Rechercher
Rechercher

Liban - Harcèlement sexuel

Mouvement de solidarité en ligne après une tentative de viol révélée par une jeune Libanaise

Une fois n’es pas coutume : une jeune Libanaise a exposé une tentative de viol dont elle affirme avoir été victime sur son lieu de travail. Photo Bigstock

Alors que le monde entier fêtait hier la Journée internationale de la femme, l’histoire d’une jeune Libanaise victime d’une tentative de viol sur son ancien lieu de travail à Beyrouth a ébranlé les réseaux sociaux et donné lieu à un véritable mouvement de solidarité en ligne. Dayna Ayache a choisi de briser le silence avant-hier en publiant son histoire sur Facebook, bénéficiant d’une vague de soutien de la part des internautes, dont certains ont même appelé à boycotter le pub Radio Beirut, situé dans le secteur de Mar Mikhaël où l’agression a eu lieu, affirme la jeune femme.

Les faits se seraient déroulés le 6 février dernier, lors d’une soirée animée par la jeune femme. Dayna raconte sur son compte Facebook qu’un des musiciens présents dans le pub a tenté de la forcer à un acte sexuel. Peu de temps après l’incident, la jeune femme a présenté sa démission et raconté l’incident au propriétaire des lieux en lui demandant de ne pas faire appel à ce musicien lors de ses derniers jours de présence au pub. Sauf que le propriétaire aurait à nouveau engagé l’homme incriminé, forçant ainsi Dayna à continuer de travailler avec lui.

Dans une longue publication sur Facebook avant-hier, Dayna explique avoir décidé de parler après avoir appris que le propriétaire du restaurant comptait organiser un événement pour la Journée internationale de la femme, alors qu’il avait minimisé l’agression qu’elle avait subie dans son établissement. Elle a en outre accusé son ancien employeur d’avoir minoré l’impact de l’agression et de l’avoir accusée « d’ultraféminisme ».

Après l’indignation sur le net et les nombreux appels au boycott de Radio Beirut, l’établissement a d’abord publié, avant de l’effacer quelques heures plus tard, un message plutôt détaché sur sa page Facebook dans lequel il a nié que cette agression se soit passée, allant même jusqu’à parler de diffamation. Radio Beirut a ensuite publié un nouveau message dans lequel il présente ses plates excuses à Dayna, tout en admettant avoir géré la situation « de manière candide ». L’établissement promet de lutter contre le harcèlement sexuel en adoptant un code de conduite respectueux envers les femmes et d’accueillir des activistes qui travaillent sur l’équité entre les genres. Contacté par L’Orient-Le Jour, le propriétaire de Radio Beirut a refusé de faire plus de commentaires et s’est contenté d’indiquer que l’agresseur de Dayna ne jouera plus dans son établissement.


(Pour mémoire : Kafa se mobilise contre les violences visant les femmes)



Une situation « compliquée »

Si la jeune femme n’a pas porté plainte, c’est sans doute en raison du risque de ne pas pouvoir prouver qu’elle a été agressée, les indices physiques du viol n’étant pas réunies dans son cas. Contacté par L’Orient-Le Jour, l’ancien député Ghassan Moukheiber confirme qu’une telle situation est « compliquée s’il n’y a pas de preuves de faits intimes ». « La tentative de viol est un délit. Mais la preuve est difficile à apporter dans ce cas, et la plaignante peut se retrouver poursuivie pour diffamation », dit-il.

Lina Abou Habib, directrice exécutive à Beyrouth du réseau féministe international Women’s Learning Partnership, a pour sa part salué le courage de Dayna dans une société où peu de personnes osent parler d’une agression sexuelle subie. « Ce que cette jeune femme a fait est remarquable. Elle a parlé pour toutes les femmes qui ne parlent pas, elle a fait preuve de beaucoup de courage, a lancé Mme Abou Habib. Les employeurs se doivent de garantir un espace de travail sécurisé pour les femmes », a-t-elle ajouté.

Pour la psychanalyste Marie-Thérèse Kheir-Badaoui, la dénonciation publique faite par Dayna est une preuve que « les langues commencent à se délier au Liban ». « La dénonciation est plus facile aujourd’hui, notamment après le mouvement MeToo, mais on a peur des extrêmes. Il y a eu beaucoup de cas de prétendus harcèlements dans le cadre de la mouvance MeToo. Cela est dû au risque d’identification hystérique, mais en même temps, on ne peut pas nier le fait que le harcèlement puisse être une réalité », a indiqué la psychanalyste à L’OLJ. « Au Liban, on dit que ça ne se passe pas chez nous, qu’ici on a préservé la morale et que ce genre de choses a lieu chez les autres. Notre société a du mal à se remettre en question, estime encore Mme Kheir-Badaoui. Les femmes sont en train de changer, mais les hommes ont du mal à suivre, notamment au Liban. Ils sont réfractaires au fait que les femmes exigent une égalité des droits. »


---

Nous avons reçu, le 9 mars dans l'après-midi, la mise au point suivante de Dayna Ayache:

“Suite à l’article intitulé "Mouvement de solidarité en ligne après une tentative de viol révélée par une jeune Libanaise", paru dans L’Orient-Le Jour du 9 mars 2019, j’aimerais apporter les précisions suivantes: les événements qui ont eu lieu le 6 février 2019 à Radio Beirut ne constituent en aucun cas un viol ou une tentative de viol. Ce n’était pas les termes que j’ai utilisés sur les réseaux sociaux pour décrire cet incident. Les événements décrits s’apparentent au harcèlement sexuel et à une violation de l’espace personnel et privé sans consentement ; j’avais demandé directement d’y mettre un terme.”


Lire aussi

Chiffrer les violences contre les femmes... pour y mettre un point final ?

Alors que le monde entier fêtait hier la Journée internationale de la femme, l’histoire d’une jeune Libanaise victime d’une tentative de viol sur son ancien lieu de travail à Beyrouth a ébranlé les réseaux sociaux et donné lieu à un véritable mouvement de solidarité en ligne. Dayna Ayache a choisi de briser le silence avant-hier en publiant son histoire sur Facebook, bénéficiant...

commentaires (2)

"les événements qui ont eu lieu le 6 février 2019 à Radio Beirut ne constituent en aucun cas un viol ou une tentative de viol. Ce n’était pas les termes que j’ai utilisés sur les réseaux sociaux pour décrire cet incident." Beaucoup de bruit pour rien, donc? Que veut dire "harcèlement sexuel"? Si un jeune homme dit à une fille qui porte une mini-jupe qu'elle a de belles cuisses, c'est du harcèlement?

Georges MELKI

11 h 24, le 11 mars 2019

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • "les événements qui ont eu lieu le 6 février 2019 à Radio Beirut ne constituent en aucun cas un viol ou une tentative de viol. Ce n’était pas les termes que j’ai utilisés sur les réseaux sociaux pour décrire cet incident." Beaucoup de bruit pour rien, donc? Que veut dire "harcèlement sexuel"? Si un jeune homme dit à une fille qui porte une mini-jupe qu'elle a de belles cuisses, c'est du harcèlement?

    Georges MELKI

    11 h 24, le 11 mars 2019

  • Chapeau Mme Dayna Ayache d'avoir eu le courage de tout dévoiler. Il faut que le Libanais sache que nous ne sommes pas nous les femmes un objet de plaisir. Nous avons TOUS les droits et donc celui de dire NON

    Georges Zehil Daniele

    07 h 39, le 09 mars 2019

Retour en haut