Pétulante. S'il ne devait rester qu'un mot, un seul, pour se souvenir de Josette Nahas, ce serait bien celui-là. Bien sûr, on pourrait le flanquer de cent et un dérivés, tout aussi judicieux et mérités : drôle, vive, smart, sémillante, coquette, coquine, etc. Épicurienne, aussi : elle adorait rire, Josette ; elle adorait s'amuser ; elle adorait se régaler. Ah, et généreuse, enfin. Généreuse, surtout. Parce qu'elle avait le cœur gros comme ça, Josette ; tellement gros, tellement empathique avec le cœur des autres, qu'il a fini par la lâcher. Le gueux.
Assistante de direction à L'Orient-Le Jour pendant près de quatre décennies, elle s'est dévouée comme rarement à ce journal qui était très vite devenu sa seconde famille. Pendant les pires années de la guerre civile, et souvent au péril de sa vie, elle assurait sa part du miracle quotidien : tous les matins, le journal était disponible dans les kiosques et auprès de nos abonnés. Elle assurait, avec un bonus inestimable : son sourire. Qui, au journal, parmi celles et ceux qui l'ont côtoyée chaque jour, ne se souvient pas, comme si c'était hier, du fameux sourire de Josette ? « Jojo, ma Jojo, c'est ainsi que je l'appelais, était mon rayon de soleil matinal, mon antistress des journées tumultueuses... », écrit Nagib Aoun. Qui ne se souvient pas de son rouge à lèvres, immuable, même sous les pires bombardements ? Qui ne se souvient pas de l'opulence de ses bonjours et de ses câlins quand l'un(e) de nous avait des bleus au cœur (encore lui...) ou à l'âme ? « Comme par un bon coup de purificateur d'atmosphère, elle arrivait à dissiper le trop-plein d'électricité dans l'air, à balayer l'angoisse des urgences... », insiste Issa Goraieb. Qui ne se souvient pas de son petit air mutin quand, sous les bombes, elle assurait, entre autres, la rubrique Horoscope : « Josette connaissait le signe astrologique de chaque collaborateur et s'inspirait de nos vies pour conclure de petits arrangements avec le destin », sourit encore Amine Abou Khaled.
Josette... Ton cœur lâche a affligé toutes celles et ceux, à Hamra, à Kantari, à Hazmieh, qui ont tant partagé avec toi. Là-haut, tu vas sans aucun doute faire danser tout le monde, sur un air de salsa, en t'assurant que les verres sont remplis, que les assiettes débordent de gâteaux à la crème et que les sourires illuminent chaque visage.
Nous t'aimons.
commentaires (3)
Qu'elle repose en paix.
Sarkis Serge Tateossian
18 h 23, le 10 décembre 2018