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À La Une - Reportage

En Syrie, une course de chevaux pour oublier la guerre

L'association "L'aube des chevaux arabes" s'inquiète de l'impact du conflit sur la tradition d'élevage des purs-sangs arabes.

Sur le dos de son cheval, Mounzer soulève sa coupe dorée, tout fier d'avoir gagné une course hippique organisée le 12 mai 2017 dans la province d'Alep, un évènement rare en territoire rebelle dans la Syrie en guerre. AFP / Omar Haj Kadour

Sur le dos de son cheval, Mounzer soulève sa coupe dorée, tout fier d'avoir gagné une course hippique organisée ce mois dans la province d'Alep, un évènement rare en territoire rebelle dans la Syrie en guerre.

Dans une zone désertique, des dizaines d'hommes et d'enfants portant des keffiehs observent la vingtaine de cavaliers qui s'affrontent sous un soleil de plomb. A chaque passage des chevaux sur la ligne d'arrivée, les spectateurs tirent des coups de feu en l'air et dansent la dabké, danse traditionnelle au Moyen-Orient.

"C'est la première fois que je participe à une course de chevaux et j'ai gagné la première place!", se réjouit Mounzer Jahjah, 14 ans, l'un des plus jeunes jockeys de cette compétition organisée près du village rebelle d'Al-Bouayder, dans la province d'Alep (nord). L'adolescent, les cheveux en bataille, chaussant des tongs, a remporté la course grâce à sa jument Chams (soleil, en arabe), un pur-sang arabe décoré d'un tapis de selle multicolore.

Appréciés pour leur vitesse, leur endurance et leur beauté, les chevaux arabes sont l'une des plus anciennes espèces de chevaux au monde. Les tribus bédouines du nord de la Syrie pratiquent l'élevage de ces chevaux depuis des siècles, et ont réussi à préserver la pureté de cette race.

En 2010, la Syrie comptait environ 750 chevaux arabes d'élevage, selon l'Organisation mondiale des purs-sangs arabes (WAHO), qui recense ces chevaux à travers le monde. Mais depuis le début de la guerre en 2011, l'organisation n'a émis aucun nouveau rapport sur ce type de chevaux en Syrie.

Préserver les chevaux
A l'image du reste du pays, les chevaux ont été énormément touchés par le conflit qui a causé la mort de plus de 320.000 personnes en six ans. "De nombreux chevaux sont morts ou ont été blessés dans les bombardements", déplore Yahya al-Afandi, directeur de l'association "L'aube des chevaux arabes" qui a organisé la course. L'absence de soins vétérinaires et le manque de fourrage ont aussi causé de gros dégâts sur les chevaux, selon M. Afandi.

L'association, créée en 2016, s'inquiète de l'impact de la guerre sur la tradition d'élevage des purs-sangs arabes dans cette région contrôlée par les rebelles. "Depuis le début de la guerre, nous n'avons reçu aucune aide pour les chevaux, en termes de nourriture ou de médicaments", regrette M. Afandi.

Par ailleurs, "aucun cheval né dans les zones contrôlées par les rebelles n'a pu être enregistré depuis 2011" auprès de la WAHO, souligne-t-il, étant donné que l'organisation n'opère que dans les zones sous le contrôle du régime, où des courses et des compétitions sont régulièrement organisées.

"Notre objectif est de préserver la lignée des purs-sang arabes", explique Mohammed Naanaa, vice-président de l'association. Pour ce faire, l'association a entrepris de recenser elle-même les chevaux nés depuis 2011 dans les zones contrôlées par l'opposition, à l'image de la jument 'Chams'.

'Enracinée dans notre histoire'
En organisant cette course, l'association espère ainsi attirer l'attention de la WAHO. "L'équitation est enracinée dans notre histoire", plaide M. Naanaa, en référence à la popularité de ce sport en Syrie où des cavaliers vont jusqu'à participer aux Jeux olympiques.

Conformément aux préceptes de l'islam, les paris n'étaient pas autorisés pendant la course, qui s'est déroulée en deux tours: un pour les purs-sangs et le deuxième pour les chevaux hybrides.

Ramadan al-Issa, 34 ans, a remporté la course des chevaux hybrides avec son étalon surnommé "Bouraq", du nom de la jument ailée qui, selon la tradition musulmane, transporta Mahomet de Jérusalem au ciel. "C'est la troisième fois que je remporte la première place. C'est un sentiment indescriptible", confie cet habitant de la province voisine d'Idleb (nord-ouest), également aux mains des rebelles.

"Avant la guerre, il y avait des courses tous les ans", se souvient Moustafa al-Issa, 33 ans, venu de la région d'Idleb pour encourager Bouraq, l'un de ses chevaux préférés. "Aujourd'hui, il n'y en a que tous les deux ans environ", regrette-t-il. "Nous sommes très contents, ce festival nous a permis d'oublier un peu la guerre".

Sur le dos de son cheval, Mounzer soulève sa coupe dorée, tout fier d'avoir gagné une course hippique organisée ce mois dans la province d'Alep, un évènement rare en territoire rebelle dans la Syrie en guerre.
Dans une zone désertique, des dizaines d'hommes et d'enfants portant des keffiehs observent la vingtaine de cavaliers qui s'affrontent sous un soleil de plomb. A chaque passage des...
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