Depuis l'exécution de l'accord sur les quatre localités en Syrie (Madaya-Zabadani-Kfarya et Foua) et en particulier depuis la pacification de la région de Zabadani entre Damas et la frontière libanaise, les yeux sont tournés vers les jurds de Ersal et de Ras Baalbeck. Depuis samedi, l'armée libanaise effectue d'ailleurs des opérations régulières dans le secteur, la dernière en date ayant eu lieu dans la nuit de lundi à mardi et fait de nombreux morts chez les combattants adverses. Ces opérations sont considérées comme préventives et elles visent à empêcher les groupes armés, refoulés de la région de Zabadani, de se diriger vers le jurd de Ersal et ses environs.
Dans la plus grande discrétion et sans attendre les commentaires politiques, l'armée est donc en train d'exécuter un plan de sécurisation de la frontière au niveau de la Békaa-Nord. Mais, selon une source militaire, la poursuite de l'exécution de ce plan reste tributaire des développements en Syrie, concernant notamment les prochaines étapes de l'accord dit des quatre localités. Cet accord a été conclu entre l'armée syrienne et les groupes rebelles sous l'égide de la Russie et du Qatar. En effet, après des mois de négociations indirectes, des Qataris pris en otages en 2015 (dont des membres de la famille régnante) ont été relâchés, et, en même temps, les combattants et leurs familles ont pu être évacués de Madaya et de Zabadani, simultanément à un processus identique à Foua et Kfarya.
Si cet accord est exécuté sans incident, dans sa totalité et sans arrière-pensée, les combattants de Madaya et de Zabadani devraient se diriger vers Idleb, surtout ceux qui se battent sous les bannières de Fateh el-Cham (ex-Front al-Nosra) et du groupe État islamique. C'est en tout cas ce que prévoit l'accord conclu sous le parrainage russo-qatari. Dans ces conditions, l'armée libanaise n'aura pas besoin de mener une opération militaire de grande envergure dans les hauteurs de Ersal et de Ras Baalbeck. Elle pourrait donc se contenter des opérations ciblées qu'elle est en train de mener actuellement et qui lui permettent de neutraliser les éléments jhadistes, sans prendre trop de risques, ni faire trop de tapage et provoquer des réactions politiques.
Par contre, si l'exécution de l'accord est compromise, notamment concernant le plan du déplacement des combattants vers Idleb, il est fort probable, estime la source militaire, que l'armée syrienne et ses alliés (en particulier le Hezbollah) décident de lancer une grande offensive contre les combattants de Fateh el-Cham et ceux de Daech dans la région du Qalamoun syrien qui fait face aux jurds de Ersal et de Ras Baalbeck. Une telle offensive aurait certainement des répercussions sur le Liban, d'autant qu'il est fort probable que ces combattants décident de se replier vers le jurd libanais pour fuir l'avancée de l'armée syrienne et de ses alliés.
Selon la source militaire précitée, l'action actuelle de l'armée libanaise s'inscrit donc dans cette optique. Il s'agit de pacifier le maximum de superficie pour réduire les risques d'un repli des jihadistes refoulés de Zabadani vers cette région. Mais ces opérations préventives risquent d'être insuffisantes si l'armée syrienne lance sa grande offensive dans le territoire qui longe la frontière avec le Liban. La source militaire précitée estime que ce serait au gouvernement libanais de prendre alors la décision qui s'impose. Dans ce contexte, il faut aussi préciser que l'opération de samedi matin avait été menée à l'intérieur de Ersal, ce qui signifie que les éléments armés ont eu la possibilité d'entrer dans cette localité à partir du jurd.
S'il est certain que l'armée a réussi un beau coup de filet ce jour-là, précise la source militaire, il n'en reste pas moins que les combattants parviennent encore à se déplacer dans une vaste superficie qui pourrait même les mener jusqu'au camp palestinien de Aïn el-Héloué, où la situation reste particulièrement précaire et où la force de sécurité conjointe, composée de représentants de 16 factions palestiniennes, peine encore à imposer son autorité sur la totalité du camp. Il faut préciser à cet égard que le groupe de Bilal Badr n'a pas encore été démantelé et lui-même n'a pas encore été arrêté par la force de sécurité palestinienne, contrairement aux promesses faites en ce sens aux autorités libanaises. Pourtant, les informations qui parviennent aux services libanais précisent que Bilal Badr et son groupe se cachent dans le quartier dit « al-Tiry » à Aïn el-Héloué. Ainsi localisé, le groupe ne devrait pas être si difficile à arrêter, même si la force de sécurité argue de la présence massive de civils palestiniens dans ce secteur.
C'est dire que la situation sécuritaire reste compliquée au Liban en dépit des affirmations internationales d'attachement à la stabilité du Liban. C'est d'ailleurs dans ce contexte délicat que les familles des détenus islamistes partisans du cheikh salafiste Ahmad el-Assir recommencent à réclamer une amnistie générale en essayant d'exploiter la fibre sunnite.
commentaires (6)
L'armée devrait lancer une attaque d'envergure dans les jurds de ersal et de ras baalbeck qu'on en finisse avec ces histoires, et dans ce cadre Michel Aoun devrait officiellement demander à la Resistance d'intervenir aux côtés de l'armée. Le plus dur a été fait côté syrien, côté libanais il ne s'agit que des residus et il est temps de passer l'aspirateur
Chady
21 h 15, le 26 avril 2017