« Je suis très émue ». Debout devant la façade couverte de stigmates de l’« immeuble de L’Orient », dans le centre-ville de Beyrouth, Nayla Moawad ne cache pas son émotion. Profitant de l’ouverture au public du bâtiment à l’occasion de l’exposition de Jean Boghossian, l’ancienne députée revient sur les traces de son passé et convoque ses souvenirs. Ceux de l’époque « merveilleuse », il y a déjà plus de 50 ans, où elle travaillait comme journaliste à L’Orient, quotidien libanais de renom fondé en 1924 par Georges Naccache et Gabriel Khabbaz. « J’étais la première jeune fille à exercer ce métier. Et à l’époque, ça avait choqué tout Beyrouth, » se rappelle-t-elle. « J’occupais un grand bureau, avec André Bercoff… »
L’immeuble de la Trablos était situé au cœur de Beyrouth. Le restaurant Ajami était en face, ainsi que la boutique de vêtements féminins Clauda, l'enseigne de linge de maison Domtex ou encore le joaillier Daou au rez-de-chaussée. Aujourd’hui, le temps a passé, la guerre aussi, et du bâtiment de pierres jaunes construit dans les années 1920, il ne reste que la carcasse de quatre étages, ouverte aux quatre vents, vestige d’une époque révolue, au cœur d'un centre-ville refait à neuf.
Lorsque L’Orient a fusionné avec Le Jour en 1971, sa rédaction a déménagé dans les locaux de son vieux concurrent, à Hamra. Seuls restaient dans le mythique immeuble jaune les services administratifs et publicitaires, et le projet de faire des bureaux pour des journalistes et hommes d’affaires internationaux de passage. La guerre en a décidé autrement. Dès 1975, l’immeuble est déserté, sa façade se retrouve rapidement criblée de balles et autres éclats d'obus. Depuis, l’immeuble n’a jamais été réhabilité. Il se dit que son propriétaire actuel, Abdallah Wehbé Tamari, envisagerait de le faire...
Pour mémoire
Jean Boghossian : Le feu commande et j’exécute
L’« immeuble de L’Orient », un trésor architectural et historique bientôt restauré
commentaires (5)
Bonjour, reportage fort émouvant et sympathique. La liberté de la presse est combat long... Philippe
VIARD Philippe
09 h 54, le 13 novembre 2018