcock place en effet le spectateur dans la position du voyeur, mais n’est-il pas lui-même un voyeur aussi ? Déjà, pendant le tournage de Psycho, on peut apercevoir sir Alfred regarder Janet Leigh alors qu’elle est dénudée sous la douche. Bien qu’on le dise plus espiègle qu’obsessionnel dans cette séquence, cela ne fait pas oublier que nombre de fois il a traité ses actrices sur le plateau et à travers sa caméra à la manière d’un voyeur. Mais Rear Window a aussi une autre explication. Rappelons qu’à cette époque, la télévision était en train de faire une ascension fulgurante face au cinéma en perte de vitesse. Le cinéaste génial va défier le mouvement et faire un film de grand écran qui assimile cette multitude de petites fenêtres à plein de petits écrans. « James Stewart serait l’alter ego de Hitchcock et la chaise du handicapé ne serait autre que la chaise du metteur en scène. »


Drôle(s) d’oiseau(x) ?
En août 1961, alors qu’il prépare l’adaptation au cinéma de la nouvelle The Birds publiée par la romancière britannique Daphne du Maurier en 1952, Alfred Hitchcock entend parler d’un incroyable fait divers survenu dans la ville de Santa Cruz et ses environs, sur la côte californienne. « Les habitants (...) ont été réveillés vers 3 heures du matin par une pluie d’oiseaux se jetant contre leurs domiciles… Effrayés par cette invasion, les habitants se sont précipités dehors, dans leurs jardins, avec des torches… Quand le jour s’est levé, les habitants ont trouvé les rues couvertes d’oiseaux. » Les explications étaient nombreuses à ce film où les oiseaux, volatiles non agressifs surtout quand il s’agit de moineaux accompagnant les corbeaux et autres genres. Certains ont essayé même de donner des explications psychologiques. Pour le cinéaste, « une explication neutraliserait l’angoisse ; le film doit susciter une peur primitive, celle d’être attaqué sans avertissement ni motif ».


Qui est-il exactement et peut-on le cerner ?
C’est Hitchcock qui a inventé cette pratique de caméo où il apparaît pour quelques minutes, voire quelques secondes, dans ses films. C’est en 1927 dans son film The Lodger qu’il fait une double apparition : d’abord de dos, à un bureau, puis en tant qu’ouvrier, derrière une barrière. Tout comme un figurant, Hitch ne joue pas un rôle, mais il traverse ses films comme un observateur anonyme. Il poursuivra cette pratique 37 fois durant, notamment dans Easy Virtue (1928), The Man Who Knew Too Much (1934), ou bien encore The 39 Steps (1935). Ce détail signé Hitchcock rend le public encore plus attentif aux moindres détails du film. Grâce au cinéaste de génie, cette pratique des caméos devient vite une mode et influença ses confrères comme Richard Attenborough dans A bridge too far (1977), John Carpenter dans Fog (1980) ou encore Steven Soderbergh dans Ocean’s Eleven (2001). Mais qui est exactement ce caméo ?

Dans les années 60 naît l’idée du Hitchbook, un livre qui va compiler les rencontres multiples qu’a eues le critique des Cahiers du cinéma François Truffaut avec le cinéaste du suspense. Hitchcock acceptera de répondre à 500 questions portant sur sa carrière. À travers ce livre témoin, Truffaut démontrera que sir Alfred Hitchcock ne devrait pas être uniquement confiné dans la case suspense. C’était le cinéaste de l’angoisse, voire des angoisses enfouies. Le réalisateur des Quatre Cents Coups dira : l’homme était mort mais non le cinéaste, car ses films, réalisés avec un soin extraordinaire, une passion exclusive, une émotivité extrême, masquée par une maîtrise technique rare, n’en finiraient pas de circuler, diffusés à travers le monde, rivalisant avec les productions nouvelles, défiant l’usure du temps, vérifiant l’image de Jean Cocteau parlant de Proust : « Son œuvre continuait à vivre comme les montres au poignet des soldats morts. »


Comment ce Britannique est-il arrivé à Hollywood ?Dans les années 1930, Alfred Hitchcock est considéré comme le cinéaste le plus important d’Angleterre. Le metteur en scène désormais adulé et jouissant d’une grande liberté a déjà tourné une vingtaine de longs métrages (dont certains muets) qui ont rencontré un large succès dans son pays, notamment The Man Who Knew Too Much...

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