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Travaux de force

Peu importe aux citoyens que les caïds de la politique obtiennent, ou non, la grosse tranche de gâteau ministériel due, disent-ils, à leur rang, comme à leur audience électorale : ces scandaleuses querelles de préséance se traduisant, comme on sait, par un criminel retard dans la formation d’un nouveau gouvernement, alors que le pays ploie sous une crise à tiroirs.

Ce qu’espèrent plutôt les Libanais, toutes appartenances confondues, c’est une prompte, une urgente prise de conscience des responsables, un peu d’abnégation et de souci de l’intérêt public, un minimum d’humilité, même si leur ego démesuré doit en souffrir. Ce que les gens attendent, c’est le jour béni où ils recouvreraient leur dignité de citoyens, à l’ombre d’un État attentif à leurs problèmes quotidiens, leur prodiguant les services auxquels ils ont droit, bref un État digne de ce nom. D’autant plus criminelle est cette perte de temps que la planche de salut est là, qui n’attend que le bon vouloir du Liban : ce n’est autre que le providentiel programme international de soutien proposé à notre pays, à charge pour lui de procéder, en toute transparence, à de substantielles réformes.

Bien que nécessaires et même vitales, impopulaires seront forcément celles-ci, notamment la suppression du soutien étatique au prix du kilowattheure (quand kilowatts il y a !) et le dégraissage, à grands coups de hachoir, d’une administration publique largement parasitée sous l’effet d’un clientélisme intensivement pratiqué. Les diverses forces politiques sont-elles vraiment prêtes pour un tel hara-kiri ? Et plutôt que de voir se prolonger le chassé-croisé d’exigences, plutôt que de rééditer la triste expérience des cabinets de mensongère unité voués aux dissensions et à la paralysie, la situation ne commande-t-elle pas, plus que jamais, le recours à un cabinet de technocrates non partisans alliant à leur expertise transparence et intégrité : deux qualités devenues bien rares au sein d’une classe politique gangrenée par la corruption ? Écarter les voleurs du temple (les chasser serait trop beau), faire appel à quelques-unes de ces hautes compétences dont est riche notre pays, quel magnifique acte d’autorité ce serait là, de la part des deux pôles de l’exécutif…

Le fait est qu’on nous a trop longtemps rebattu les oreilles avec le slogan d’un pouvoir fort, lequel viendrait donner quelque consistance aux promesses de changement et de réforme déclinées en toutes lettres jusque dans le nom du parti présidentiel. Or quel changement, avec l’étalage d’un népotisme démentant les diatribes du passé, qui visaient férocement les dynasties politiques libanaises ? Quelle réforme avec les scandales collant à la peau des proches entourages ? De quelle transparence, de quelle vigilance parle-t-on, au vu de ce récent et hallucinant décret de naturalisations qui faisait la part belle à des personnages bien peu recommandables mais fortunés et tout disposés à se montrer reconnaissants ?

Triste, ennuyeuse, pitoyable BD politique libanaise cherche désespérément potion magique pour racoler lecteurs…

Issa GORAIEB
igor@lorientlejour.com

Peu importe aux citoyens que les caïds de la politique obtiennent, ou non, la grosse tranche de gâteau ministériel due, disent-ils, à leur rang, comme à leur audience électorale : ces scandaleuses querelles de préséance se traduisant, comme on sait, par un criminel retard dans la formation d’un nouveau gouvernement, alors que le pays ploie sous une crise à tiroirs. Ce...