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Liban - en toute liberté

La voix du peuple

Le président de la République et le patriarche maronite parlent parfois en énigmes. Voilà pourquoi on aimerait savoir en clair, de la bouche même du président, ce que sont ces « pratiques constitutionnelles nouvelles » dont il parle et quel camp cherche à les consacrer. Des articles dans la presse en font état, certes, mais ce que semble dire le président, c’est que ce qui se produit a été planifié. Si c’est le Hezbollah qui le fait, qu’il le dise. On a besoin de l’entendre. Car utiliser la crise de la formation du gouvernement pour infléchir le système politique peut avoir de graves conséquences. Qu’on le fasse ouvertement et sans porter préjudice aux intérêts de la population, par le biais des institutions, c’est mieux.

Du patriarche, on aimerait savoir ce qu’il veut dire exactement quand il affirme que le pays « se désagrège » sous nos yeux. Parle-t-il à la légère, comme chacun de nous le fait parfois, ou ses propos sont-ils étayés par des faits concrets ?

La communication cryptée ou semi-cryptée qui passe par-dessus nos têtes peut être parfois légitime, encore qu’on a inventé le téléphone pour cela. Mais tenir le peuple exactement informé d’une situation qui le concerne en premier peut aussi avoir du bon. Cela l’aide à devenir adulte ; cela le forme et le rassure.

Notons qu’en s’exprimant sur la mauvaise marche des institutions, l’Église maronite se place dans la situation d’un contre-pouvoir. L’État et l’Église maronite ne sont pas, dans ce cas, et à la bonne heure, du même bord. En fait, l’Église maronite, ce faisant, est en train d’exprimer ce qu’une lame de fond populaire ne parvient pas à dire ou à faire parvenir aux dirigeants.

Un essayiste français, Nicolas Tenaillon, a publié en mai dernier Dans la tête du pape François*, un ouvrage dans lequel il évoque beaucoup de choses utiles en général, mais aussi, en matières économique et politique, des choses utiles pour nous aujourd’hui.

Sur le rapport peuple-État, l’essayiste affirme que pour le pape, « l’État reste une entité abstraite, la société, elle, est concrète ». Le pape va jusqu’à parler, dans son livre Réflexions sur l’espérance, de l’importance de « partager la conscience collective d’un peuple », de savoir quels courants profonds le traversent. Les manifestations des gilets jaunes en France en sont un bon exemple. Certes, il ne va pas jusqu’à faire sien le proverbe « Vox populi, vox dei », mais il en tient compte et en tire des leçons. Car la voix du peuple peut être polyphonique ; il peut être en train de dire plusieurs choses à la fois.

On aimerait donc savoir, à ce stade, qui sont exactement les conseillers du président, pour nous assurer que la voix du peuple lui parvient clairement. Le président entend-il le dégoût et le découragement profonds qui montent de la population? Certes, celle-ci est travaillée par les médias, mais sa réaction n’est pas entièrement « construite ». La population, les jeunes en particulier, est confrontée à des défis concrets : on n’entend plus que crédit-logement suspendu, mariages reportés, expatriation, navettes épuisantes entre le Liban et le Golfe, familles partagées, angoisses pour la livre, demi-salaire.

En tout état de cause, la répression ne saurait être la seule réponse que le gouvernant oppose au gouverné. Vrai, il dispose d’une arme utile contre l’anarchie de l’action directe, mais l’action directe n’est pas toujours subversive ; elle peut être aussi signifiante, voire pédagogique. Un bon gouvernant saura toujours en profiter.

L’ouvrage de Tenaillon nous apprend, incidemment, que c’est de la prière que le pape tient ses meilleures intuitions, celle-ci étant pour lui « pas seulement un préalable, mais le milieu concret où peuvent s’effectuer les choix politiques ». On sait que le président est un homme de foi. On aime penser qu’avec sa marche matinale, il prend ce soin.

*Solin/Actes Sud

Le président de la République et le patriarche maronite parlent parfois en énigmes. Voilà pourquoi on aimerait savoir en clair, de la bouche même du président, ce que sont ces « pratiques constitutionnelles nouvelles » dont il parle et quel camp cherche à les consacrer. Des articles dans la presse en font état, certes, mais ce que semble dire le président, c’est que ce qui...

commentaires (5)

"Le Président et le Patriarche parlent en énigmes". C'est normal, leur rôle n'est pas le même que Samson et Dalila de la Bible. Le Président ne sait plus quoi faire pour se débarrasser de son Accord de Chiyah. Le Patriarche voit les résultats de l'Accord de Chiyah apparaître et qui sont le contraire de ce qu'avait arraché le Patriarche Hoyek en 1919 à Clemenceau. Adieu les énigmes.

Un Libanais

18 h 32, le 28 décembre 2018

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Commentaires (5)

  • "Le Président et le Patriarche parlent en énigmes". C'est normal, leur rôle n'est pas le même que Samson et Dalila de la Bible. Le Président ne sait plus quoi faire pour se débarrasser de son Accord de Chiyah. Le Patriarche voit les résultats de l'Accord de Chiyah apparaître et qui sont le contraire de ce qu'avait arraché le Patriarche Hoyek en 1919 à Clemenceau. Adieu les énigmes.

    Un Libanais

    18 h 32, le 28 décembre 2018

  • Ce n'est la faute de personne evidement Tous traville pour le bien du pays Il faut absolume que tous les Libanais soient representes au gouvernement meme ceux elus dans des listes completement contradictoires C EST LA FAUTE A L'IDEE QU ON SE FAIT DE NOTRE CONSTITUTION AUCUN PAYS AU MONDE NE SE GOUVERNE SANS MAJORITE ET MINORITE OU ALORS C'EST PAR UNE DICTATURE VOULOIR FAIRE PLAISIR A TOUT LE MONDE C'EST FAIRE Plaisir A PERSONNE reveillez vous DONC , vous les responsabbles ET CEUX QUI MANIGENCENT DANS L'OMBRE avant que le people ne vous chasse car vous ne meritez pas d'etre a vos postes

    LA VERITE

    14 h 50, le 28 décembre 2018

  • Parfois, il vaut mieux ne pas entendre ce que les autres sous-entendent. Parfois, mieux vaut se protéger le plus longtemps possible de la catastrophe qui se trame dans les coulisses. Car la catastrophe finira bien par se montrer tôt ou tard, et nous n'avons rien pour nous en sauvegarder, ni leader nationaliste, ni force politique digne de ce nom, ni plan B, ni parachute... nous sommes livrés à nous-mêmes, et le président est dans le même bateau que nous. Personne d'appartenance culturelle libanaise ne tient la barre, et le Liban tel que nous le connaissons et l'aimons est en train de sombrer dans la brume, de s'éloigner progressivement dans un brouillard épais.

    lila

    14 h 38, le 28 décembre 2018

  • JETER DES MOTS A EQUIVOQUE SANS CLARIFIER ET NOMMER N,EST PAS DIGNE DE CEUX QUI LE FONT ! OSEZ NOMMER ! C,EST UN DEVOIR DE LE FAIRE POUR INDIQUER LES RESPONSABLES... PRETENDUS DIVINS... DEJA BIEN CONNUS PAR LE PEUPLE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 59, le 28 décembre 2018

  • UNE CHOSE A EVITER, METTRE TOUTE LA MERDE AMBIANTE SUR LE DOS DE AOUN OU MEME DE SON GENDRE, OU SUR LE HEZB. DEJA QU'IL A UN NOMBRE INCALCULABLE DE FAUTES A SON CREDIT.

    Gaby SIOUFI

    09 h 16, le 28 décembre 2018

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