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Culture - Musique

Good Luck in Death : une bande-son d’enfer

Charbel Haber et le surdoué Mondkopf enregistrent à Beyrouth les morceaux qui composeront le premier album du duo qu’ils ont créé pour l’occasion.

Charbel Haber et le surdoué Mondkopf enregistrent à Beyrouth. Photo Laura Karam

Charbel Haber et Mondkopf fignolent leur premier album au titre haberien They Promised Us a Bright Future, We Were Content with an Obscure Past qui va bientôt sortir. L’Orient-Le Jour a pu assister à une session d’enregistrement de nuit. Lumineuse.

Le studio Tunefork de Fadi Tabbal est le site incontournable de la scène musicale libanaise, la scène qui met ses tripes sur scène plus que celle qu’on voit en boucle sur Rotana. Situé au-dessus d’une institution financière libano-française, c’est aussi un duo libano-français qu’il accueille ce soir-là. Il y a, sur le sol du studio, plus de pédales que dans le peloton du Tour de France. Aux 15 pédales posées sur le sol par Haber s’ajouteront les 6 de l’artiste parisien invité. Cet enchevêtrement de câbles et de machines fait office d’orchestre pour ces deux manipulateurs sonores. Une guitare et un synthétiseur seront les instruments de musique, victimes consentantes des manipulations et des triturations du musicien beyrouthin qui accueille Paul Régimbeau, alias Mondkopf. Ces deux-là devaient se rencontrer, et cela s’est passé en 2017, lors d’une tournée de Haber en France avec ses amis de Oiseaux tempête. Leurs univers convergent, leurs carrières se croisent, leur musique se fond, se confond. 

Né en 1986, Mondkopf est présent sur la scène musicale depuis 2005, année de la sortie de son premier album, Un été sur l’herbe. Précoce et fécond, il enchaîne avec des maxis, des albums et des remixes. Et devient une coqueluche de la presse spécialisée européenne. Sa personnalité est forte, son univers déjà marqué et sa patte reconnaissable. Il pourrait capitaliser sur son buzz mais préfère la voie du samouraï, celle de la droiture, de la difficulté. La musique lui permet de s’exprimer, elle est un moyen et pas une fin. Il évolue donc vers des univers moins formatés, mais plus riches, vers plus d’expérimentations, de découvertes, préférant s’exprimer en tant qu’artiste. Passant d’une électro rythmique à une musique ténébreuse et grondante, il rejoint peu à peu l’univers de Haber, apocalyptique et mélancolique. Mais toujours avec l’espoir de la rédemption. Et celui qui tire son nom du fait qu’il semblait toujours avoir la tête dans la lune a bien les pieds sur terre, ou plutôt sur ses machines. La mythique pédale wah-wah a fait place à des machines complexes, riches, qui permettent aux deux musiciens d’élargir leurs gammes et de créer des sons, des ambiances. Ce ne sont pas des chansons qui sont enregistrées, ce sont des conversations, des ambiances, des tableaux. Quand l’un d’eux lance le morceau, l’autre suit, enrichit, construit. Avec ou sans rythme, les morceaux sont joués d’une traite, en totale confiance, en harmonie. Pas de producteur pour dire « stop, ça manque de sax ». Ici, ce qui compte, c’est le voyage, voyage entre les sons de la guitare de Haber et les sons du Moog de Mondkopf. Et alors que leur musique plane, c’est toujours au sol que ça se passe, sur leurs machines, avec leurs boutons. Qu’ils pressent un bouton du pied pour lancer un effet ou tournent manuellement d’autres boutons pour en changer l’intensité, l’effet, chaque geste paraît anodin mais est calculé et maîtrisé. La concentration est extrême, la communion totale. La musique ne se crée plus avec des partitions, elle se travaille en amont, fruit de discussions communes, d’univers partagés, de références. Quand ces deux artistes se rencontrent, leur but n’est pas de livrer une compilation de tubes, leur but est de livrer une conversation, un livre, un film sans image, une ambiance, que les auditeurs s’approprieront, digéreront et enrichiront de leurs propres univers. Celui de Good Luck in Death est riche, sombre, mélancolique, bruyant, mais aussi poétique, lisible et marquant. Le dernier tube de Rita Ora sera oublié dans 2 mois, les morceaux du duo seront intemporels.


À signaler que Charbel Haber et Mondkopf seront en concert au Beirut Open Space (rue d’Arménie, Mar Mikhaël) ce mercerdi soir à 20h. 



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