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Culture - À l’affiche

Avec Churchill, il y a du sang, des larmes et du rire...

De la légende Churchill, on sait tout. On connaît l’histoire. Quel est, alors, le secret du
réalisateur Joe Wright dans « Darkest Hour » pour séduire et surprendre le spectateur ?

« Darkest Hour », ou lorsque le lion rugit. Focus Films

Tous les manuels d’histoire, les images d’archives, les documentaires télévisés et les portraits dans les journaux ont écumé, décrypté, analysé son tempérament, son parcours et ses exploits à travers l’histoire. Winston Churchill, né Winston Leonard Spencer-Churchill, aurait porté à bout de bras la Grande-Bretagne et surtout, surtout, sauvé l’Europe du nazisme. Il aurait été l’un des très rares hommes politiques britanniques à juger à juste titre la menace d’Hitler au cours de la période la plus dangereuse pour la démocratie durant la Seconde Guerre mondiale.

Né dans une famille aristocratique et conservatrice, Churchill ambitionne très vite de réussir en politique. Il poursuit ainsi une carrière militaire, participe à des guerres, est élu député durant la majeure partie de sa carrière politique, et plus tard nommé à de nombreux postes ministériels. Darkest Hour, le film réalisé par Joe Wright (Atonement), prend son départ en ce fameux 10 mai 1940, où suite au lancement de l’attaque nazie contre les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg puis la France, Churchill est nommé Premier ministre pour la première fois, contre l’avis du roi et de l’establishment. Après que Neville Chamberlain a assumé son échec et présenté sa démission, ce guerrier-né aura pour mission de conduire la guerre. Dès le 13 mai, le Premier ministre élu compose un gouvernement et un cabinet de guerre et prononce son fameux discours « Du sang et des larmes » qui galvanise la population.

Et le cochon de Clemmie
Que serait Gabriel García Márquez sans Mercedes, ou John Lennon sans Yoko Ono, Federico Fellini sans Giulietta Massina ? Quels auraient été les destins de tous ces musiciens, artistes, cinéastes, écrivains et politiciens sans leurs épouses avisées, patientes, attentionnées, bonnes conseillères et amoureuses ? Peut-être juste des hommes comme les autres. Dans ce film, Wright réussit à reproduire une vision unique de Winston Churchill. Il invite le spectateur dans l’intimité de l’homme d’État (sortant du bain ou du lit à moitié nu), et outre le politicien audacieux et l’orateur confirmé, on fait la connaissance de Churchill, l’homme et mari.

Si son humour légendaire et son audace ont fait de lui l’un des dirigeants les plus populaires de l’histoire, il était aussi l’époux le plus aimé et le plus soutenu. Winston Churchill est certainement devenu Churchill le lion grâce à son épouse, Clementine Hozier, son amie fidèle et alliée, toujours à ses côtés pour le relever de ses doutes et de ses multiples dépressions, tout en n’hésitant pas à critiquer ses décisions politiques. Ce politicien inflexible, ce lion se métamorphosait alors en un homme docile et attentif, en « petit cochon », comme elle aimait à le surnommer le soir, entre un troisième verre de whisky et deux coupes de champagne. Alors que les femmes de chef d’État ont du mal à trouver la juste mesure entre effacement et influence, Clementine affirme sa place, fidèle à ses convictions et à ses certitudes. Si le tempérament du vieux lion, connu pour ses coups d’éclat, lui fait imposer ses idées et forcer le respect, ce caractère fougueux avait pourtant ses désavantages. Clemmie était là, imperturbable et fière, pour faire la balance. Pour vivre avec ce monstre sacré de la politique, il fallait un tempérament d’acier. Avec le temps, elle optera pour une relation épistolaire. Ce fut la recette miracle ! Leur relation forte et passionnelle était basée par-dessus tout sur l’humour. À sa sortie d’une entrevue avec le roi, il déclare : « J’ai été royalement réprimandé », et à la question : « Comment pouvez-vous boire si tôt dans la journée ? » il répondra : « C’est une question de pratique. » Son humour à lui croisait celui de sa dame quand elle déclarait en plein branle-bas : « Nous n’avons plus de quoi payer la facture d’électricité. » Un état d’esprit qu’ils ont su conserver, même dans les heures les plus sombres.

Parce que Gary...
C’est ce Winston Churchill que le spectateur aura l’occasion de voir sous les traits d’un magnifique Gary Oldman méconnaissable derrière sa prothèse et son embonpoint. Refusant à 60 ans de prendre 20 kilos pour le rôle, il se laisse transformer par le spécialiste Kazuhiro Tsuji, et Winston Churchill se réincarne. Il s’approprie la voix et le verbe d’un des plus grands orateurs du XXe siècle, s’attaque à la gestuelle, s’empare du corps, manie le cigare à la perfection. Gary Oldman, dont on ne questionne pas une seconde le talent et qui était jusqu’à The Dark Knight le méchant de service (se souvenir de Léon de Luc Besson ou Air Force One), offre à voir dans le film de Joe Wright une prestation époustouflante qui lui a valu le Golden Globe et le met de plain-pied dans la course aux Oscars. Quant au rôle de Clementine, qui d’autre que Kristin Scott Thomas, avec sa coiffure et ses habits d’un autre âge, pouvait livrer bataille face au vieux lion ?


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