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Liban - Camps palestiniens

Aïn el-Héloué une nouvelle fois en émoi après l’assassinat de Mahmoud Hajir

Le camp palestinien de Aïn el-Héloué, lors des derniers affrontements. Mahmoud Zayyat/AFP

Les choses risquent fort de dégénérer à Aïn el-Héloué, après l'assassinat, hier, de Mahmoud Hajir, un civil palestinien de 55 ans, présenté d'abord comme un membre du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP). La victime n'est pourtant qu'un simple habitant de ce camp palestinien de Saïda, un chauffeur de taxi également commerçant, hostile aux groupuscules terroristes et à Bilal Badr en particulier. Le FPLP a d'ailleurs formellement démenti son affiliation à ce parti proche du Fateh.

Dans les détails, le malheureux a été assassiné dimanche d'une balle dans la tête, au carrefour du marché aux légumes, par un homme armé et cagoulé. Il est mort sur le coup. Le drame a créé un mouvement de panique dans ce camp palestinien qui abrite 90 000 habitants environ, en comptant les réfugiés en provenance de Syrie. Des coups de feu ont été entendus. Les commerces ont aussitôt baissé leurs rideaux. Une source informée proche du dossier ayant requis l'anonymat décortique les développements pour L'Orient-Le Jour.

Une histoire ancienne

« L'affaire a des antécédents », affirme l'expert. Elle est le résultat d'une « accumulation de tensions » entre cet ancien habitant de Tireh et les hommes de Bilal Badr, ce responsable de groupuscules islamistes jihadistes « recherché mort ou vif », qui avaient installé leur QG dans ce quartier. En avril 2014, lorsque Ala' Hajir avait été assassiné, Mahmoud Hajir, son oncle, avait accusé les hommes de Bilal Badr du meurtre. Rebelote en 2016, après l'assassinat de Simon Taha, un informateur des autorités libanaises, qui était aussi le beau-frère de Mahmoud Hajir. Ce dernier a une nouvelle fois montré du doigt Bilal Badr et ses partisans. Résultat, les milices terroristes de Bilal Badr ont tôt fait de chasser Mahmoud Hajir du quartier de Tireh. Ils ont aussi occupé sa maison. C'était en 2017, juste avant les affrontements armés (entre les milices extrémistes et les Forces conjointes palestiniennes de sécurité) qui ont agité le camp palestinien de Aïn el-Héloué, et plus particulièrement le quartier de Tireh, d'abord en avril puis en août 2017. « Il est clair que Mahmoud Hajir en voulait à la formation de Bilal Badr », explique l'expert.

La confrontation entre Mahmoud Hajir et le groupuscule terroriste s'est envenimée, samedi, après que les Forces conjointes palestiniennes de sécurité eurent remis l'islamiste Sari Hajir aux services de renseignements de l'armée du Liban-Sud. L'homme était considéré comme « la boîte noire » de Bilal Badr, ce qui constitue « un coup dur » pour le chef de la cellule terroriste. Toujours selon la source, Mahmoud Hajir n'a pas manqué de « laisser éclater sa joie » à l'issue de l'arrestation de l'homme qui était activement recherché par la justice. « Il a multiplié les messages sur WhatsApp, affirmant que le fugitif l'avait bien mérité. » Et comme les nouvelles arrivent vite, « ces messages sont rapidement parvenus à Bilal Badr ».
« Le suspect numéro un du meurtre de Mahmoud Hajir est aujourd'hui le second de Bilal Badr. On le surnomme Joker. » L'assassin présumé est aussi « soupçonné d'avoir perpétré les deux assassinats de Ala' Hajir et Simon Taha ». « La victime n'appartenant à aucun parti, on ne devrait pas s'attendre en principe à des représailles », estime l'analyste. « Mais l'histoire ne semble pas pour autant terminée, poursuit-il. Les yeux sont aujourd'hui braqués sur la situation sécuritaire à Aïn el-Héloué. »

Le mot d'ordre

Il faut dire que depuis l'accord qui a mené à la formation d'une Force conjointe palestinienne, et avec la réconciliation interpalestinienne entre le Fateh et le Hamas, il y a comme « une décision tacite d'épargner le camp et de lui éviter une bataille de plus, et donc la destruction de quartiers populaires d'une grande densité ». Sans oublier qu'avec la démission de Saad Hariri, il est « hors de question de sombrer dans une nouvelle crise », soutient-il. « Une opération ciblée pourrait donc être engagée », et plus particulièrement « une intervention contre les hommes de Bilal Badr », aujourd'hui retranchés avec leur chef dans le quartier de Menchieh, au même titre que son allié, Bilal Arkoub, après avoir été poussés hors de Tireh. « Cette opération sécuritaire et non militaire, qui serait dirigée par le Fateh sous couvert des Forces conjointes palestiniennes, a l'aval de toutes les forces sur le terrain », note l'expert.

Il faut dire aussi que le contexte s'y prête, avec l'arrestation notamment de Kamal Badr, frère de Bilal Badr, qui s'est récemment rendu aux autorités libanaises, parmi d'autres cadres de la formation terroriste.
Les réactions n'ont pas tardé, unanimes. « Nous ne permettrons pas que reprennent les assassinats dans le camp », a martelé le commandant des Forces palestiniennes conjointes, le colonel Bassam Saad, lors d'une réunion extraordinaire qu'il a présidée. Il a fait part de « la détermination des Forces palestiniennes conjointes, avec l'approbation de tous, à arrêter les coupables et à les remettre aux autorités libanaises ». Il s'est dit de plus soucieux « de préserver la sécurité des habitants et la stabilité de Aïn el-Héloué et de son environnement libanais ». Mêmes condamnations de la part du Comité populaire palestinien et du Commandement politique palestinien de Saïda pour lesquels « ce meurtre n'est autre que l'assassinat de la sécurité, de la stabilité et du climat d'entente à Aïn el-Héloué ».

 

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