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Nos Lecteurs ont la Parole - par Rabih NASSAR

Le syndrome du passant

Beyrouth la nuit. Illustration banset/Bigstock

Aujourd’hui, je voudrais parler du syndrome du passant. Ce syndrome qui fait que quelqu’un peut se faire casser la figure devant une poignée de passants convaincus qu’un sauveur, un samaritain plus qualifié ne tardera pas à intervenir pour sauver la situation. Et, pendant que l’infortuné se meurt, nous, observateurs bovins, vaquons à nos préoccupations mondaines et importantes dans des univers dont nous sommes les centres respectifs, même si non respectés.

Pour le lecteur qui ne l’aurait pas compris, dans cette métaphore, je parle d’une nation qui se meurt. Dans l’indifférence générale d’un peuple de quidams quelconques et inutiles. Des passants devant un Liban qui se fait violer à répétition par une bande de voleurs organisés. Tous dans l’attente de ce quelqu’un, quelque part, qui nous prêtera quelques milliards pour nous faire subsister jusqu’à la saison prochaine. Tous conscients des problèmes endémiques dont souffre la société libanaise, et pourtant, chacun de nous déléguant aux autres la responsabilité de transformer une ferme en nation. À la différence près que la plupart de nos observateurs n’attendent pas seulement le sauveur, mais se permettent également de faire remarquer, sur un ton plein de reproche, au pauvre ahuri qui voudrait tenter sa chance, que tout ce qu’il fait est faux. Parce que ce samaritain ne m’a pas l’air crédible, n’est pas de mon parti ou de ma confession.

Aujourd’hui donc je voudrais, comme beaucoup d’autres l’ont fait avant moi, inviter chacun à ne plus se demander ce que le samaritain peut faire pour le Liban, mais au contraire ce qu’il, ce que toi, lecteur ou lectrice, pourrait faire pour faire partie du changement. La tâche est énorme, certes. Mais comme un éléphant, on pourrait la manger, une bouchée à la fois. En suivant trois principes de base : l’engagement citoyen, la patience face au changement qui prend du temps, la vigilance et l’esprit critique face aux discours démagogues servis dans nos partis, nos lieux de culte et nos chaînes de télévision partisanes.

Alors, pour cette nouvelle année, refuse de rester passif face au défilé d’incompétence et de mauvaise foi. Sors de ton engagement virtuel et offre-toi un gilet jaune. Donne-toi rendez-vous dans la rue pour exprimer ton mécontentement. Refuse l’engagement de salon et engage-toi dans une citoyenneté participative. On ne sera jamais d’accord sur tout, mais on peut se mettre d’accord sur les fondations. Des administrations libano-libanaises, dirigées par des Libanais compétents, qui travaillent pour la nation, pas pour une confession. Ne sois pas rapide à la gâchette du « heyda el-balad » et du « on n’a que ce qu’on mérite », parce qu’on mérite bien plus.

Toi, lecteur, choisis ta cause et renforce-la. Des dizaines d’ONG se battent pour l’écologie, l’éducation, la corruption, l’économie, la santé. Trouve ton pied et participe. Personne ne le fera pour toi. Refuse le suivisme, refuse le statu quo et refuse de ne rien faire parce que tu n’as pas trouvé de leader à ton goût. Sois le leader que tu voudrais suivre, dans chaque instance de ta journée. Refuse de conduire comme une brute, refuse de payer un bakchich pour ne pas payer une taxe ou une amende, refuse de critiquer ceux qui essaient et essaie.

Ne désespère pas. Ne sois pas découragé parce que le changement ne se fait pas en un jour. Aucune nation digne de ce nom ne s’est faite sans l’effort permanent de ses citoyens. Lance ta propre révolution dès aujourd’hui et soutiens la révolution de l’autre. Souviens-toi qu’aucun pays n’aurait tenu le coup face aux problèmes dont souffre le Liban. Et souviens-toi, lecteur, que dans chaque pays où tu poseras le pied, on te parlera des Libanais qui réussissent. Réussis donc au Liban et souviens-toi qu’on vaut mieux que ce qu’on voudrait nous faire croire.

Souviens-toi surtout que tu n’es pas seul, refuse d’être un autre passant et participe.


Aujourd’hui, je voudrais parler du syndrome du passant. Ce syndrome qui fait que quelqu’un peut se faire casser la figure devant une poignée de passants convaincus qu’un sauveur, un samaritain plus qualifié ne tardera pas à intervenir pour sauver la situation. Et, pendant que l’infortuné se meurt, nous, observateurs bovins, vaquons à nos préoccupations mondaines et importantes dans...

commentaires (4)

Comment faire pour abolir le féodalisme, le confessionalisme et la fraude électorale qui permet à nos politiques de voler et racketer le pays ?

TrucMuche

20 h 11, le 07 janvier 2019

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Commentaires (4)

  • Comment faire pour abolir le féodalisme, le confessionalisme et la fraude électorale qui permet à nos politiques de voler et racketer le pays ?

    TrucMuche

    20 h 11, le 07 janvier 2019

  • AH SI NOS POLITICIENS POUVAIENT VOUS LIRE ET COMMENCER A AVOIR HONTE D'EUX MEME Vous avez entierement raison mais malheureusement le Libanais habitant le Liban voue a son " chef " une allegeance totale et le suit comme un agneau qui va a l'abatoire Seuls les Libanais a l'etranger comprennent cela mais malheureusement ne peuvent vraiment rien faire

    LA VERITE

    12 h 19, le 07 janvier 2019

  • Bien plaidé !

    L’azuréen

    11 h 28, le 07 janvier 2019

  • Merci Rabih pour ce chef d'oeuvre et pour nous pousser à ne pas abandonner la lutte pour un meilleur Liban. Gabriel Sara New York

    Gabriel Sara

    03 h 37, le 07 janvier 2019

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