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Liban - Droits de l’homme

Affaire Hassan el-Diqqa : l’ONU épingle le Liban

Pour la haut-commissaire aux Droits de l’homme, le décès du détenu met en lumière des « manquements importants au sein des systèmes judiciaire et carcéral libanais ».

Mireille Bachelet, haut-commissaire de l’ONU pour les Droits de l’homme. Fabrice Coffrini/Photo d’archives AFP

Le décès, samedi dernier, de Hassan el-Diqqa, dédouaneur de 43 ans détenu depuis plusieurs mois à la prison de Roumieh pour une affaire de narcotrafic, et les « violences et tortures » qui lui auraient été infligées lors d’un interrogatoire par les SR des Forces de sécurité intérieure continuaient hier de susciter l’indignation des défenseurs des droits de l’homme, à l’échelle nationale et internationale, qui appellent à une enquête « indépendante » et « transparente ».

Les circonstances du décès de Hassan el-Diqqa ne sont pas encore claires. Les FSI et la procureure près la cour d’appel du Mont-Liban Ghada Aoun sont dans le collimateur du père du défunt, Toufic, qui affirme que son fils est décédé des suites des complications dues à la torture qu’il avait subie lors de l’interrogatoire. De plus, il accuse la magistrate Aoun d’avoir refusé à son fils un traitement médical, alors que sa santé se détériorait. Hassan el-Diqqa, paralysé à la jambe et souffrant de maux de dos insupportables, a finalement été hospitalisé quelques jours avant son décès. Les FSI démentent les accusations qui leur sont adressées. De son côté, la ministre de l’Intérieure, Raya el-Hassan, a réclamé dimanche l’ouverture d’une enquête.

Hier, la Commission nationale des droits de l’homme a tenu une conférence de presse consacrée à cette affaire. Ali Youssef, membre de la commission, a estimé qu’une « enquête pénale et disciplinaire » est nécessaire pour tirer au clair les allégations de la famille de Hassan el-Diqqa concernant la torture dont il aurait été victime. Seule « une enquête transparente et rapide permet de tirer au clair l’affaire et de garantir que les infractions aux lois en vigueur ne se répètent pas », a-t-il déclaré.

À l’échelle nationale également, Georges Okais, député des FL, a qualifié le décès de Hassan el-Diqqa de « scandale humanitaire » qui nécessite que « les responsables, qu’ils soient des juges ou des officiers des FSI, soient sanctionnés ». Dans une conférence de presse tenue au Parlement, il a fait remarquer que le Liban officiel enfreint les dispositions des accords et protocoles internationaux pour la lutte contre la torture qu’il a ratifiés, ainsi que celles des lois relatives à la création de la Commission nationale des droits de l’homme.

« Manquements importants »

À l’échelle internationale, la haut-commissaire de l’ONU pour les Droits de l’homme, Michelle Bachelet, a réclamé hier l’ouverture d’une enquête « exhaustive, efficace et indépendante » sur la mort de Hassan el-Diqqa, « survenue en dépit de nombreuses interventions de diverses entités de l’ONU, y compris le Bureau pour les droits de l’homme ». Dans un communiqué publié par son bureau de presse, Mme Bachelet indique qu’outre les interventions des bureaux en charge des droits de l’homme à Beyrouth et Genève, trois experts indépendants ont adressé une lettre au gouvernement libanais le 25 janvier, dans laquelle ils exprimaient « leur grande inquiétude concernant la détention arbitraire présumée et les accusations de mauvais traitements subis par M. Diqqa depuis son arrestation ». Ces enquêteurs affirmaient qu’après son arrestation, le 3 novembre 2018 par les FSI, l’homme a été maintenu au secret et frappé, notamment sur ses parties génitales, électrocuté, forcé à la nudité et ensuite contraint de signer une confession.

Dans le communiqué, Mme Bachelet rappelle que fin novembre, une plainte a été déposée devant le parquet pour arrestation arbitraire, torture et mauvais traitements, sans qu’aucune enquête ne soit menée, jusqu’à ce que la plainte soit retirée (supposément, sous la pression des autorités), en mars 2019. Le texte ajoute qu’une deuxième plainte avait été déposée en décembre 2018, sans aucun suivi.

Pour Mme Bachelet, le décès de Hassan el-Diqqa « met en lumière un certain nombre de manquements importants au sein des systèmes judiciaire et carcéral libanais ». Elle reproche aux responsables libanais d’avoir « ignoré les lois du pays », en n’enquêtant pas sur les accusations de torture, « rapports de médecins légistes à l’appui », et en refusant de procurer des soins médicaux au détenu. Les procédures judiciaires « semblent avoir été méprisées » depuis son arrestation jusqu’à son décès. Dans ce contexte, Mme Bachelet appelle à « une enquête indépendante, rapide et crédible sur cette affaire, afin d’assurer que de telles situations ne se reproduisent plus au Liban ». Elle appelle également à demander des comptes à quiconque responsable de ce crime.

Mme Bachelet invite enfin les autorités libanaises à allouer un budget prévu pour le financement de la Commission nationale libanaise pour les droits de l’homme, dont dépend le mécanisme de prévention de la torture, qui « pourrait faire une différence significative dans la mise en œuvre de la Convention contre la torture, notamment dans les lieux de détention ».

Le décès, samedi dernier, de Hassan el-Diqqa, dédouaneur de 43 ans détenu depuis plusieurs mois à la prison de Roumieh pour une affaire de narcotrafic, et les « violences et tortures » qui lui auraient été infligées lors d’un interrogatoire par les SR des Forces de sécurité intérieure continuaient hier de susciter l’indignation des défenseurs des droits de l’homme,...

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