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Moyen Orient et Monde - Climat

L’Amérique de Trump sort de l’accord de Paris et... s’isole

La Chine pourrait se retrouver propulsée au premier rang des négociations environnementales.

« L’heure est venue de quitter l’accord de Paris. » Jeudi soir, Donald Trump a lancé une nouvelle bombe en annonçant, après des semaines d’atermoiements, mais conformément à une promesse de campagne, que les États-Unis sortaient de l’accord de Paris sur le climat. Lors de sa conférence de presse, M. Trump a assuré, geste à l’appui, que le retrait de son pays n’aurait « pas beaucoup d’impact » sur le climat. Les États-Unis sont le deuxième émetteur mondial de gaz à effet de serre, derrière la Chine... Saul Loeb/AFP

Donald Trump aura su maintenir le suspense jusqu'au bout. Depuis plusieurs semaines, le président climato-sceptique a fait planer, à coups de tweets et de déclarations, le mystère quant à une éventuelle sortie des États-Unis de l'accord de Paris sur le réchauffement climatique. Hier soir, tenant une promesse de campagne, il s'est finalement décidé.

Face aux journalistes réunis dans les jardins de la Maison-Blanche, le président américain a enterré le travail de son prédécesseur. Exit l'accord multilatéral historique scellé fin 2015 dans la capitale française, dans le cadre de la Cop21, visant à limiter la hausse de la température moyenne mondiale.

« Afin de remplir mon devoir solennel de protection de l'Amérique et de ses citoyens, les États-Unis se retireront de l'accord de Paris sur le climat », a ainsi annoncé Donald Trump. Assurant que le retrait de son pays n'aurait « pas beaucoup d'impact » sur le climat, il a martelé qu'il ne voulait « rien qui puisse se mettre en travers » de son action pour redresser l'économie de son pays. « J'ai été élu pour représenter les habitants de Pittsburgh, pas de Paris », a ajouté, sous des applaudissements nourris, le président septuagénaire qui a mis en avant la défense des emplois américains.

Washington, a-t-il néanmoins ajouté, va entamer des négociations, ou bien pour revenir dans l'accord de Paris, ou bien pour « entrer dans une nouvelle transaction sur des termes qui soient équitables pour les États-Unis, leurs entreprises, leurs salariés, leur population, leurs contribuables ». L'option de la renégociation a néanmoins été écartée dès hier soir par Paris, Berlin et Rome.

 

(Voir ici les réactions à travers le monde)

 

Lors de la campagne, le candidat à la présidence n'avait pas hésité, au nom de la défense « des emplois », à remettre en cause le principe même du changement climatique, le qualifiant notamment de « canular chinois », alors que les États-Unis sont le deuxième émetteur mondial de gaz à effet de serre, derrière (justement) la Chine.

 


En choisissant de se retirer de l'accord de Paris, Donald Trump privilégie « l'option du milieu », estime Corentin Sellin, professeur d'histoire à Paris et spécialiste de la politique américaine, interrogé par L'Orient-Le Jour. D'un côté, il rassure sa base électorale, notamment « l'Amérique blanche et rurale attachée aux énergies fossiles », et de l'autre il évite le cataclysme d'une sortie sans négociations. Car si Donald Trump a déclaré que la sortie était effective à compter de sa déclaration, la procédure est tout autre. Pour se retirer de l'accord, un pays doit le notifier au secrétariat de la Convention climat de l'ONU (CCNUCC), mais seulement trois ans après l'entrée en vigueur du texte, effective depuis le 4 novembre 2016. Ensuite, il y a un préavis d'un an avant d'être réellement « sorti » de l'accord.

 

(Repère : Climat : cinq choses à savoir sur l'accord de Paris)


En d'autres termes, si le 45e président des États-Unis peut invoquer l'article 28 de l'accord de Paris, qui permet aux signataires d'en sortir, cette sortie ne deviendra effective qu'en 2020, soit à la fin de son mandat. Quand à ses déclarations particulièrement floues en vue d'une possible renégociation de l'accord, elles restent, selon Corentin Sellin, « très caduques » au vu du caractère non contraignant de l'accord.

En décidant de se retirer, Donald Trump nourrit de nouveau le clivage entre les « États américains urbains et littoraux pro-environnement et l'Amérique dite de l' "intérieur" ». Un pari risqué, car s'il a décidé de renégocier l'accord, Donald Trump ne peut engager tous les États de l'union. Certains, comme la Californie et New York, ont déjà annoncé, par la voie de leur gouverneur, qu'ils continueront à adopter les mesures de l'accord.

 

 

Une Amérique isolée
Au-delà de la scission intérieure, consacrée aussi par le fait que de nombreuses entreprises ont commencé à titre privé à s'adapter aux exigences de l'accord de Paris, Donald Trump impose, par son isolationnisme, à son pays une position inconfortable sur la scène internationale. Avant sa prise de parole, la Chine et l'Union européenne étaient déjà montées au créneau ces derniers jours pour défendre l'accord qui vise à contenir la hausse de la température moyenne mondiale » bien en deçà « de 2°C par rapport à l'ère pré-industrielle. Depuis Berlin, où il rencontrait en début de semaine la chancelière allemande Angela Merkel, le chef du gouvernement chinois, Li Keqiang, avait assuré que son pays tiendrait ses engagements. Pékin a été, avec l'administration américaine de Barack Obama, l'un des principaux artisans de cet accord sans précédent.
Par cette décision, les États-Unis perdent ainsi leur place de leader dans les négociations climatiques. Après l'annonce de M. Trump, son prédécesseur démocrate Barack Obama a rappelé que l'accord-climat de Paris n'avait vu le jour que grâce au « leadership américain sur la scène mondiale ». Le chef de la diplomatie américaine d'alors, John Kerry, l'un des artisans de l'accord de Paris, a également tonné dans un communiqué contre un « renoncement sans précédent au leadership de l'Amérique que l'on va payer en termes d'influence » internationale.

 

(Repère : Dérèglement du climat : des signes toujours plus alarmants)


« Les États-Unis sont les premiers punis car ils donnent à l'Europe et aux Chinois l'occasion de se replacer au sommet des négociations », estime Arnaud Gossement, avocat spécialisé du droit de l'environnement. M. Trump offre le trône des négociations à la Chine, « un cadeau inespéré », selon Corentin Sellin.
Pour Sébastien Duyck, conseiller juridique au Center for International Environmental Law (CIEL), c'est la crédibilité américaine dans les négociations internationales, et même diplomatiques, qui est en jeu. « En quittant un accord auquel son pays a participé (en tant qu'initiateur), Donald Trump envoie sans le vouloir un signal aux autres puissances : un pays qui négocie un accord aussi majeur puis qui s'en retire (après un changement d'administration) n'est pas un pays avec qui d'autres nations veulent s'engager », conclut-il.

 

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commentaires (3)

Rétrospectivement, on a le sentiment qu'Obama a pas mal perdu son temps à la maison-blanche...

LeRougeEtLeNoir

09 h 14, le 02 juin 2017

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Commentaires (3)

  • Rétrospectivement, on a le sentiment qu'Obama a pas mal perdu son temps à la maison-blanche...

    LeRougeEtLeNoir

    09 h 14, le 02 juin 2017

  • L’Amérique orgueilleuse de Trump en sortant de l’accord de Paris ne cesse et ne cessera d’étonner le monde de sa suprématie. Bizarre.

    Antoine Sabbagha

    09 h 04, le 02 juin 2017

  • Décision intelligente de Mister Trump ! car d'un coté , les USA ont tous les moyens scientifiques et technologiques pour lutter à leur niveau et à leurs vitesse , contre les effets du dérèglement climatique, et de l'autre, désormais la Chine remporte la 1ère place du classement biseauté des pollueurs ...!

    M.V.

    07 h 19, le 02 juin 2017

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