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Économie - Grille des salaires

Non-reconduction d’exonérations fiscales : le secteur bancaire inquiet

La perspective d'une imposition des intérêts sur les prêts interbancaires et sur les dépôts des établissements à la Banque centrale inquiète les banques.

Les banques s’inquiètent notamment de l’adoption en décembre d’un arrêté du ministère des Finances. Jamal Saïdi/Reuters

Fortement mobilisé en 2017 contre certaines mesures fiscales adoptées en octobre par le législateur (loi n° 64) pour financer la nouvelle grille des salaires de la fonction publique entrée en vigueur deux mois plus tôt, le secteur bancaire est sur le qui-vive depuis fin décembre. Ses représentants craignent en effet que le ministère des Finances ne cherche à étendre, via un arrêté ministériel, l'impôt sur les intérêts bancaires à certains revenus habituellement exonérés.

« La décision visée par les banques est l'arrêté n° 1504/1 publié au Journal officiel le 28 décembre 2017. Ce texte modifie notamment les modalités d'application de l'impôt sur les intérêts bancaires mis en place par la loi de finances de 2003, et qui est passé de 5 à 7 % avec l'adoption de la loi n° 64 », indique à L'Orient-Le Jour l'avocat fiscaliste Karim Daher.

 

« Fortement pénalisé »
« Les banques sont inquiètes car l'arrêté ne mentionne pas de façon explicite l'exonération dont bénéficiaient les banques depuis 2003 pour leurs revenus issus des intérêts sur tous leurs dépôts auprès de la Banque du Liban (BDL) ou ceux des prêts interbancaires », poursuit-il. Le premier de ces aménagements avait été mis en place par la loi de finances de 2003 ; le second par un arrêté du ministre des Finances de l'époque, Fouad Siniora, qui avait suivi les recommandations du secteur bancaire. Aujourd'hui, ni la loi ni l'arrêté ne les mentionnent. Les deux seules exonérations explicitement maintenues sont celles qui concernent les dépôts à la BDL du gouvernement, des municipalités et des autres entités publiques ; ainsi que ceux effectués par les représentations diplomatiques et consulaires de pays étrangers.

Une perspective très préoccupante pour des banques qui ont encore du mal à digérer la hausse de deux points de l'impôt sur les intérêts bancaires mise en place par la loi n° 64 et qui s'applique à tous les revenus de ce type générés depuis l'entrée en vigueur de la loi, fin octobre. Le sujet était à l'ordre du jour d'une réunion exceptionnelle de l'Association des banques (ABL), lors de la première semaine de janvier, au cours de laquelle ses membres ont également fait part de leurs inquiétudes au gouverneur de la BDL, Riad Salamé. « Le secteur va être fortement pénalisé si ces deux exemptions ne sont pas réintégrées, d'autant plus que cette situation n'était pas prévue », constate le directeur du département de recherche du groupe Byblos Bank, Nassib Ghobril. S'il n'a pas pu fournir – dans l'immédiat – d'indications concernant le montant des prêts interbancaires dont les revenus pourraient être imposés, il précise toutefois que les dépôts des établissements bancaires à la BDL totalisaient environ 101 milliards de dollars à la fin de novembre dernier – entre dépôts volontaires, certificats de dépôts émis par la Banque centrale ou encore réserves obligatoires.

Contactée par L'Orient-Le Jour, l'ABL n'a pas souhaité réagir. Enfin, si la suppression de ces exemptions n'est pas définitivement entérinée, les moyens de les réintégrer formellement avant que les banques ne règlent leurs impôts à l'administration fiscale (en mai) sont limités. « Comme elles ne sont pas inscrites dans la loi, le ministère des Finances ne peut pas adopter un arrêté pour le faire. Il faudrait donc en principe que le Parlement adopte une loi revêtant le caractère de double urgence qui remette ces exemptions en place. Il peut également modifier la disposition en votant le budget pour 2018 », explique Me Daher. Il note toutefois que « rien ne garantit que les députés se mobiliseront alors que les élections législatives ont lieu au printemps ». S'agissant de la loi de finances pour 2018, le ministère des Finances n'a toujours pas transmis l'avant-projet de budget au gouvernement, qui aurait dû, de son côté, le renvoyer finalisé au Parlement avant fin novembre, selon la Constitution.

Un autre « solution pratique », selon Me Daher, serait de réintégrer ces exemptions à travers une directive du ministère des Finances adressée aux contrôleurs fiscaux. « C'est possible vu que les intérêts des dépôts des banques à la BDL ou ceux sur les prêts interbancaires peuvent, en l'absence de disposition contraire, entrer dans le champ d'application des articles 8 et 70 de la loi sur l'impôt sur le revenu, et être considérés comme des revenus réalisés dans le cadre de l'activité principale. Ils pourront donc sortir du cadre des exemptions devant être expressément énumérées par la loi n° 64 ou l'arrêté 1504/1 qui l'a suivie et être réintégrés au moyen d'une directive », conclut-il.

 

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