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Culture - La compagnie des films

Antoine Khalifé : Le cinéma m’a donné des ailes

Il n’est pas un cinéphile, il est plutôt « cinéphage ». Il dévore les films à la manière de cette passion pour le 7e art qui l’habite depuis qu’il est enfant. Un plaisir immense que le producteur partage avec, toujours, la même constance et la même fidélité.

Antoine Khalifé : « Le 7e art est un univers particulier à la fois magique et perturbateur. » Photo DR

À quel âge la passion du cinéma est-elle née et comment ? Quel a été le film déclencheur?

On ne sait vraiment pas comment naît une passion. On sait juste qu’à un certain moment, elle nous habite. Nous résidions à Byblos et se rendre à Beyrouth pour aller au cinéma reste parmi les souvenirs les plus joyeux de mon enfance. C’est peut-être ce souvenir doublé de cette immense joie qui s’est transformé par la suite en passion. Est-ce les aventures d’Antoine Doinel (Jean-Pierre Léaud) dans les films de Truffaut qui m’ont poussé à me rendre à Paris après un cursus universitaire en journalisme au Liban ? Peut-être.

Quel a été ensuite votre parcours dans le milieu du 7e art ?

Après mes études à l’Université Paris 2 Assas, puis à Paris 7 Jussieu, j’ai dirigé le département des artistes et festivals au sein d’Unifrance, organisme chargé de la promotion du cinéma français à l’étranger. Pour rejoindre plus tard la société saoudienne ART où j’ai participé à la production de nombreux films arabes. J’ai alors dirigé le programme arabe au festival de Dubaï, avant d’accepter la responsabilité pour ce printemps 2020 de conseiller et directeur du programme arabe du Red Sea Film Festival à Jeddah. Malheureusement, cette première édition qui s’annonçait fabuleuse a dû s’arrêter à cause de la propagation du Covid-19.

Qu’est-ce que le cinéma vous apporte? Évasion, délassement, divertissement ou réflexion?

Le cinéma est simplement une deuxième vie pour moi. Il m’a donné des ailes et m’a donné le courage de voyager, de partir quand j’étais encore adolescent alors que la guerre faisait rage dans tout le Liban. C’est un univers particulier à la fois magique et perturbateur.

Si vous étiez un réalisateur, lequel auriez-vous aimé être ? Et quels acteur et actrice auriez-vous choisis ?

Sans doute François Truffaut. Son univers me bouleverse avec tous les menus détails de la vie quotidienne. J’aurais également choisi ses comédiens et surtout Jean-Pierre Léaud (celui qu’on appelait son fils spirituel), Françoise Dorléac et Jeanne Moreau. C’est tout un univers qui m’a fait aimer la vie. D’autre part, j’aurais tant souhaité que Greta Garbo (La Divine) n’arrête pas sa carrière à 39 ans (elle s’est retirée au faîte de sa gloire). J’aurais tant aimé la voir « la » prolonger, tout comme Bette Davis ou Jeanne Moreau.


Antoine Khalifé : « Le 7ème art est un univers particulier à la fois magique et perturbateur. » Photo DR

De combien de titres de film est formée votre bibliothèque ? Ce sont des copies originales ou avez-vous succombé à la tentation des films piratés? Comment les classez-vous?

J’aime beaucoup ma bibliothèque et je suis content d’avoir ramené de Paris tous mes DVD, dont la collection du journal Le Monde. Celui-ci a édité durant plus deux ans un DVD une fois par semaine de tous les grands chefs-d’œuvre du cinéma mondial et j’ai collectionné toute la série. Ce sont environ 15 coffrets au total. Il me semble que je possède 2 000 titres. C’est surtout classé par pays.

Je suis contre les films piratés. Je n’y adhère qu’en dernier recours, comme par exemple quand je rate un film et que je suis impatient de le voir.

Quel est le film que vous avez visionné le plus de fois et toujours avec le même plaisir ?

Il y a un film de Billy Wilder que je visionne sans cesse. C’est Fedora, avec Marthe Keller. Ce n’est certes pas le meilleur film du réalisateur mais ce long-métrage me fascine parce qu’il a été tourné en grande partie en Grèce.

Avez-vous initié quelqu’un à l’amour des films ?

Bien évidemment, tous mes stagiaires. Je les amène voir des films avec moi. J’ai aussi transmis cette passion à de nombreux acteurs arabes qui ne connaissaient pas assez bien le cinéma européen ou asiatique.

Vous avez côtoyé tout au long de votre carrière un grand nombre de réalisateurs et d’acteurs. Vous aimez être à la place où vous êtes actuellement ou avez-vous rêvé un jour de réaliser ou d’écrire un film ?

J’aime lire les scénarios, donner mes observations, participer au casting. Mais je n’ai jamais voulu être à la place d’un réalisateur ou d’un acteur. Je suis uniquement jaloux de grands écrivains, tels Flaubert, Gide... Ou peut-être aurais-je aimé être un peintre comme Courbet ou Corot.

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Y a-t-il un genre que vous n’aimez pas du tout ? Pouvez-vous nommer un film à voir durant le confinement ? Et à ne pas voir ?

Pour être honnête, je n’aime pas les films comiques. J’aime la comédie noire. Quant à cette période de confinement qui nous est à tous imposée, je ne conseille pas un seul film en particulier mais suggère de découvrir par exemple la filmographie d’une actrice, même avec des films pas trop connus. Tenez, par exemple, les films de l’actrice Faye Dunaway comme Bonnie and Clyde, Chinatown, The Eyes of Laura Mars... C’est une occasion de les voir si on ne les a pas encore vus. Quant au film que je ne recommanderais pas en cette période, ce serait la saga des Alien, non pas que ces longs-métrages n’exercent pas une certaine fascination, mais parce que ce n’est tout simplement pas le moment idéal.

Quel est le titre de film qui vous décrit le mieux ?

Ordinary People de Robert Redford, sorti en 1980 et qui avait obtenu à l’époque l’Oscar du meilleur film. Le sujet est d’une grande profondeur et je me suis identifié pour de nombreuses années à l’acteur principal, Timothy Hutton.

Mais c’est trop loin tout cela et soudain, vous me faites replonger dans cet univers. Vous voyez la magie du cinéma. Je vous ai dit, c’est une seconde vie.

Le top 5 des films d’Antoine Khalifé

« J’avais peur de cette question. Trop compliqué d’y répondre, mais je vais essayer de donner quelques titres », signale Antoine Khalifé avant de citer, en vrac :

Stromboli de Roberto Rossellini

Identification d’une femme de Michelangelo Antonioni

Le Décalogue de Krysztof Kieslowski

Breaking the Waves de Lars Von Trier

Sonate d’automne d’Ingmar Bergman

Les parapluies de Cherbourg de Jacques Demy.

« Et je ne peux m’empêcher d’y ajouter les films de mes deux héros libanais : Caramel de Nadine Labaki et West Beirut de Ziad Doueiri », conclut le cinéphile.

À quel âge la passion du cinéma est-elle née et comment ? Quel a été le film déclencheur? On ne sait vraiment pas comment naît une passion. On sait juste qu’à un certain moment, elle nous habite. Nous résidions à Byblos et se rendre à Beyrouth pour aller au cinéma reste parmi les souvenirs les plus joyeux de mon enfance. C’est peut-être ce souvenir doublé de cette immense joie...

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