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Liban - Prisons

La torture reste un « outil d’investigation » fréquent au Liban

Un rapport publié par le Centre libanais des droits humains pointe des pratiques « qui ne régressent pas ».

Des détenus photographiés dans la prison du Palais de justice de Beyrouth. Photo Hassan Assal

Le Centre libanais des droits humains (CLDH) a rendu public, hier, un rapport sur la torture dans les prisons libanaises, deux ans après le vote de la loi 65 du 26/10/2017, qui renforce les peines et les modalités de poursuite des crimes de torture. Il en ressort que le recours à la torture lors des interrogatoires n’a malheureusement pas régressé depuis l’adoption de la loi. Le CLDH dénonce par ailleurs le fait que la torture soit devenue un « outil d’investigation » comme un autre et se pratique de manière presque systématique.

Le rapport, qui fait une centaine de pages, se base sur une enquête menée en début d’année auprès de 92 personnes incarcérées au Liban (55 hommes et 37 femmes), toutes nationalités confondues. « Nous émettons des rapports tous les deux ou trois ans, afin de suivre l’évolution de la situation. Malheureusement, non seulement la pratique de la torture n’a pas régressé depuis l’adoption de la loi 65, elle a même augmenté », a déclaré Wadih Asmar, président du CLDH, lors d’un entretien avec L’Orient-Le Jour. Le document a été diffusé hier lors d’une conférence du CLDH à l’hôtel Radisson, à Beyrouth, en présence d’avocats, de militants de la société civile et de proches de personnes ayant subi des tortures pendant leur incarcération.

« Nous accueillons en ce moment plus d’une centaine de victimes de torture dans notre centre de réhabilitation (centre Nassim, situé dans les locaux du CLDH à Beyrouth). Ces personnes sont de plusieurs nationalités, certaines ont été torturées au Liban, d’autres ailleurs. Nous leur offrons une assistance légale, psychologique, socio-médicale, ainsi qu’une aide à l’insertion professionnelle », a souligné M. Asmar.Le directeur du CLDH déplore par ailleurs le fait que la Commission nationale de prévention contre la torture, instituée en mai 2018, ne soit pas encore en mesure d’exercer ses fonctions, malgré la prestation de serment de ses membres. « Les membres ont été désignés, ils sont en train de se réunir de façon non officielle, mais ils n’ont toujours pas de bureau ni même de budget, ce qui veut dire qu’ils ne peuvent pas vraiment travailler », a-t-il indiqué.


(Lire aussi : Il ne faut abolir ni la Commission des droits de l’homme ni celle de la sécurité routière, plaident le Futur et le CPL)



Torture « systématique » ?

« Tout au long de la rédaction du rapport, nous nous sommes demandé si la torture était pratiquée dans certains cas ou si elle était systématique. Il semble qu’elle soit utilisée comme un outil d’interrogatoire et d’enquête », a indiqué M. Asmar lors de la conférence.

« Quand on parle de torture, on ne parle pas simplement de prisons bondées ou d’une gifle par-ci ou par-là… On parle de techniques de torture telles que le “balanco” (qui consiste à attacher le prisonnier par les poignets), de la torture par chocs électriques, des techniques dites du “poulet” ou de la “chaise allemande”, des simulations de noyade, de viols ou de menaces de viol », a révélé le président du CLDH qui ajoute : « 85 % des détenus disent avoir été torturés pour confesser quelque chose, ou pour dénoncer quelqu’un. »

Selon M. Asmar, la torture se pratique dans les centres de détention, quelle que soit la nature de l’infraction commise. « Il peut s’agir de détenus pour des affaires de drogue, de meurtre, de vol, de prostitution, de fraude, de contrebande… sans parler des détenus pour des affaires sécuritaires. Certaines personnes qui pratiquent la torture (dans les prisons) ne considèrent pas qu’elles font quelque chose de mal. Certains torturent des toxicomanes par exemple en pensant les aider à arrêter la drogue », a-t-il indiqué.


(Lire aussi : A-t-on vraiment voulu supprimer la Commission des droits de l’homme ?)



Dans une série de recommandations émises dans son rapport, le CLDH appelle à une refonte de la loi 65, de manière à mieux définir la torture. Il demande également la fermeture des centres de détention affiliés au ministère de la Défense, ainsi que la prison située dans le secteur du Palais de justice (dans un parking sous le pont Élias Hraoui).

Le texte appelle par ailleurs à la limitation des prérogatives du tribunal militaire, devant lequel de simples civils sont traduits ces dernières années. Le texte demande en outre la modification de l’article 401 du code criminel, « afin de criminaliser toute forme de torture et de mauvais traitements, dont la torture psychologique, en fonction de la sévérité du crime. La torture est punie de 3 ans de prison à l’heure actuelle ». Au ministère de la Justice, le CLDH demande dans son rapport des investigations systématiques lorsque des cas de torture sont révélés, ainsi que la suppression des investigations préliminaires durant lesquelles de nombreux cas de torture ont été rapportés.

La juge Angela Dagher, qui représentait le ministère de la Justice lors de la conférence, a pour sa part révélé que le ministère était en voie de mettre en œuvre une « mesure positive » qui consiste à lancer un programme d’assistance légale pour les détenus qui n’ont pas les moyens d’avoir un avocat, ainsi qu’aux personnes considérées comme vulnérables et ayant besoin d’une aide légale.


Pour mémoire

Vers un mécanisme national de prévention contre la torture

Raya el-Hassan chez Raï : « Aucune communauté n’est visée » par les FSI

Le Centre libanais des droits humains (CLDH) a rendu public, hier, un rapport sur la torture dans les prisons libanaises, deux ans après le vote de la loi 65 du 26/10/2017, qui renforce les peines et les modalités de poursuite des crimes de torture. Il en ressort que le recours à la torture lors des interrogatoires n’a malheureusement pas régressé depuis l’adoption de la loi. Le CLDH...

commentaires (4)

Pour ne pas torturer les suspects chez soi, les usa les envoyaient en egypte ou dans les pays arabes qui la pratiquaient pour la PRATIQUER eux-mêmes avec leurs propres agents. Transfert de barbarie.

FRIK-A-FRAK

12 h 41, le 12 octobre 2019

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Commentaires (4)

  • Pour ne pas torturer les suspects chez soi, les usa les envoyaient en egypte ou dans les pays arabes qui la pratiquaient pour la PRATIQUER eux-mêmes avec leurs propres agents. Transfert de barbarie.

    FRIK-A-FRAK

    12 h 41, le 12 octobre 2019

  • La loi doit etre respectée. Pour ca l'état doit publiquement infliger des sanctions lourdes contre les fonctionnaires de l'état qui outrepassent la loi et torturent des citoyens malgré l'interdiction.

    Sarkis Serge Tateossian

    12 h 01, le 12 octobre 2019

  • La torture est pratiquée par des salariés de l'Etat. Par conséquent, il suffit que le Gouvernement décide, sous peine de congédier les agents fautifs de leurs emplois, d'arrêter la torture avec effet immédiat. Le comble est que l'Etat paye les tortionnaires et il va payer aussi pour la prévention de la torture. Allez comprendre ce "foutage de gueule", moi je n'ai rien compris. Je me demande si les politiques, les universitaires, les journalistes, les intellectuels, les juges, les avocats, les lecteurs de l'OLJ et la rue libanaise ne seraient tout simplement pas favorable à ce que la torture continue, et que l'affaire de la prévention ne soit pas l'alibi, pour plaire aux défenseurs des droits de l'Homme.

    Shou fi

    10 h 00, le 12 octobre 2019

  • TOUT COMME LES PAYS ARRIERES DU TIERS MONDE AUXQUELS LE LIBAN APPARTIENT MALHEUREUSEMENT AUJOURD,HUI.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 11, le 12 octobre 2019

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