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Culture - Scène

« Sobhieh », une fraîcheur matinale pour égayer les soirées

La pièce présentée actuellement au Monnot et qui fait rire les Libanais aux éclats est un bol d’oxygène dans un pays asphyxié. Une lueur d’espoir dans le tunnel du désespoir.


Maguy Badaoui et Josyane Boulos, des sœurs bien différentes dans « Sobhieh », pièce mise en scène par Lina Abiad. Photos DR

Mise en scène par Lina Abiad et écrite par Josyane Boulos, Sobhieh est une comédie romantique mais pas que… Une histoire sociale opposant village et ville, mais pas que... Sur fond bucolique, entre rires continus et situations cocasses, Sobhieh évoque également en filigrane le pardon et l’ouverture vers l’autre. Deux sœurs d’un certain âge vivant ensemble dans un village semblent attendre constamment des nouvelles de leur fils et neveu qui est reporter de guerre. Le Liban est en guerre (mais on ne s’y attarde pas trop, sauf quand on écoute les flashs infos). La vie de ces femmes, qui n’ont pas quitté leur lieu natal, s’égrène entre les travaux ménagers, la télévision et leurs petites querelles, surtout lorsqu’une jeune voisine vient s’installer dans la maison à côté en apportant son lot de nouveautés. L’une des sœurs va l’aimer et l’adopter.

Quant à l’autre (la maman incarnée par une épatante Josyane Boulos), elle va s’en méfier et la rejeter. Avec l’arrivée du jeune homme du front, un vent d’amour souffle sur la pièce. Laquelle dérive bientôt vers un ton plus grave tout en étant toujours dans le cadre du rire. Sans aucun ton moralisateur et très subtilement.


Que reste-il de nos amours ?

Telle est la potion magique pour la réussite d’une pièce de théâtre. Mêler le sérieux au léger sans faire du superficiel. Et faire rire, tout en distillant le message en douceur. L’auteure, également productrice et interprète, a très longtemps travaillé le texte et l’a remanié maintes fois. Cela l’a rendu plus solide et comme arrivé à maturité. La mise en scène de Lina Abiad colle totalement au texte et doit son dynamisme à une très bonne direction d’acteurs. Elle a travaillé sur les contrastes (physiques et moraux) entre les personnages des sœurs et entre les jeunes gens. La pièce est teintée d’une douce fraîcheur naturelle, mais aussi d’une grande authenticité. Rien n’est emprunté ou affecté. Le ton et le comportement de chacun et chacune aussi. Il semble que le village ait été téléporté sur les planches du Monnot avec ses arômes, ses senteurs, son temps qui coule lentement, ses bruits et le cocorico du coq.

La complicité entre l’écriture et la mise en scène déteint sur l’ambiance de cette Sobhieh où l’on s’invite avec grand plaisir. Même le casting a été fait à deux et l’osmose opère. D’une part, les rôles de composition de Maguy Badaoui et Josyane Boulos, cette dernière ayant dû prendre pendant un mois des cours auprès du coach Joseph Kassaf, qui lui a appris les termes usuels du vocabulaire villageois. Quant à l’attitude, elle s’est certainement inspirée de personnes vivantes afin de parfaire son personnage. D’autre part, la jeune Yara Zakhour séduit avec son langage corporel et sa voix délicate. Malgré ses habitudes de citadine, elle parvient à séduire à nouveau son amour d’enfance Hadi Bou Ayash, comédien découvert dans le film Listen, de Philippe Aractingi. Qui ne cache pas un secret de famille ? Qui n’a pas vécu à nouveau une histoire d’amour à l’adolescence interrompue par la suite ? Qui n’a pas eu envie un jour de jeter l’éponge et de pardonner ? Cette Sobhieh-là fait ouvrir les yeux et donne à réfléchir. Car au final, la solution vient toujours de la jeunesse. C’est elle qui va de l’avant et qui parvient à effacer les fautes du passé. C’est cette même jeunesse qui, par ses outils à elle, l’amour et par conséquent le pardon, permet tout dépassement de soi vers un futur moins pesant. Le Liban a bien besoin de cette Sobhieh qui annonce le printemps.

Théâtre Monnot

« Sobhieh », jusqu’au 1er mars, du jeudi au dimanche, à 20h30. Séances en matinée les dimanches 16 et 23 février à 12h avec brunch servi au profit d’al-Majal. En arabe, avec surtitrage en français les samedis et les deux matinées du dimanche.


Pour mémoire

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