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Économie - Repère

Navires-centrales : et de trois...

La nouvelle barge que l’État a décidé de louer à l’opérateur turc Karadeniz est arrivée hier au large de Jiyé.

La nouvelle barge que l’État libanais a décidé de louer à l’opérateur turc Karadeniz est arrivée hier au large de Jiyé. Photo ANI

Annoncé le 21 mai dernier, dans le sillage du dernier Conseil des ministres du gouvernement sortant, le nouveau navire-centrale (aussi appelé centrale flottante ou barge) que l’État a décidé de louer à l’opérateur turc Karadeniz est arrivé hier au large de Jiyé (caza du Chouf), où il doit être mis en service. Selon le ministre de l’Énergie et de l’Eau, César Abi Khalil, mandaté pour négocier les termes du contrat, cette barge, baptisée Esra Sultan, va permettre d’augmenter temporairement les capacités de production d’Électricité du Liban (EDL) de 200 mégawatts (MW), soit deux heures de courant en plus.

Peu de détails
Le ministère de l’Énergie n’a pas communiqué tous les termes du contrat. L’arrivée de cette barge, dont le nom est resté inconnu jusqu’à la dernière minute, s’inscrit néanmoins dans le cadre d’un accord plus large qui comprend la prolongation pour trois ans de plus de la location de deux navires mis en service en 2013 par le même opérateur : le Fatmagül Sultan à Zouk et Orhan Bey à Jiyé, pour un total de 370 MW et pour un coût de plusieurs centaines de millions de dollars.
Lors d’une conférence de presse organisée le 22 mai, M. Abi Khalil avait affirmé que la location de la nouvelle centrale flottante pour trois ans avait été négociée « sans frais supplémentaires », ajoutant qu’elle avait permis de baisser le prix du kilowatt/heure de 5,85 à 4,95 centimes de dollar, hors coût du mazout, entre autres clauses. Le ministre était en revanche resté évasif sur le coût de la location après la période de gratuité de trois mois négociée.
Le flou qui règne sur les conditions du contrat a d’ailleurs été dénoncé courant juin par certains membres du gouvernement sortant, dont le vice-Premier ministre et ministre de la Santé, Ghassan Hasbani, et le ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, Marwan Hamadé. Ces derniers ont notamment critiqué le fait que le procès-verbal du Conseil des ministres qui a entériné la décision de louer une troisième barge ne correspondait pas à ce qui avait été convenu lors de la réunion.
L’affaire a été à l’origine d’une importante passe d’armes entre les deux camps, sur fond de querelle politique entre les Forces libanaises et le Courant patriotique libre desquels relèvent respectivement M. Hasbani et M. Abi Khalil, sans pour autant que d’autres éléments du contrat ne soient rendus publics. « Il n’y a que deux personnes qui connaissent les détails : le ministre sortant de l’Énergie et son prédécesseur de 2009 à 2011, l’actuel ministre sortant des Affaires étrangères et des Émigrés, Gebran Bassil », déclare une source proche du dossier. Contacté par L’Orient-Le Jour, le ministère de l’Énergie n’a pas fourni plus de précisions.

Échec du marché public
M. Bassil est à l’origine du plan de restructuration du secteur de l’électricité adopté en 2010 par le Conseil des ministres qui avait introduit pour la première fois les navires-centrales comme solution temporaire pour pallier le déficit de production d’électricité. EDL, qui détient le monopole de la production, assure en effet moins des deux tiers des besoins du pays, qui gravitent autour de 3 000 MW.
Les centrales flottantes ont l’avantage de pouvoir être déployées rapidement avec un minimum de travaux d’aménagement (un brise-lames et un terminal de carburant suffisent). Celles mises en service au Liban fonctionnent au mazout, mais des modèles consommant du gaz naturel liquéfié ou l’énergie nucléaire ont récemment été développés. Karadeniz est un des plus importants acteurs mondiaux de cette filière avec une dizaine de barges qui ont été ou sont toujours en service au Ghana, en Indonésie, en Irak ou encore au Pakistan.
Le déploiement des premiers navires-centrales au Liban il y a cinq ans devait être temporaire, et permettre au Liban de lancer plusieurs projets prévus par le plan Bassil – dont la construction de nouvelles centrales confiée au secteur privé – pour réhabiliter le secteur. Mais face à l’incapacité des gouvernements successifs, rongés par les dissensions politiques, à lancer les projets prévus, la location du Fatmagül Sultan à Zouk et de l’Orhan Bey a été prolongée de deux ans une première fois en 2016, avec plusieurs modifications au contrat d’origine. Le prix du kWh était ainsi passé de 5,95 à 5,85 centimes de dollars et la capacité augmentée de 100 MW, tandis que Karadeniz acceptait de renoncer à certains bonus en cas d’économie de fuel, avait indiqué Le Commerce du Levant en juillet 2016.
Enfin, l’arrivée de la troisième barge a été décidée après l’échec du gouvernement à mettre en œuvre une solution aussi ambitieuse que controversée proposée par le ministre de l’Énergie en mars 2017 et consistant à déployer temporairement une capacité de 850 MW dans le cadre d’un plan d’urgence reprenant une partie des préconisations du plan Bassil. Adoptée dans la foulée par le Conseil des ministres, la mise en œuvre de cette solution à 850 millions de dollars par an s’est finalement soldée par l’échec de la procédure d’appel d’offres lancée par le ministère de l’Énergie, après plusieurs mois de discussions et d’allers-retours entre le gouvernement et la Direction des adjudications qui avait jugé que le cahier des charges favorisait la solution proposée par l’un des candidats… en l’occurrence, la société Karadeniz. Le 21 mai, le Conseil des ministres avait finalement décidé de lancer un nouvel appel d’offres avec des critères techniques moins limités.



Annoncé le 21 mai dernier, dans le sillage du dernier Conseil des ministres du gouvernement sortant, le nouveau navire-centrale (aussi appelé centrale flottante ou barge) que l’État a décidé de louer à l’opérateur turc Karadeniz est arrivé hier au large de Jiyé (caza du Chouf), où il doit être mis en service. Selon le ministre de l’Énergie et de l’Eau, César Abi Khalil,...

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