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Moyen Orient et Monde - Éclairage

« Israël revient en Afrique et l’Afrique revient en Israël »

L’État hébreu mène depuis quelques années une politique étrangère dynamique intersectorielle pour revenir sur le continent africain, alors que ces relations avaient été interrompues au lendemain de la guerre des Six-Jours en 1967 sous la pression des pays arabes.

Le président tchadien Idriss Déby, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son épouse, Sara, à la résidence du Premier ministre à Jérusalem le 25 novembre 2018. Photo AFP/Pool/Heidi Levine

« Israël revient en Afrique et l’Afrique revient en Israël. » Tel est le slogan du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu dans sa campagne pour projeter son pays sur le continent africain, qu’il n’a pas omis de répéter en recevant le président Idriss Déby, pour la première visite d’un chef d’État tchadien en Israël, après plus de quatre décennies de rupture des relations diplomatiques.La visite de M. Déby est historique au niveau de la politique officielle tchadienne vis-à-vis de l’État d’Israël, à l’image des relations de Tel-Aviv avec d’autres pays africains. Israël entretenait de bonnes relations dans les années 60 avec ces pays, à l’aube de la décolonisation et de l’indépendance de ces États. Ces relations avaient été interrompues au lendemain de la guerre des Six-Jours en 1967 sous la pression des pays arabes nord-africains, sur base d’une logique de solidarité africaine et tiers-mondiste. Sous l’impulsion de son Premier ministre qui s’est rendu trois fois sur le continent africain ces deux dernières années et a visité cinq pays africains, l’État hébreu mène depuis quelques années une politique étrangère dynamique intersectorielle pour revenir sur ce continent. Il cherche à être membre observateur de l’Union africaine (UA), à l’instar de certains pays comme l'Etat de Palestine, la Turquie, Haïti, la Serbie ou l’Ukraine.

La visite de M. Déby peut être interprétée dans le cadre de cette stratégie israélienne. « Le Tchad a eu des relations diplomatiques avec Israël et les a rompues en 1972. Quand j’ai demandé aux assistants du président (tchadien) pourquoi, ils ont répondu que c’était à cause des fortes pressions exercées par (l’ancien dirigeant libyen Mouammar) Kadhafi. Aujourd’hui, il n’y a pas de Kadhafi, il est donc possible que les relations progressent », a affirmé Dore Gold, président du Centre de Jérusalem pour les affaires publiques et ancien directeur général du ministère israélien des Affaires étrangères, qui s’est rendu à N’Djamena et a rencontré le président tchadien en juillet 2016. « Nous espérons entrer dans une nouvelle ère de coopération et, à terme, rétablir les relations diplomatiques », ont annoncé pour leur part MM. Déby et Netanyahu dans une conférence de presse conjointe.


(Pour mémoire : Afrique du Sud: une élue de Johannesburg suspendue pour des propos pro-Israël)


Changer les comportements dans les instances internationales
Des entrepreneurs et hommes d’affaires israéliens sont présents en Afrique où ils travaillent dans les domaines de l’énergie, de la construction ou du diamant, entre autres, et leur présence est restée continue malgré la rupture des relations diplomatiques. L’intérêt d’un retour en Afrique de l’État israélien, plus fort que jamais du soutien de l’administration Trump, a plusieurs motivations. Contrer l’Iran, créer de nouvelles opportunités commerciales et économiques ou renforcer son “soft power” en sont quelques exemples. Celui qui prime pourtant sur les autres est « de changer radicalement la situation en ce qui concerne les votes africains aux Nations unies et dans d’autres instances internationales », selon M. Netanyahu, qui s’exprimait devant un rassemblement de ses ambassadeurs auprès des pays africains le 8 février 2017. M. Netanyahu leur expliquait que « la majorité automatique contre Israël à l’ONU est composée avant tout de pays africains. Il y a 54 pays. N’importe qui peut faire le calcul simple. Si vous modifiez les habitudes de vote d’une majorité d’entre eux (…), vous avez changé l’équilibre des voix contre nous à l’ONU ».

Bibi avait également adressé cet appel directement aux dirigeants africains au sommet de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) à Monrovia, le 4 juin 2017. Le premier dirigeant étranger à s’exprimer lors de ce forum, M. Netanyahu a « sollicité » le « soutien » des quinze États membres de la Cedeao « pour rejeter les partis pris anti-israéliens aux Nations unies, (…) dans des instances telles que l’Assemblée générale, l’Unescoet le Conseil des droits de l’homme ».


(Pour mémoire : Israël prêt à tout pour mettre les « infiltrés » africains à la porte)


Les canaux israéliens en Afrique
Le Premier ministre israélien a affirmé que son pays doit, en règle générale, œuvrer pour la consolidation d’un « triangle : les pouvoirs économique et sécuritaire vous procurent le pouvoir diplomatique », lors d’une entrevue le 12 mars dernier dans l’émission Life, Liberty & Levin sur la chaîne américaine Fox News. L’opération séduction en Afrique rentre dans un cadre plus large de tissage de nouvelles relations par Israël qui capitalise en effet sur ses secteurs financiers et technologiques, notamment dans les domaines de l’énergie, de la cybersécurité et de la sécurité. Cela a été démontré récemment par le rapprochement avec les pays arabes du Golfe, et l’information relayée dans des médias israéliens selon laquelle le ministère israélien de la Défense assurera la cybersécurité du G20 (Israël n’en fait pas partie) qui se tiendra le 30 novembre courant à Buenos Aires.

Le domaine de la sécurité était au cœur de la visite du président tchadien selon une source tchadienne reprise par Reuters, qui a précisé qu’Israël avait fourni cette année à l’armée tchadienne des armes et d’autres équipements militaires pour l’aider dans sa lutte contre des groupes rebelles dans le nord du pays. « Chaque semaine, nous voyons la mise en œuvre du concept qui consiste à cultiver la force économique et technologique, en plus de la force du renseignement et de la sécurité, pour obtenir une force politico-diplomatique. Cela se passe sous nos yeux, pourrait-on dire, tous les jours », a affirmé M. Netanyahu lors de sa rencontre avec le président tchadien. Le gouvernement israélien a en outre fourni des armes dans des conflits africains tels qu’au Soudan du Sud et au Burundi ces dernières années.

La technologie concernant les moyens d’atténuer l’impact climatique des pays africains et de transiter vers une gestion durable des ressources naturelles et énergétiques faisait l’objet d’une conférence intitulée L’Afrique, le changement climatique et la contribution d’Israël, organisée par le ministère israélien des Affaires étrangères le 22 novembre courant. « La technologie nous a permis de faire l’inimaginable... mais appliquer ces technologies dans notre propre pays n’est pas suffisant. Nous les partageons avec le monde », a affirmé Benjamin Netanyahu, à travers un message vidéo.


(Pour mémoire : La diplomatie parfois contre nature de l’État hébreu)


En capitalisant sur ses moyens diplomatiques, sécuritaires, économiques et technologiques, Israël se projette également en Afrique via les dossiers de l’énergie, de l’environnement et de la santé. Au niveau des populations locales, des initiatives se font à travers le Mashav, l’Agence israélienne de coopération internationale pour le développement, l’équivalent israélien de l’Usaid américain ou du Dfid britannique. Plus de la moitié des activités de l’agence affiliée au ministère israélien des Affaires étrangères concernent le continent africain, selon des chiffres du ministère. Le Mashav soutient ou propose des programmes de formations, sur place ou à travers des séjours organisés en Israël, pour des étudiants ou des professionnels, dans des domaines variées tels que le journalisme, l’agriculture, la médecine, ou l’enseignement de l’hébreu. Tel-Aviv a fourni en outre la plus grande contribution per capita au monde dans la lutte contre l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest, selon une déclaration du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) en 2014.

Diplomatiquement, l’offensive ne se limite pas à l’opération séduction très dynamique de M. Netanyahu. Les ambassades et missions diplomatiques israéliennes en Afrique entretiennent continuellement leurs pages sur les réseaux sociaux, et le public ciblé est le public africain. Chaque page est adaptée aux populations des pays d’opérations des missions, montrant le quotidien des diplomates israéliens en tournée continue aux côtés de responsables d’initiatives socio-économiques locales ou d’élus locaux, souvent dans des localités soutenues financièrement de manière ponctuelle par l’ambassade israélienne.

Tel-Aviv est donc sur tous les fronts pour se projeter en Afrique. Des informations relayées par la presse israélienne font état d’efforts israéliens pour mettre en place des relations diplomatiques avec le Soudan, historiquement ennemi de l’État hébreu. En 2016, le ministre soudanais des Affaires étrangères, Ibrahim Ghandour, a déclaré que Khartoum était ouvert à l’idée de normaliser ses relations avec Israël en échange de la levée des sanctions américaines. Israël s’est en outre déjà assuré des soutiens éthiopien et kényan lors du vote en février prochain à l’UA portant sur son statut d’observateur, et a obtenu des promesses du Ghana. Israël détenait ce statut dans l’Organisation de l’unité africaine, l’ancêtre de l’UA. Le nombre d’ambassades africaines en Israël, indicateur de cette nouvelle tendance, continue de croître. En 2017, il existait ainsi désormais 14 ambassades de pays africains en Israël qui a des relations diplomatique avec 42 pays du continent noir.

« Israël revient en Afrique et l’Afrique revient en Israël. » Tel est le slogan du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu dans sa campagne pour projeter son pays sur le continent africain, qu’il n’a pas omis de répéter en recevant le président Idriss Déby, pour la première visite d’un chef d’État tchadien en Israël, après plus de quatre décennies de...
commentaires (5)

Ben oui, pendant que les uns s'entre-tuent et ronronnent sur leurs lauriers, les autres avancent socialement, technologiquement et militarement....

IMB a SPO

15 h 49, le 27 novembre 2018

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Commentaires (5)

  • Ben oui, pendant que les uns s'entre-tuent et ronronnent sur leurs lauriers, les autres avancent socialement, technologiquement et militarement....

    IMB a SPO

    15 h 49, le 27 novembre 2018

  • Ne pas s'étonner si dans quelques années le slogan se change en " L'Afrique revient Á Israël"!

    Tina Chamoun

    11 h 50, le 27 novembre 2018

  • Petit peuple, grandes ambitions...soutenues par un niveau technologique enviable, meme par les grandes nations Une leçon pourr beaucoup de gens "cramponnés dans la facilité que procure l'aisance" Stress fertile

    Chammas frederico

    10 h 18, le 27 novembre 2018

  • LES ARABES PAR PROVOCATIONS IRANIENNES S,ENTRETUENT ET LES ISRAELIENS PROGRESSENT POLITIQUEMENT ET MILITAIREMENT ! L,IRAN DEVENANT DE FACTO L,AMI D,ISRAEL...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 37, le 27 novembre 2018

  • On comprend la campagne faite contre la France pour les faire partir du continent. Pêcheur en eau trouble.

    FRIK-A-FRAK

    09 h 20, le 27 novembre 2018

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