Le cheikh akl druze Naïm Hassan, reconnu par l'Etat et soutenu par le chef du PSP, Walid Joumblatt, a violemment critiqué lundi l'invitation par la présidence de la République aux séances du sommet économique arabe du cheikh druze Nasreddine el-Gharib, que l'émir Talal Arslane et le chef du parti Tawhid, l'ancien ministre Wi'am Wahhab, reconnaissent comme le leader spirituel de la communauté.
Pendant de longues années, l'élection du Conseil religieux druze et la succession du leader spirituel de cette confession, avaient provoqué des tensions entre MM. Joumblatt et Arslane, le chef du PSP refusant de reconnaître l'autorité spirituelle de Bahjat Ghaïth, qui avait été élu temporairement en 1991 après le décès de son prédécesseur. En 2006, alors qu'un nouveau cheikh akl devait être élu, Talal Arslane avait nommé le représentant spirituel de son propre clan, cheikh Nasreddine el-Gharib, malgré l'élection officielle par le conseil de cheikh Naïm Hassan, reconnu par l'Etat.
Dans un communiqué publié dans la journée, Naïm Hassan a dénoncé une "faute protocolaire" constituant une "violation des valeurs nationales et de la Constitution", mettant en cause "les tentatives de certains de saper le Pacte national qui rassemble les communautés religieuses libanaises". "Ce qui s'est produit durant le sommet économique arabe de Beyrouth, où l'invitation aux séances du sommet ne s'est pas limitée au chef religieux de la communauté, constitue une violation flagrante des valeurs nationales, de la Constitution, des lois et des coutumes, ainsi qu'une ingérence suspecte dans les affaires relatives à la communauté druze", indique ce texte, faisant porter la responsabilité de la situation au président de la République. Le ministre sortant de l'Education, Marwan Hamadé, membre du PSP, a exprimé son soutien au cheikh Akl.
La présidence de la République a répondu au communiqué du cheikh Akl. "L'invitation de quelque personnalité que ce soit, religieuse ou non, à un événement officiel, ne peut en aucune sorte être considérée comme une violation par la présidence de la République des valeurs et des conceptions nationales et, par extension, de la Constitution et des lois", indique ce texte publié par le bureau de presse de Baabda, affirmant son attachement au "respect et à la préservation de la Constitution et de l'application des lois", ainsi qu'à "l'unité des communautés libanaises et au respect de leurs représentants".
Le Tawhid a rapidement répondu au communiqué de Naïm Hassan. "La violation des coutumes et des valeurs a commencé au sein de la communauté lorsque le cheikh Naïm Hassan et ses affidés ont fait croire à une unanimité après avoir trafiqué la loi organisant les affaires de la communauté unitaire pour leur permettre de contrôler les affaires de la communauté et d'organiser des élections faussées", indique ce texte. La formation de M. Wahhab invite le cheikh Hassan à "cesser la politique d'amplification du conflit, comme s'il sentait que sa position était menacée et que la situation évoluait en sa défaveur". "Le président de la République n'accepte pas une telle situation, et c'est ce qui l'a poussé à inviter le cheikh Gharib", conclut le communiqué.
Depuis l’élection de Michel Aoun à la présidence de la République, non appuyée par le PSP, ce clivage est devenu sujet à une violente instrumentalisation politique face au leadership de Walid Joumblatt. D’un côté, Talal Arslane ayant constitué un bloc avec des députés du Courant patriotique libre élus dans le Chouf, et avec la bénédiction du chef du CPL, fait pression sur le PSP sur la question de sa représentation au sein des institutions – même si ces tensions ont dégénéré en violences à Choueifate en mai dernier.
Lire aussi
Arslane vs Joumblatt : des siècles de lutte d'influence pour le leadership druze
commentaires (10)
C'est trop triste toutes ces divisions ... C'est presque désespérant. Un sursaut des consciences est necessaire chez tous les dirigeants. Arrêtons de démolir notre propre pays, la branche sur laquelle on est assis. Pourtant ce n'est pas si compliquer à le comprendre.
Sarkis Serge Tateossian
23 h 38, le 21 janvier 2019