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Moyen Orient et Monde - Diplomatie

L’Allemagne frappe la Turquie au portefeuille

Ankara dénonce « le chantage et la menace » de Berlin.

Le ministre allemand des Affaires étrangères, Sigmar Gabriel, a accusé hier Ankara de violations systématiques de l’État de droit et jugé qu’elles « éloign(ai)ent la Turquie du socle des valeurs européennes » et de celles de l’OTAN. Kay Nietfeld/DPA/AFP

L'Allemagne, excédée par l'interpellation de défenseurs des droits de l'homme à Istanbul, a annoncé hier une « réorientation » de sa politique vis-à-vis de la Turquie, avec des mesures qui risquent de pénaliser économiquement son partenaire historique. La première d'entre elles est une mise en garde du ministère des Affaires étrangères pour les voyages en Turquie, destination traditionnellement très prisée des vacanciers allemands. Et ce en pleine saison touristique. Au-delà, les mesures envisagées à Berlin incluent un réexamen des garanties, prêts ou aides qu'apporte le gouvernement allemand ou l'UE aux exportations ou aux investissements dans le pays. Berlin a aussi laissé planer la menace d'une réduction des fonds européens que perçoit Ankara dans le cadre de ses négociations d'adhésion à l'UE : 4,45 milliards d'euros prévus entre 2014 et 2020.
Le chef de la diplomatie allemande, Sigmar Gabriel, a accusé Ankara de violations systématiques de l'État de droit et jugé qu'elles « éloign(ai)ent la Turquie du socle des valeurs européennes » et de celles de l'OTAN. Elles ne peuvent « pas rester sans conséquences », a-t-il dit. Une position qualifiée aussi de « nécessaire et indispensable » par la chancelière Angela Merkel. La Turquie a aussitôt dénoncé la démarche de Berlin. « Nous voulons continuer à voir en l'Allemagne un pays allié et ami. Nos relations ne sauraient être basées sur le chantage et la menace, mais doivent être régies par les normes et principes internationaux », a déclaré le ministère turc des Affaires étrangères dans un communiqué. « Tenter d'éveiller des doutes dans l'esprit des investisseurs allemands, c'est inacceptable », a dit pour sa part Ibrahim Kalin, porte-parole du président turc Recep Tayyip Erdogan.
En effet, hier, les entreprises allemandes ont dit s'attendre à un repli de leur volume d'affaires en Turquie, déjà en baisse depuis le putsch raté de 2016. « Dans la situation actuelle, on ne peut conseiller à aucune entreprise d'investir en Turquie (...). La perte de confiance est énorme », a estimé André Schwarz, porte-parole de la fédération des exportateurs allemands. En outre, hier aussi, l'hebdomadaire allemand Die Zeit a révélé qu'Ankara a remis à Berlin une « liste noire » d'entreprises – dont des multinationales – accusées de soutenir l'opposition. L'information a été confirmée par M. Gabriel. Mais le vice-Premier ministre turc, Mehmet Simsek, a déclaré que « c'était complètement faux ».

La mesure de trop
La décision allemande de frapper financièrement la Turquie intervient en réaction immédiate à la mise en détention d'un défenseur allemand des droits de l'homme, avec cinq autres militants – dont la directrice d'Amnesty International en Turquie. « La mesure de trop », dit un diplomate. La justice turque a accusé Peter Steudtner d'avoir « commis un crime au nom d'une organisation terroriste ». Une expression qui désigne le plus souvent, pour les autorités turques, les partisans du prédicateur Fethullah Gülen, accusé d'avoir fomenté le putsch manqué du 15 juillet 2016, et les séparatistes kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Sigmar Gabriel a jugé ces accusations « injustifiées ».
Au total, neuf Allemands, dont quatre ayant également la nationalité turque, sont aujourd'hui détenus en Turquie. Parmi eux, Deniz Yücel, un journaliste germano-turc, correspondant du quotidien allemand Die Welt, placé à l'isolement depuis près de cinq mois. Selon plusieurs journaux allemands, les personnes incarcérées « servent systématiquement d'otages » à Ankara, qui espère les échanger contre des Turcs réfugiés en Allemagne car soupçonnés par leur pays d'être proches du mouvement Gülen. Selon Bild, M. Erdogan a même proposé « d'échanger » le journaliste de Die Welt contre deux ex-généraux de l'armée turque réfugiés en Allemagne.

Source : AFP

L'Allemagne, excédée par l'interpellation de défenseurs des droits de l'homme à Istanbul, a annoncé hier une « réorientation » de sa politique vis-à-vis de la Turquie, avec des mesures qui risquent de pénaliser économiquement son partenaire historique. La première d'entre elles est une mise en garde du ministère des Affaires étrangères pour les voyages en Turquie, destination...

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