Ibrahim Chebli, le don de soi en faveur du développement durable

Ibrahim Chebli nous a quittés le 28 avril 2017 après une pénible agonie.
Je m'exprime en tant que compagnon de route d'Ibrahim Chebli depuis plus de 55 ans, et en tant que cofondateur de l'Ildes (Institut libanais de développement économique et social), l'institut dont Ibrahim Chebli était l'instigateur, l'inspirateur et le soutien essentiel pour venir en aide, de manière durable, aux victimes des guerres du Liban (1975-1990) et jusqu'à nos jours !
J'ai connu Ibrahim Chebli à la JEC (Jeunesse étudiante chrétienne) au début des années 60. Il devint secrétaire général de la JEC en 1963, et je devins la même année responsable de la branche universitaire de la JEC. Nous avions aussi milité ensemble au sein de l'UNUL (Union nationale des universitaires libanais) en 1963 et 1964. Dès cette période, Ibrahim Chebli était toujours très attaché au Liban et à l'action en faveur de la justice sociale et du développement durable et équilibré du Liban et des Libanais.
Dès son retour de ses études « postgraduate » en Allemagne, en 1967, il s'engage en tant que coordinateur du Mouvement social. Et à partir du début des guerres au Liban en 1975, il s'attelle à œuvrer pour secourir les victimes de guerre, à commencer par ses compatriotes de Mreijé, et ce dans divers domaines : éducation, dialogue islamo-chrétien, agriculture saine, aide caritative, projets de réhabilitation...
Après avoir subi, avec sa famille et les habitants de Mreijé, deux déplacements violents, le premier en 1975, suivi de celui définitif en 1983, il émigre avec sa famille vers l'Europe.
En France, il s'active à mobiliser l'appui et l'aide aux victimes des guerres du Liban.
En 1985, il œuvre au sein du Comité N-D du Liban à Paris, créé par la hiérarchie catholique française (Cardinal Decourtray), pour venir en aide au Liban. Il en devient le coordinateur en 1985.
En 1986, il lance avec deux de ces collègues, le Dr Khalil Abourjeyli et moi-même, l'Ildes dans le but d'aider les déplacés de guerre libanais à résister de manière durable aux affres qu'ils vivaient.
Son aide a été multiforme : médicale, sociale, éducative, promotion de l'emploi et des droits des déplacés, reconstruction de logements et d'infrastructures communautaires, enquêtes socio-économiques, études de faisabilité, études démographiques, promotion de microprojets économiques.
Ibrahim double son action en faveur des Libanais au Liban par des actions d'appui à partir de la France.
En 1989, il fonde avec le professeur René Raimond (président de la Fondation nationale des sciences politiques), le Comité d'action et d'information pour le Liban (CAIL) qui œuvre à faire connaître le problème libanais et à mobiliser des appuis en France pour la cause libanaise.
En parallèle, il crée en 1991 le Calif, Centre d'accueil libano-français, pour venir en aide aux Libanais déplacés vers la France et qui sont en difficulté.
De retour au Liban, après la fin des guerres, il continue à œuvrer dans le cadre de l'Ildes pour l'appui multiforme aux déplacés de retour dans leurs lieux d'origine.
En 1995, par sa contribution à l'organisation d'un colloque présynodal, il œuvre pour le synode pour le Liban, dans une optique inspirée de la vision évangélique de l'Église des pauvres.
De retour en France en fin des années 90, il y active ses réseaux d'appui multiforme au Liban, et depuis il partage son activité entre la France et le Liban.
À partir de 2008, il s'engage dans la Centrale des chrétiens d'Orient (CCO) pour appuyer et faire connaître les souffrances que subissent les chrétiens d'Irak, d'Égypte et bientôt de Syrie. Il apporte un support tangible aux activités de la CCO.
Depuis, il partagea son activité entre sa famille en France et le Liban. Sa santé commençait à décliner, jusqu'à son décès en France le 28 avril dernier.
Ibrahim nous a donné l'exemple d'une vie animée par sa générosité et son amour des autres : vie dédiée grandement au service des opprimés et des pauvres.
Il a été un grand patriote libanais et un vrai chrétien,
il repose en paix.