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Portraits de collectionneurs

Basel Dalloul, un gardien de la mémoire du monde arabe

Créée en décembre 2016 par leur fils Basel, la Fondation d’art Ramzi et Saeda Dalloul est une initiative qui contribue à élargir le paysage culturel arabe. Rencontre et explications.

Basel Dalloul. Photo Anne Ilcinkas

Cinquante-six ans, l’allure sportive, avenant, la bouille sympathique, hypercultivé avec une énergie inépuisable. Basel Dalloul s’entretient en polyglotte averti et en toute clarté de la collection privée d’art arabe moderne et contemporain qu’il dirige.

Une enfance et un âge adulte passés aux États-Unis, entre Washington D.C. et New York. Voyageur infatigable, élève de l’International College, Basel Dalloul, témoin de l’âge d’or de Beyrouth et de sa chute dans le chaos entre 1970 et 1975, ignore le sectarisme des communautés et les barrières religieuses. Il a cette formule merveilleuse et d’une admirable tolérance que sa mère Saeda (sociologue, anthropologue et historienne de l’art) répétait : « Nous sommes tous les fils de Dieu. ». Et il la dit et la répète lui-même aujourd’hui en toute simplicité et avec un sourire désarmant.

Docteur en droit de Georgetown University et haut diplômé en technologie de pointe pour avoir installé le système Noor pour internet en Égypte, Basel Dalloul n’en a pas moins la fièvre des collections, aussi bien des toiles que des sculptures, des quatre coins non seulement du Liban, mais aussi de tout le monde arabe. Et sa passion pour dénicher les perles rares aussi bien en peinture qu’en sculpture s’étend aux horizons lointains, du Yémen au Maroc, en passant par l’Irak et le Soudan. Et on n’a pas tout dit.

L’art et ses arcanes sont dans son ADN. Et ce n’est pas là une figure de style ! Car tout remonte, réellement et essentiellement, au temps où ses parents ont jeté les bases de cette monumentale collection qui se chiffre à plus de 4 200 œuvres d’art réparties aujourd’hui sur une superficie de plus de 3 000 mètres carrés dans trois appartements dans un même immeuble tours jumelles (White Towers) sis à Koraytem, comme nichés sur les hauteurs face à la mer.

Au fronton de cet espace, somptueux écrin voué exclusivement à l’art, l’enseigne suivante : « Ramzi & Saeda Dalloul Art Foundation », dont Basel est actuellement le président. Avec sept personnes pour la gestion de ce fabuleux patrimoine amassé au fil des années, c’est-à-dire il y a plus de cinquante ans déjà grâce aux recherches et sélections de son père Ramzi Dalloul.

La Fondation Dalloul produit un travail d’archivage, de numérisation et de documentation afin de créer une plateforme de recherche, et de contribuer à diffuser l’art arabe à un public local et international. Sa mission est de préserver, explorer, exposer et promouvoir l’art arabe moderne et contemporain.

C’est en écoutant sa mère raconter l’histoire des tableaux, comme un fascinant conte magique, que Basel s’est pris d’amour pour les œuvres d’art et a commencé sa propre collection dès l’âge de seize ans. Et de souligner avec un petit rire amusé : « Je suis un geek… J’ai aussi ma propre collection indépendante, plus de 700 toiles dans ma maison à Washington. Une collection tout à fait différente car il s’agit de ‘’pop art’’, ‘’street art’’, art naïf, et les Latinos-Américains, dont des Mexicains. Mais tout cela, c’est une autre histoire… »

Pour en revenir à ces trésors qui tapissent les murs des espaces beyrouthins, encadrés, sériés, classés, mis en valeur, comment faire la nomenclature de tous ces artistes, ce cortège impressionnant comme une légion aux rangs infinis ? Nommer l’un et s’abstenir d’en nommer un autre, c’est déjà une irréparable injustice.

Alors, juste quelques icônes phosphorescentes que le public reconnaît d’emblée comme des stars des cimaises et des galeries. Du pays du Cèdre, la palette regroupe, entre autres, dans des dimensions allant du méga au micro : Ayman et Oussama Baalbacki, Paul Guiragossian, Mohammad el-Rawass, Huguette Caland, Aref Rayess, Chafic Abboud, Bibi Zogbi, Farid Awad, Amine el-Bacha, Nabil Nahas, Helen Khal, Hanibal Srouji, Etel Adnan, Akram Zaatari, Walid Raad… Hors frontières, on égrène le chapelet avec : Abdul Rahman Katanani, Samia Halabi et Hani Zurob (Palestine), Youssef Abdelki, Nizar Sabour et Ahmad Moualla (Syrie), Anna Boghiguian et Adam Henein (Égypte), Baya Mahieddine et Rachid Koraichi (Algérie), Dia Azzawi, Hanaa Malallah, Mahmoud Obaïdi et Serwan Baran (Irak), Thameur Mejri, Rafik el-Kamel, Nja Mahdaoui (Tunisie), Mahi Binebine et Mohammed Melehi (Maroc) et, d’Arabie saoudite, Ahmed Mater…

Une ronde étourdissante loin de dire son dernier mot ou donner sa couleur profonde. Un vrai musée aux mille facettes, éloquent témoin du Liban et du monde arabe dans ses multiples paysages, ses innombrables lumières, ses populations sédentaires ou migrantes, ses cités mouvantes, ses cris, ses poussières, son intimité voilée ou dévoilée, ses violences, ses douceurs, son accueil vivant et chaleureux. Un monde grouillant d’images, véritable reflet amplificateur des horizons des pays de soleil.

Cinquante-six ans, l’allure sportive, avenant, la bouille sympathique, hypercultivé avec une énergie inépuisable. Basel Dalloul s’entretient en polyglotte averti et en toute clarté de la collection privée d’art arabe moderne et contemporain qu’il dirige. Une enfance et un âge adulte passés aux États-Unis, entre Washington D.C. et New York. Voyageur infatigable, élève de...

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