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Moyen Orient et Monde - Défense

Les missiles balistiques, entre nécessité iranienne et inquiétudes occidentales

Les Français considèrent, comme les Américains, que le temps est venu d’intégrer ces missiles et la politique régionale de l’Iran au sein du JCPOA.

Des missiles de type « Zolfaghar » sont exposés lors d’un rassemblement à Téhéran le 23 juin 2017. Stringer/AFP/Getty Images

Une ligne rouge à la limite de l’écarlate, voici comment Téhéran définit aujourd’hui son programme de développement de missiles balistiques, devenu un sujet sensible dans les relations entre l’Iran et l’Occident.

Cela n’a néanmoins pas toujours été le cas. Avant la révolution islamique de 1979, le chah d’Iran avait vocation à faire de son armée la première du golfe Persique. Il avait pour cela noué une alliance avec l’Occident, et en particulier les États-Unis, grâce auxquels il pouvait développer son arsenal militaire dans les complexes militaro-industriels occidentaux.Mais tout change en 1979. Le chah est renversé, la République islamique est instaurée et une mutation de la politique militaire et régionale iranienne se met en place. Celle-ci se caractérise notamment par une volonté d’exportation du modèle islamique chiite révolutionnaire, anti-israélien et antisaoudien, qui coûte à l’Iran la dégradation de ses relations avec les Occidentaux. Cela entraîne de facto l’impossibilité pour Téhéran de fabriquer ses armements dans les complexes d’armements de ses anciens alliés. La République islamique s’oriente alors vers le développement d’un programme de fabrication d’armements made in Iran. « À partir de la révolution, il y a une recherche de capacité militaire indépendante non liée aux complexes militaro-industriels occidentaux qui va être perçue comme une menace dans la région. À cela s’ajoute la volonté du régime des mollahs de vouloir exporter la révolution mais aussi de promouvoir la négation de l’existence d’Israël au cœur de sa politique régionale », explique Clément Therme, chercheur à l’Institut international d’études stratégiques (IISS), contacté par L’Orient-Le Jour. La tension avec les Occidentaux engendre aussi des sanctions contre Téhéran qui se retrouve ainsi dans l’impossibilité d’acheter du matériel militaire étranger.Ainsi, en s’étant détaché des Occidentaux, l’Iran voit aujourd’hui plusieurs secteurs de son armée dépassés. L’aviation en est un bon exemple. Les avions de combat iraniens datent de l’époque du chah et ne peuvent concurrencer ceux fabriqués aux standards internationaux. Et c’est justement pour tenter de contrebalancer cette faiblesse aérienne que Téhéran a insisté depuis plusieurs années sur le développement intensif de son programme de missiles balistiques. « Aujourd’hui, les capacités militaires iraniennes sont beaucoup moins élevées que celles des firmes occidentales. Il y a donc beaucoup de scepticisme quant aux annonces iraniennes de fabrication locale et nationale des armements. C’est une autre raison pour laquelle les missiles balistiques sont si importants pour l’Iran, car cela compense la faiblesse dans les autres domaines de l’armement conventionnel », développe Clément Therme.

La République islamique ne manque d’ailleurs jamais une occasion de vanter les capacités de son armement « national » et a enchaîné ces dernières semaines les promotions de nouveaux appareils de combats, notamment un avion, un nouveau missile balistique de type Fateh Mobin, et un système de missiles anti-aérien de type Bavar 373, semblable aux batteries S-300 que la Russie s’est engagée à livrer à son allié syrien. « Améliorer nos capacités balistiques (...) et acquérir des avions de chasse de nouvelle génération, des navires gros porteurs de longue portée et des sous-marins avec diverses capacités d’armement font partie des nouveaux plans du ministère », a déclaré le 1er septembre dernier Mohammad Ahadi, vice-ministre de la Défense pour les affaires internationales. Une étude réalisée par le magazine américain Forbes en février dernier a révélé que l’Iran investit 16 milliards de dollars dans la défense. Une somme cinq fois moindre que celle de son rival saoudien qui, lui, investit près de 77 milliards de dollars, ce qui en fait le premier budget de la région, et le troisième budget mondial, derrière la Chine mais devant la Russie.

Ainsi, le développement du programme des missiles balistiques semble être devenu avec le temps le seul vrai moyen défensif et dissuasif dont l’armée iranienne dispose.


(Lire aussi : Ahvaz enterre ses morts, Khamenei met en cause Riyad et Abou Dhabi)


La France

Cela vaut à tous les pays osant le critiquer des remontrances de la part de la République islamique. L’exemple le plus significatif reste celui du président français Emmanuel Macron qui avait, en novembre dernier, déclaré que la politique balistique iranienne apparaissait comme « non maitrisée ». Ali Akbar Velayati, conseiller spécial du guide suprême iranien Ali Khamenei, avait immédiatement réagi en incendiant le chef de l’État français et en lui rappelant que le programme balistique iranien ne concernait pas la France. Le problème avait néanmoins été résolu le jour même après un coup de téléphone entre M. Macron et son homologue iranien Hassan Rohani.

Mais depuis cet incident, Paris ne s’est plus privé de critiquer la position de Téhéran concernant sa politique régionale et / ou son programme balistique. Pas plus tard qu’hier, la ministre française des Armées, Florence Parly, a affirmé qu’au même titre que le président américain Donald Trump, « nous (la France) considérons que l’activité balistique de l’Iran est une menace. Comme le président Trump, nous considérons que l’influence de l’Iran dans l’ensemble de la région est un sujet de préoccupation majeure. (…) Ces sujets-là doivent faire l’objet d’une discussion avec l’Iran, cela doit pouvoir se faire sans remettre en question le respect par l’Iran du traité et de l’accord de Vienne », a ajouté la ministre aux côtés du secrétaire américain à la Défense James Mattis.

La France semble ainsi jouer la carte de la prudence, car même si elle ne se prive pas pour manifester son inquiétude vis-à-vis de l’attitude iranienne dans la région, elle conserve néanmoins des relations et un dialogue très régulier avec Téhéran, notamment en ce qui concerne l’accord sur le nucléaire iranien de 2015 (JCPOA), dont Paris est l’un des plus fervents défenseurs et dont les Américains se sont retirés en mai dernier.

Mais les Français considèrent au même titre que les Américains que le temps est venu d’intégrer les missiles balistiques et la politique régionale de l’Iran au sein du JCPOA. Les Occidentaux s’inquiètent en effet que les missiles balistiques fabriqués en Iran ne soient utilisés, à long terme, pour transporter des charges nucléaires. Par ailleurs, un récent rapport de l’IISS a récemment affirmé que l’Iran développe aujourd’hui une douzaine de types de missiles balistiques d’une portée de 200 à 2 000 km et pouvant emporter des charges de 450 à 1 200 kg. Mais les Iraniens refusent catégoriquement toute renégociation ou toute discussion sur leur programme balistique ou leur politique régionale. La République islamique veut en effet appliquer l’accord tel qu’il a été signé. Mais comme le ministre français des Affaires étrangères l’a dit à la fin août, « l’Iran ne peut pas éviter » des discussions sur des questions litigieuses comme son programme de missiles balistiques ou son ingérence dans les conflits au Moyen-Orient. Le bras de fer n’est donc pas terminé entre l’Occident et l’Iran.



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Une ligne rouge à la limite de l’écarlate, voici comment Téhéran définit aujourd’hui son programme de développement de missiles balistiques, devenu un sujet sensible dans les relations entre l’Iran et l’Occident.Cela n’a néanmoins pas toujours été le cas. Avant la révolution islamique de 1979, le chah d’Iran avait vocation à faire de son armée la première du golfe...

commentaires (3)

LE MONDE EST PLEIN DE GENS QUI NE SONT RIEN MOINS SAGES. TOUT AUCUN VEUT BATIR COMME LES FORTS SEIGNEURS. TOUT PETIT VEUT AVOIR DES AMBASSADEURS. TOUT MEDIOCRE REVE D,AVOIR DES PAGES ! INSPIRE DE LAFONTAINE

LA LIBRE EXPRESSION

13 h 44, le 03 octobre 2018

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Commentaires (3)

  • LE MONDE EST PLEIN DE GENS QUI NE SONT RIEN MOINS SAGES. TOUT AUCUN VEUT BATIR COMME LES FORTS SEIGNEURS. TOUT PETIT VEUT AVOIR DES AMBASSADEURS. TOUT MEDIOCRE REVE D,AVOIR DES PAGES ! INSPIRE DE LAFONTAINE

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 44, le 03 octobre 2018

  • les autres, les saoudiens comme les israéliens, ont le droit d'intervenir dans les conflits du moyen orient.... pas l'iran. C'est une drôle de position....

    HIJAZI ABDULRAHIM

    13 h 21, le 03 octobre 2018

  • ON NE DEVRAIT POINT LAISSER DES REGIMES EXTREMISTES ET TYRANS DEVELOPPER ET POSSEDER DES ARMES D,ELIMINATION MASSIVE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 45, le 03 octobre 2018

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