Au moment où les forces israéliennes et américaines entament des manœuvres militaires qui vont durer deux semaines et qui sont destinées, selon certains observateurs, à préparer la prochaine guerre contre le Hezbollah, le Liban continue d’afficher une grande sérénité. Après le départ du secrétaire d’État adjoint pour les Affaires du Proche-Orient, David
Satterfield, de Beyrouth, où il est passé quatre fois en près de trois semaines, le Liban officiel estime avoir marqué un point et consolidé le front interne face aux tentatives de pression américaines pour le compte des Israéliens. Les responsables libanais sont ainsi convaincus qu’il n’y a pas de risque de guerre dans l’avenir immédiat.
Le Liban peut donc se consacrer tout entier à la campagne électorale, sans même prendre la peine d’évoquer les sujets importants qui permettent en général de classer les candidats et commandent le choix des électeurs. Dans cette campagne aveugle, car jusqu’à présent, les programmes électoraux manquent de vision et de stratégie, le populisme est roi. Les alliances ne sont basées que sur l’intérêt et visent à augmenter la part de chaque liste dans le seuil d’éligibilité, avant de laisser la place à un sauve-qui-peut généralisé. Au point que le ministre de l’Intérieur a qualifié la loi électorale de « loi de Caïn et Abel », car une fois le seuil d’éligibilité assuré, la bataille se transpose au sein d’une même liste entre les « candidats frères », chacun voulant se doter du plus grand nombre de voix préférentielles.
Toutefois, des sources politiques estiment que le Liban ne doit pas se leurrer, la menace israélienne demeure. Elle prend juste une pause, le temps de laisser le Liban renouveler son Parlement et son gouvernement. Mais si, comme cela paraît probable, les prochaines législatives ne permettront pas de réduire l’influence du Hezbollah sur la scène politique et ne permettront pas de l’isoler, d’abord en réduisant son bloc parlementaire et ensuite en ne l’incluant pas dans le prochain gouvernement, les menaces israéliennes devraient redevenir pressantes, avec l’aval de l’administration américaine, et même de pays régionaux. Selon ces mêmes sources, proches des milieux saoudiens au Liban, le pays se trouve aujourd’hui devant une chance unique d’affaiblir le Hezbollah par le biais des élections législatives. S’il parvient à le faire, il s’épargnera ainsi de nombreux problèmes potentiels, concernant notamment les aides internationales escomptées pour permettre de surmonter la crise économique grave et la gestion du dossier des déplacés syriens. Les hasards du calendrier ont voulu que les trois conférences cruciales pour le Liban se tiennent dans la période préélectorale, à Rome, à Paris et à Bruxelles, mais les crédits qui seront accordés au Liban dans plus d’un domaine resteront tributaires de l’issue des législatives et du gouvernement qui verra le jour après ces élections. Les annonces seront faites pendant les conférences, mais elles ne devraient se concrétiser que plus tard, le temps de voir comment se dessine la nouvelle phase politique au Liban.
Selon ces mêmes sources politiques, la visite du Premier ministre Saad Hariri à Riyad était très importante dans ce contexte, puisqu’elle a permis aux autorités saoudiennes d’assainir leur relation avec M. Hariri après la désastreuse visite de novembre et, en même temps, elle a permis de recadrer son action politique et ses alliances électorales. Le chef du courant du Futur conserve toutefois une marge de manœuvre acceptable, ayant convaincu ses interlocuteurs saoudiens de lui laisser la liberté de mener les élections sur la base de considérations internes, l’objectif étant de parvenir à former un important bloc parlementaire qui lui permettra d’avoir un plus grand poids sur la scène politique. Dans ce contexte, l’idée de reformer l’alliance du 14 Mars est moins importante que celle de consolider son poids politique et les Saoudiens ont donc accepté de le laisser nouer ses alliances selon ses intérêts, tout en insistant toutefois sur l’importance de permettre aux Forces libanaises d’avoir elles aussi un bloc parlementaire important.
Mais une fois les élections législatives terminées, le Liban se trouvera devant un nouveau défi politique : comment gérer la prochaine étape en essayant de réduire l’influence du Hezbollah. Les milieux proches de ce parti affirment que les prochaines élections ne permettront pas d’affaiblir le Hezbollah qui a eu la sagesse de boucler la scène chiite. De plus, la nouvelle loi lui permettra d’avoir des députés alliés dans la plupart des circonscriptions que ce soit sur la scène sunnite (Abdel Rahim Mrad, Oussama Saad, les Ahbache, etc), sur la scène druze (Talal Arslane) et sur la scène chrétienne (le PSNS), sans parler du CPL. Pour cette raison, les élections législatives ne seront pas pour le Hezbollah l’occasion de l’isoler. Ses nombreux détracteurs dans le monde devront chercher un autre moyen pour l’affaiblir après le rendez-vous électoral. Les milieux proches du Hezbollah estiment qu’avant ou après les élections, les Israéliens ne pourront pas lancer une guerre contre le Liban, tant que celui-ci aura une armée et une résistance aussi déterminées à défendre le pays. Tant que le Liban s’attachera à ses éléments de force, il n’aura rien à craindre. Mais si le front interne venait à se lézarder, c’est à ce moment-là qu’il faudra avoir des craintes sérieuses...
Liban - Décryptage
Les risques de guerre... après les élections
OLJ / Par Scarlett HADDAD, le 12 mars 2018 à 00h00
Une certaine idée dans l'air qui consiste d'implanter au Liban les Palestiniens, les descendants de ceux venus en 1948, ceux qui viennent de Jordanie et ceux qui viennent de Syrie. Ainsi la boucle sera bouclée : La fin de la cause palestinienne, la fin de la pseudo-Résistance et la fin de l'hégémonie iranienne. C'est cela le projet israélo-américain. CQFD
15 h 38, le 12 mars 2018