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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Calais, une crise sans fin

Alors qu'il reste plusieurs centaines de personnes dans le camp, quelques toilettes et robinets ont été installés hier par les autorités françaises.

Des migrants marchant vers le port de Calais pour aller en Angleterre, le 17 juin 2015. Archives/Philippe Huguen/AFP

Bien moins médiatisée qu'avant le démantèlement du camp en octobre dernier, la crise des migrants continue à Calais. Les autorités françaises ont certes commencé hier à mettre en place les premiers dispositifs prévus par la décision du tribunal administratif de Lille, confirmée le lundi 31 juillet par le Conseil d'État.

Mais, pour le moment, seuls dix toilettes et cinq robinets ont été installés. Selon la préfecture, « des latrines, des citernes d'eau et des points d'eau » seront également prochainement mis à disposition dans un autre quartier périphérique. « Le dispositif mis en place est minimaliste, moins que ça, c'est impossible, cinq robinets en plein air pour 600 personnes (...), ce n'est pas sérieux », a très vite dénoncé Vincent de Coninck, chargé de mission de l'association Secours catholique, interrogé par l'AFP. Les associations présentes sur place sont d'autant plus insatisfaites que la décision de justice prévoit l'installation de toilettes, de points d'eau et de douches pour les personnes vulnérables. « L'interprétation qui est faite de l'ordonnance du Conseil d'État et de la décision du tribunal administratif nous inquiète. On espère que ce n'est qu'un premier pas, qui est largement insuffisant », a insisté Vincent de Coninck.

De son côté, la mairie demeure toujours plus que réservée quant à ces dispositifs, bien que situés en dehors de la ville. Suite à la confirmation du Conseil d'État, la maire de Calais, Natacha Bouchart, avait déclaré qu'elle refuserait de donner suite aux injonctions qui lui ont été faites, par crainte de voir émerger un nouveau camp au sein de sa ville. « Je ne puis accepter de mettre en place des installations qui réuniraient à nouveau les conditions de création de campements, de bidonvilles et de points de fixation. En réalité, il m'apparaît que la solution consistant à venir en aide aux migrants suppose avant tout leur départ vers des centres adaptés, et c'est à l'État d'avoir une réponse claire à ce sujet », a-t-elle déclaré dans un communiqué. « C'est ridicule car Calais est un point de fixation en raison de sa localisation », rétorque Maya Konforti, bénévole à l'association L'Auberge des migrants.

 

(Pour mémoire : La France veut éviter un "appel d'air" à Calais)

 

« Une jungle dispersée, sans toit »
Depuis l'évacuation puis le démantèlement de la « jungle » en octobre dernier, rien n'a vraiment changé. Pour de nombreuses associations, la situation se serait même dégradée. Si la disparition des camps a entraîné une réduction considérable du nombre de migrants présents sur place – les ONG et la préfecture estimant entre 450 à 700 le nombre de migrants encore présents sur place contre 7 000 personnes au moment du démantèlement –, ces derniers sont désormais disséminés un peu partout dans la ville et vivent dans des conditions toujours plus précaires tant sur le plan matériel que sanitaire.
« Aujourd'hui, à Calais, nous avons une jungle dispersée sans toit dans le sens où les gens dorment dans la rue, sous un arbre, sous un pont, un peu partout. Ils n'ont plus d'abri. Il n'y a plus de petites épiceries, d'éclairage, la police les chasse », résume la bénévole. Autre signe que la situation demeure fragile : un nouveau migrant, originaire d'Afrique subsaharienne, a trouvé la mort jeudi 4 août dans la commune de Marck, aux alentours de Calais, après avoir été percuté par une voiture sur l'autoroute alors qu'il essayait de se rendre en Angleterre.

Face à cette situation, les Calaisiens apparaissent divisés. Si certains se montrent réfractaires à la présence des migrants, comme en témoignent les récentes pétitions s'opposant au retour des migrants à Calais publiées sur le site MesOpionions.com, d'autres « logent des migrants, ouvrent la porte de la maison pour leur permettre de prendre une douche. Sans cela, ils ne pourraient plus se laver depuis des mois ». Et les cinq robinets installés en dehors de la ville paraissent dérisoires pour pallier une telle situation.

 

Vers une résolution ?
Fortement attendue, la visite du ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, le vendredi 23 juin dernier, avait fortement déçu les associations œuvrant à Calais. « À chaque fois qu'on a construit un centre, il y a eu appel d'air », avait expliqué le ministre présent sur place, réfutant ainsi l'idée de la construction de nouveaux centres d'accueil dans la région avant de rétropédaler un mois plus tard en annonçant la création de deux centres d'hébergement de migrants dans les Hauts-de-France.

Il faut dire que ce refus avait entraîné de vives réactions tant de la part des ONG que du défenseur des droits Jacques Toubon qui avait alors dénoncé les atteintes « sans précédent » aux droits des migrants à Calais. « C'est la réalité migratoire et la proximité de la Grande-Bretagne qui favorisent ces regroupements plus que l'existence de points d'eau », avait alors affirmé le rapporteur public, à l'instar des ONG.
Pour l'heure, aucune réelle solution ne semble se dessiner. « Le seul moyen de résoudre définitivement cette crise serait d'ouvrir la frontière entre la France et l'Angleterre, avance Maya Konforti. C'est tout simplement scandaleux de penser que c'est une petite ville de France qui doit gérer des milliers d'exilés souhaitant aller en Angleterre. »

 

Pour mémoire

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Bien moins médiatisée qu'avant le démantèlement du camp en octobre dernier, la crise des migrants continue à Calais. Les autorités françaises ont certes commencé hier à mettre en place les premiers dispositifs prévus par la décision du tribunal administratif de Lille, confirmée le lundi 31 juillet par le Conseil d'État.
Mais, pour le moment, seuls dix toilettes et cinq robinets ont...

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