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Scan TV - Journalisme

Fake news : les médias traditionnels contre-attaquent

Au Brésil, deux organisations spécialisées dans le « fact-checking », Lupa et Aos Fatos, qui ont établi des partenariats avec Facebook, ont subi des menaces et ont été accusées de parti pris politique. Miguel Schincariol/AFP

La prolifération des rumeurs et des fausses informations avant l’élection présidentielle de 2016 aux États-Unis et le référendum sur le Brexit au Royaume-Uni ont sonné comme un signal d’alarme pour les médias traditionnels. L’urgence est de restaurer leur crédibilité en se plaçant aux avant-postes de la lutte contre les « fake news ».
Les grands médias, souvent en partenariat avec des géants de la technologie et des réseaux sociaux, se sont lancés dans la vérification des informations, le « fact-checking », et insistent sur leur volonté de promouvoir un journalisme basé sur les faits.
Mais leurs efforts sont compliqués par l’utilisation politique qui est faite des mots « fake news », en particulier par le président américain Donald Trump, souvent prompt à qualifier ainsi les médias qui ne lui sont pas favorables.

Les gardiens de la vérité
Les fausses informations sont aussi vieilles que le journalisme lui-même. Mais la rapidité de propagation sur internet et sur les réseaux sociaux d’informations douteuses a profondément changé le rôle de rempart contre le mensonge joué par les médias traditionnels.
Un exemple récent, en Inde, est particulièrement frappant. Des agressions et des lynchages ont été perpétrés en juin dans l’État du Gujarat par plusieurs centaines de personnes convaincues de l’existence d’un réseau de trafiquants d’enfants. Ces vengeances trouvaient leur origine dans des rumeurs colportées sur l’application de messagerie
WhatsApp.
Les réseaux sociaux ont « rendu les choses encore pires », souligne John Huxford, professeur de journalisme à l’université de l’État de l’Illinois. Ils permettent de « contourner facilement le garde-fou que représente le journalisme traditionnel et font en sorte que n’importe qui puisse publier n’importe quoi, que ce soit biaisé, inexact ou fabriqué », ajoute-t-il.
« Le rôle des journalistes dans la définition de ce qui est une information et de ce qui n’en est pas une a naturellement toujours été controversé. Mais on voit bien aujourd’hui les effets négatifs de la décomposition de cette fonction », met-il en garde.
Les grands acteurs d’internet, après une réticence initiale à se définir comme des « médias », ont eu une prise de conscience récente. Ils cherchent de plus en plus à faire le tri dans les informations qu’ils contribuent à faire circuler en s’appuyant sur des sources « de confiance », la plupart du temps des médias traditionnels.
« Qu’elles le veuillent ou non, les entreprises de technologie, dont Apple, Google, Snapchat, Twitter et avant tout Facebook, ont repris la plupart des fonctions des médias d’information, devenant des acteurs-clés de l’écosystème médiatique », notait en mars 2018 un rapport du Tow Center for Digital Journalism de l’Université de Columbia.

Des « fake news » rapides comme l’éclair
Plusieurs études ont montré que les « fake news » – souvent plus sensationnalistes que les informations exactes – se répandent plus rapidement en ligne car les réseaux sociaux privilégient « la viralité ».
« Les fausses informations politiques circulent plus largement et plus en profondeur, atteignent un public plus nombreux et sont plus virales que n’importe quelle autre catégorie de fausses informations », note une étude du Massachusetts Institute of Technology (MIT).
En examinant 126 000 rumeurs partagées par trois millions d’utilisateurs des réseaux sociaux, ses chercheurs ont montré que la vérité mettait six fois plus de temps que les fausses informations pour atteindre 1 500 personnes.
Les universitaires de l’institut d’Oxford soulignent que sur de nombreuses plateformes internet, les informations « sont hiérarchisées par des algorithmes complexes qui ont été programmés pour filtrer et livrer les contenus de manière à maximiser l’engagement des utilisateurs », c’est-à-dire pour inciter ceux-ci à les commenter et à les partager.
La viralité d’un contenu n’est en rien liée à son exactitude, écrivent les chercheurs d’Oxford.
C’est pourquoi le rôle des médias traditionnels est crucial. C’est également pourquoi « il est si toxique que Trump qualifie faussement de “fake news” les médias traditionnels », affirme le professeur John Huxford.
Des signes positifs apparaissent cependant, comme la hausse des abonnements numériques de journaux comme le New York Times et le Washington Post. Mais de nombreux médias vénérables, plus petits, peinent à adapter leur modèle.

Nouveaux dangers pour les journalistes ?
Les journalistes font face à de nouveaux risques dans cet environnement, critiqués par les hommes politiques alors qu’ils cherchent à débusquer des contre-vérités. Au Brésil, deux organisations spécialisées dans le « fact-checking », Lupa et Aos Fatos, qui ont établi des partenariats avec Facebook, ont subi des menaces et ont été accusées de parti pris politique.
Le gouvernement philippin a abrogé la licence du site internet Rappler, qui s’était rallié aux efforts de vérification des informations endossées par le président Rodrigo Duterte.
Aux États-Unis, les médias bénéficient d’une solide protection constitutionnelle. Mais certains journalistes estiment que les attaques de Trump ont un impact sur la perception du public à leur égard.

Quelle valeur pour le « fact-checking » ?
Dans ce contexte, le « fact-checking » est la valeur montante. On ne compte pas moins de 149 initiatives de ce genre, dans 53 pays, selon le Reporters Lab de la Duke University.
Facebook a établi des partenariats avec 25 médias – dont l’AFP – dans 14 pays, afin de freiner le flot de fausses informations.
Mais les études montrent que le « fact-checking » a ses limites. Et que certains continueront toujours de croire aux fausses informations, quels que soient les efforts de vérification.
Fin 2016, un homme armé avait tiré dans une pizzeria de Washington parce qu’il croyait aux rumeurs affirmant qu’un réseau de trafiquants d’enfants impliquant Hillary Clinton y sévissait. Et 51% des électeurs républicains aux États-Unis continuent de penser que Barack Obama est né au Kenya, ce qui, selon la Constitution, l’aurait empêché d’être président. L’inexactitude de ces deux rumeurs a été largement démontrée.
Une étude a montré que les deux tiers des adultes américains se plaignaient de la confusion créée par les informations manipulées. Mais 23 % d’entre eux reconnaissent avoir déjà partagé une fausse information, dont la moitié en connaissance de cause.

Source : AFP

La prolifération des rumeurs et des fausses informations avant l’élection présidentielle de 2016 aux États-Unis et le référendum sur le Brexit au Royaume-Uni ont sonné comme un signal d’alarme pour les médias traditionnels. L’urgence est de restaurer leur crédibilité en se plaçant aux avant-postes de la lutte contre les « fake news ».Les grands médias, souvent en...

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