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Culture - Rencontre

Blu Fiefer : A girl’s gotta eat

Bientôt en concert à Beyrouth, la jeune artiste libano-mexicaine – sélectionnée par le prix L’OLJ/SGBL Génération Orient saison I – dévoile dans un premier EP au hip-hop langoureux une assurance déconcertante, construite à la sueur de son front.

Blue Fiefer : « Le seul moment où je ne travaille pas, c’est quand je suis sur scène. » Photo Mohammad Abdouni

Blu Fiefer s’exprime sans filtre, avec fierté, et son chihuahua Pancha cloisonné dans le col de son manteau. Son EP The Prelude*, est sorti le 11 janvier 2019. La musicienne de 26 ans n’a pas de temps à perdre, et sort à peine d’un rendez-vous. « Dès qu’il y a quelque chose que je ne sais pas faire, je cherche quelqu’un pour m’apprendre. Je ne délègue jamais. » Pour un premier projet qu’elle mûrit depuis quatre ans, la jeune artiste – qui faisait partie de la sélection du prix L’OLJ/SGBL Génération Orient saison I – se doit de maintenir le contrôle. Derrière une attitude à prendre ou à laisser, Fiefer signe en cinq titres d’une mélancolie sulfureuse, les premières leçons d’un parcours atypique.

Comme si sa vocation l’avait armée jusqu’aux dents, Blu Fiefer a su très tôt prendre son avenir en main. Fille de parents libanais et mexicain, elle vit successivement au Mexique, au Liban, en Jordanie et en Algérie. Bénéficiant d’une éducation ouverte, « sans pressions ni tabous quant à mon avenir, libre de m’orienter moi-même », l’adolescente est plus indépendante et déterminée que les gens de son âge. Âgée seulement de 14 ans, elle quitte école et famille et part seule suivre des études de musique à Londres. Frustrée par la formation dispensée à l’Institute of Contemporary Music Performance, tournée « vers les prestations musicales sur commande plutôt que le développement de notre propre vision », elle fait de cette déception l’inspiration des paroles de ses toutes premières chansons. Décomplexée et résolument curieuse, elle fréquente avec ses amis des strip-clubs de la capitale anglaise, où elle découvre « des femmes gracieuses, qui font avec indépendance et confiance ce que personne d’autre n’oserait faire ». Inspirée par des rencontres avec des travailleuses du sexe, Fiefer est résolue à faire fi de ce qu’elle dénote comme des hypocrisies collectives et à avancer droit vers ses objectifs. Comme elle le répète dans un des potentiels hits de son EP, au bout du compte, « a girl’s gotta eat ».


Comme une aventure
Après ses 18 ans et de longs séjours entre les côtes australiennes et californiennes, Fiefer retourne à Beyrouth avec un savoir qui n’appartient qu’à elle. « Tout ce que je sais, toutes mes références et influences, je suis allée les chercher moi-même. Mais c’était un long et douloureux voyage solitaire. Personne ne me guidait, je changeais souvent d’entourage. » Jusqu’à ce qu’elle rencontre et s’associe avec la productrice Jana Saleh en 2015, qui signe depuis les instrumentales hip-hop de la chanteuse. Le reste, que ce soit la réalisation ou le montage de ses clips, la scénographie de ses concerts ou bien la promotion de son travail, c’est elle-même qui s’en charge. « Quand on débute, c’est très difficile de mettre sa propre image dans les mains de quelqu’un d’autre. » Ancrée dans la modernité, il est clair à ses yeux que le public contemporain adhère au moins autant à l’identité de l’artiste qu’à sa production musicale elle-même. Sur les réseaux sociaux, dans ses paroles, sur scène ou au quotidien, Blu Fiefer est toujours la même, fermement résolue à l’indépendance et à l’authenticité, mais aussi à tous les efforts que cela implique. « Je travaille en permanence. Toutes mes relations, expériences, actions et décisions depuis quatre ans se sont construites sur la base de mon EP. Le seul moment où je ne travaille pas, c’est quand je suis sur scène. » Les concerts de Fiefer sont de ceux qui peuvent conquérir un public : lors de ses performances, la sensualité grave qui émane de ses chansons est appuyée et décuplée par son corps qu’elle enlace et fait tournoyer avec aise autour d’une barre de pole-dance. Autant que la jeune artiste refuse de dépendre de qui que ce soit, c’est avec puissance qu’elle donne d’elle-même à son public grandissant.

Avec la sortie de son premier projet, Blu Fiefer** clôt un premier chapitre d’une vie d’artiste qu’elle a choisi de mener comme une aventure. Indépendante dès le plus jeune âge, l’artiste aux multiples facettes et casquettes a bâti, sur le socle d’expériences aussi jeunes qu’uniques en leur genre, une personnalité forte et travaillée en tenant toujours à n’avoir besoin de personne. Outre ses rythmes entraînants, la modernité de Fiefer se dégage surtout d’une confiance débordante en elle-même, à laquelle elle doit son inspiration autant qu’un travail sans relâche. À l’âge de l’image, entre nécessité de plaire et besoin d’authenticité, la jeune artiste fait son entrée avec une œuvre profonde et accessible, aux tons séducteurs et mélancoliques.

Figure émergente d’une nouvelle génération, Blu Fiefer et sa verve se font malgré elles le visage féminin, pop et moderne d’une tendance globale à l’empowerement.

*« The Prelude », EP de cinq titres disponible depuis le 11 janvier 2019 sur toutes les plateformes digitales

(http ://itunes.apple.com/album/id1446765948 ? ls=1&app=itunes)

**Blu Fiefer sera en concert à Beyrouth à The Ballroom Blitz le 26 janvier

(Billets : http ://bit.ly/ThePreludeTickets)


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