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Lifestyle - Un peu plus

Ce peuple qu’on a rendu fou

Jack Nicholson dans « The Shining » de Stanley Kubrick.

La meilleure façon de définir le Liban à des étrangers, c’est de leur expliquer que chez nous, c’est celui qui vient en sens interdit qui insulte l’autre. Voilà le meilleur résumé de ce qu’est devenu notre pays. Un pays où l’on se fout des lois. Où l’on se fout des autres.

Il n’y a pas si longtemps, on sentait une certaine névrose chez le peuple libanais. Névrosés du volant, névrosés au travail, névrosés tout court. Névrose : affection caractérisée par des troubles affectifs et émotionnels sans cause anatomique, et intimement liée à la vie psychique du sujet. Jusque-là, on savait que nous avions, pour la plupart d’entre nous, pété un plomb. Sauf qu’avec la régression de l’État, l’absence de contrôle, la quasi-disparition des sanctions et la disparition de ce qui restait de contenance extérieure, les Libanais ont fini par agir comme des psychotiques. Ils font ce qu’ils veulent, exactement comme dans la psychose. Ils ont perdu contact avec la réalité. Ils ne réalisent même plus qu’ils commettent des exactions. Et pour couronner le tout, le Parlement a voté une loi pour la régularisation des infractions immobilières enregistrées entre le 13 septembre 1971 et l’année 2018. Bravo.

La psychose, c’est l’absence de lois. Quand la loi dépénalise le crime – expropriation, constructions illégales, occupation du bord de mer – et ceux qui ont commis des exactions, on dit aux Libanais : « Faites ce que vous voulez. » Et ils le font. Avant, on commettait des escroqueries mais avec la peur d’être punis. Aujourd’hui, les gens commettent des crimes sans réaliser qu’ils le font. Je viens en sens interdit et je t’insulte en te demandant de reculer ou de te pousser. Je le fais devant un policier plus occupé à zyeuter une jolie blonde en lui demandant ses papiers qu’à coller une amende au chauffard qui arrive en trombe, sur sa mobylette, sans casque, avec trois gamins assis sur le siège et parlant au téléphone bien évidemment. Je conduis sur les routes comme si l’autre n’existait pas. J’accélère quand je vois un passant traverser la route que j’emprunte. Je me gare devant l’entrée d’un parking privé et je me permets de rabrouer la personne qui veut y entrer. Je me crois tout permis. Felten l’balad.

Chacun fait ce qui lui plaît. Et advienne que pourra. Je fais une Fake Id à mon gamin qui trouve normal de rentrer à pas d’heure. J’engueule les profs quand il a une mauvaise note. Je l’aide à tricher aux examens. Je soudoie le directeur en lui offrant des cadeaux pour que ledit petit ait des privilèges au sein de l’école.

Je confisque le passeport de mon employée de maison, je ne lui paye pas l’intégralité de son salaire, je la bats quand elle n’a pas bien accompli les tâches ménagères et je la renvoie chez elle sans un sou parce que j’en ai eu envie. Je tabasse ma femme à mort et je ne me fais pas inculper parce que j’ai une wassta auprès d’un homme politique. J’abats quelqu’un dans la rue et je ne me retrouve pas à Roumieh. Par contre j’y passe trois ans si on me chope avec un pétard.

Je promène mon chien en le laissant déféquer partout. J’occupe le trottoir public en y plaçant des chaises, des poteaux, des pancartes. Je m’octroie une place pour ma voiture devant mon immeuble. Je ne paye pas mes factures d’électricité parce que j’ai trafiqué mon compteur. Je n’enregistre pas mes locataires à la municipalité pour ne pas payer de taxes. Et je les vire quand bon me semble. Je fais des travaux à 6 heures du matin le dimanche et rien ni personne ne m’en empêchera.

Les Libanais ont perdu tout sens de la réalité. Ils vivent dans un La La Land anarchique à côté duquel une république bananière fait office de petite joueuse. Mais ce n’est pas leur faute.

Comment respecter les lois quand ceux qui sont censés donner l’exemple les bafouent jour après jour ? Et surtout, comment va-t-on faire pour revenir à l’ordre ? Pour (re)devenir le pays du miel et de l’encens.

La meilleure façon de définir le Liban à des étrangers, c’est de leur expliquer que chez nous, c’est celui qui vient en sens interdit qui insulte l’autre. Voilà le meilleur résumé de ce qu’est devenu notre pays. Un pays où l’on se fout des lois. Où l’on se fout des autres.Il n’y a pas si longtemps, on sentait une certaine névrose chez le peuple libanais. Névrosés du...

commentaires (9)

CAR C,EST PAR SES ACTES ET SES ACHEVEMENTS POUR LA PATRIE QU,ON MERITERAIT LE QUALIFICATIF DE LIBANAIS TOUT SIMPLE ET TOUT PUR.

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 04, le 29 juin 2019

Tous les commentaires

Commentaires (9)

  • CAR C,EST PAR SES ACTES ET SES ACHEVEMENTS POUR LA PATRIE QU,ON MERITERAIT LE QUALIFICATIF DE LIBANAIS TOUT SIMPLE ET TOUT PUR.

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 04, le 29 juin 2019

  • CE PEUPLE QUI SE CREVE LES YEUX AVEC SES PROPRES DOIGTS. PERSONNE NE LUI EXPORTE SES CRISES ET SES GUERRES, IL LES IMPORTE LUI-MEME AU PAYS... IL Y A DES LIBANAIS IRANIENS, IL Y A DES LIBANAIS SAOUDIENS, IL Y A DES LIBANAIS SYRIENS, YEMENITES, FRANCAIS, AMERICAINS, RUSSES, ETC...ETC... MEME ZIMBABWEENS ET ATOLLIENS... IL N,Y A PAS DE LIBANAIS LIBANAIS MALHEUREUSEMENT... DE LA TETE A LA BASE !!! HAYDA LEBNEN.

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 14, le 29 juin 2019

  • La loi pour la régularisation des infractions immobilières entre le 13/9/1971 et 2018 est un crime contre l'humanité. Je sais de quoi je parle, jadis je marchais sur le sable, les galets, les rochers le long du rivage entre Nahr-el-Kalb et Maameltein sans aucun obstacle, pour ne parler que de ce tronçon du littoral kesrouanais. Où en sommes-nous aujourd'hui ? Chère Médéa Azouri, je vous prie d'adresser aujourd'hui votre chronique à Valérie Pécresse, présidente de la Région Île-de-France, qui se trouve à Beyrouth pour constater les résultats nuls de son aide à la Ville de Beyrouth al-moumtazat.

    Un Libanais

    13 h 00, le 29 juin 2019

  • Et pourquoi ce ne serait pas de leur faute?

    M.E

    08 h 13, le 29 juin 2019

  • ""Et surtout, comment va-t-on faire pour revenir à l’ordre ? Pour (re)devenir le pays du miel et de l’encens."" Pour revenir à l’ordre, oui c’est cela. Pour revenir en ordre. En bonne et due forme, en uniforme ! On est déjà le pays du miel, mais pour l’encens, regarder le smog sur la capitale, et l’odeur de cet encens. Il n’est pas interdit de rêver… C.F.

    L'ARCHIPEL LIBANAIS

    07 h 50, le 29 juin 2019

  • ""Les Libanais ont perdu tout sens de la réalité. Ils vivent dans un La La Land anarchique à côté duquel une république bananière fait office de petite joueuse. Mais ce n’est pas leur faute."" Et c'est la faute à qui ? Je vous le demande. C.F.

    L'ARCHIPEL LIBANAIS

    07 h 43, le 29 juin 2019

  • je vous cite : ""J’abats quelqu’un dans la rue et je ne me retrouve pas à Roumieh. Par contre j’y passe trois ans si on me chope avec un pétard."" C’est fort ce matin, et ça me rend de bonne humeur. Même si je me retrouve à Roumieh, et à ma sortie, je ferai de la politique pour me réhabiliter. Passage obligé pour se ""reconstruire"" … La morale, c'est pour les autres ! C. F.

    L'ARCHIPEL LIBANAIS

    07 h 41, le 29 juin 2019

  • Erreur sur le titre : ""Ce peuple qu’on a rendu fou"" Plutôt Ce peuple qui s’est rendu fou. ON est responsable de ce qui nous arrive, et de ce qui nous est arrivé… le ON c’est pour rejeter la responsabilité à qui ? C.F.

    L'ARCHIPEL LIBANAIS

    07 h 37, le 29 juin 2019

  • Hep , pssit ,Medea, le Liban etait le pays de miel et de lait.....

    Marie-Hélène

    01 h 08, le 29 juin 2019

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