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Liban - Services publics

Chaos routier : vers un réseau de transport public structuré ?

À l'issue d'un cycle de conférences, ingénieurs et experts se sont relayés pour tenter de résoudre la question du chaos persistant sur les routes libanaises.

Quatre jours durant, un panel composé d'experts s'est réuni la semaine dernière à l'ordre des ingénieurs et architectes de Beyrouth afin d'apporter des réponses aux grands enjeux urbanistiques d'aujourd'hui et de demain. Ils ont abordé plusieurs grands thèmes relatifs à l'aménagement du territoire, la question des transports, la problématique du développement durable du littoral et la gestion des grandes agglomérations.

Dans un premier temps, les experts ont développé des plans techniques envisageables à moyen terme à l'échelle du Liban. Concernant la problématique du trafic routier à Beyrouth, diverses propositions concrètes ont émergé au sein du panel d'ingénieurs. La majorité des intervenants a voulu donner plus d'espace au bien-être humain en réduisant l'utilisation de la voiture, et par conséquent le trafic routier. Pour l'urbaniste Habib Debs, interrogé par L'Orient-Le Jour, « créer plus de routes, c'est créer plus de places de parking, et cela amènera encore plus de voitures. C'est un cercle vicieux qui ne peut pas être résolu de cette manière. La plupart des villes sont en train d'interdire l'accès des voitures à leurs centres-villes », a-t-il argumenté.
Comment dès lors « retirer » aux Libanais leurs voitures, en l'absence de réseaux de transport efficaces, tels que des stations de métro et de tram? C'est tout l'enjeu actuel, la capitale ayant déjà dépassé le « point de saturation ».

 

(Lire aussi : Transport public déficient et bouchons quotidiens : deux milliards de pertes par an)

 

Des bus à haut rendement envisagés
Novatrice, l'idée de bus à haut niveau de service (BHNS) a été longuement discutée. Ces bus prioritaires voyageraient en site propre, avec une forte fréquence de passage (toutes les 5 à 10 minutes), ce qui permettrait d'obtenir un rendement important.
Transposer ce projet du papier à la réalité est-il pour autant envisageable ? Oui, estiment les conférenciers.

Ce plan de mobilité est financé par la Banque mondiale et étudié par le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR). Le problème principal concerne la jonction à faire entre l'entrée et l'intérieur de Beyrouth. « Au niveau intra-muros, il existe des tractations entre la municipalité et Solidere, qui ne voit pas ça d'un très bon œil. La solution n'est peut-être pas esthétique, mais ne pas le faire, c'est réduire l'efficacité du système. Si le réseau s'arrête aux portes de Beyrouth, cela ne servira à rien », affirme Habib Debs.
Le plan prévoit également la création de nouvelles gares routières, à l'instar de la gare Charles Hélou. Le coût du système BHNS est à la portée des pouvoirs publics, selon les ingénieurs. Concrètement, si la ligne de transport en commun voit le jour entre Jounieh et Beyrouth, il y aura des arrêts à Antélias, Jal el-Dib, Zalka, etc.

Clairement, la priorité semble de laisser la place à des mobilités douces. L'urbaniste souligne aussi que « pour que les gens se déplacent en vélo, il faut les protéger, c'est-à-dire aménager l'espace entièrement, et non se contenter de tirer une ligne blanche sur le sol », explique-t-il, faisant allusion à la très réduite piste cyclable du centre-ville.

 

(Lire aussi : Avec « Sawwarnak », la verbalisation se fait à la volée)

 

Un plan pour rétrécir la rue de Damas
À moyen terme, une partie de la rue de Damas sera rétrécie en largeur et des travaux de réfection de la chaussée laisseront plus d'espace aux piétons. L'objectif principal étant de créer une « liaison douce » à l'entrée de Beyrouth, entre le Bois des pins et le centre-ville. « J'ai présenté ce projet qui a été approuvé par le conseil municipal de Beyrouth. L'idée est de pouvoir diminuer sur cet axe la part revenant aux voitures. Il y a plus de 4 000 élèves qui fréquentent cette rue, chaque jour. Elle n'est plus une ligne de front, et ce projet serait également une révolution pour les mentalités », explique M. Debs.

Les études de trafic ont démontré que l'avenue Béchara el-Khoury, avec son tunnel, permet d'absorber ce qui passait par la rue de Damas. Souhaitant une révision des priorités sur les grands axes de la ville, le conseil municipal a travaillé conjointement avec la région Île-de-France. Les études d'avant-projet sont à présent terminées et les plans d'exécution sont lancés. « Si ce projet est concluant, il sera reproduit dans d'autres espaces de la capitale », assure Habib Debs, responsable de ce projet.

Mais pour mener à bien ces projets, l'absence de coordination globale a été pointée du doigt comme un obstacle majeur. Selon les experts, il faut créer une autorité administrative qui couvre le Grand Beyrouth, de Jiyeh jusqu'à Antélias. « C'est une condition sine qua non pour harmoniser l'urbanisation avec le système de transport. Aujourd'hui, si on veut gérer le transport public efficacement, c'est à l'échelle intercommunale que cela doit se faire », insiste Habib Debs.

En outre, l'urbaniste estime que l'ère des autoroutes urbaines est bel et bien enterrée, partout dans le monde, et que le Liban ne pourra y échapper. Si ce point de vue fait désormais consensus parmi les experts, il faudra maintenant convaincre les autorités politiques de l'urgence d'une prise en main des questions de mobilité.
Avec ces nouvelles propositions concrètes, les ingénieurs et experts du dossier espèrent voir de leur vivant la fin du règne de la voiture au Liban.

 

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