Dans l’objectif imaginaire de Britta Rafie

Britta Depping Rafie, d’origine canadienne, est installée à Beyrouth depuis 20 ans avec sa famille. Avant de se lancer pleinement dans la peinture, elle a passé des diplômes en architecture d’intérieur, en langue ainsi qu’en littérature. Créatrice, décoratrice, gérante d’une entreprise de fabrication de meubles et d’importation de tissus, son expérience variée contribue sans aucun doute à la créativité et la singularité qui la caractérisent. C’est à la galerie Aïda Cherfan qu’elle présente « It’s All About You », sa première exposition individuelle.

« Vous êtes au cœur de l’action »
L’exposition de Britta Depping Rafie repose sur un concept bien particulier : le sujet ne se trouve pas dans le tableau, mais dans son observateur. « Le message, ici, c’est qu’on ne soit pas passif à regarder quelque chose... » La plupart des tableaux représentent des paparazzis, comme s’ils attendaient avec excitation les visiteurs de la galerie. Flashes, objectifs, regards sont braqués sur quiconque admire les toiles de l’artiste. L’expérience commence dès l’entrée de la galerie où l’on tombe nez à nez avec le tableau Guest of Honor, où l’on peut voir des personnes faisant la fête et semblant attendre le dernier convive. Un personnage lève son verre à sa venue, une femme le reconnaît… Le convive, c’est tout individu venant admirer le travail de Britta Rafie. « Le sujet n’est pas le tableau, c’est le spectateur. » Une réflexion originale et un drôle de contraste avec l’artiste qui, discrète et timide, fuit les objectifs des caméras.

La touche personnelle de Britta Rafie se trouve également dans l’utilisation du noir et blanc à outrance. En dehors de son aspect chic, l’artiste voit ces deux couleurs comme le moyen le plus approprié de transmettre des messages et ressentis. « S’il y avait des touches de couleur, des choses à droite, à gauche, on serait distrait, on serait attiré par autre chose que la foule qui s’intéresse à l’observateur. » Encore une fois, le centre d’attention n’est pas à trouver dans le tableau. D’autre part, les mots d’ordre de l’artiste restent avant tout l’innovation et la recherche de l’expérience. Elle réalise d’abord un véritable travail sur la matière, en utilisant par exemple de l’acrylique pour sculpter des objets en relief placés sur ses tableaux. « J’ai compris par accident que je pouvais peindre et expérimenter ce que je voulais. C’est la technique que j’emploie qui va déterminer le thème de mes tableaux. » Ainsi, certaines œuvres s’éloignent du thème de la décentralisation du sujet et vont plutôt chercher de nouvelles sensations, à travers le remaniement de la peinture, l’exploitation de la profondeur, du relief, etc. Un travail finalement varié dans sa globalité et qui reste dans la veine de l’artiste : « Il faut s’attendre à n’importe quoi avec moi. »

Galerie Aïda Cherfan

Saïfi, centre-ville de Beyrouth. Jusqu’au 4 juillet.