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Moyen Orient et Monde - Irak

Dans un quartier huppé de Mossoul, un centre de propagande de l’EI

Le groupe jihadiste diffusait des émissions de radio depuis la villa interdite d'accès.

Un âne sur lequel on peut lire « Daech », acronyme arabe de l’État islamique, jeudi, près de Mossoul. Aris Messinis/AFP

Rien ne semble distinguer cette villa d'une autre : un bâtiment de deux étages, un jardin et une remise, dans le quartier huppé de Jawsaq, que les troupes ont repris cette semaine à la faveur d'une offensive pour reconquérir la partie occidentale de Mossoul, deuxième ville d'Irak. Et pourtant, selon l'armée irakienne et des habitants, cette maison cachait un centre médiatique du groupe jihadiste État islamique (EI) qui leur servait d'outil de propagande.

« Les voisins nous ont dit que (l'EI) y confectionnait des affiches », indique le lieutenant-colonel Abdel Amir al-Mohammadawi, de la division d'intervention rapide, en référence aux pancartes sur lesquelles les jihadistes énonçaient leurs consignes religieuses. « Après avoir fouillé la maison, nous avons découvert un centre médiatique d'où diffusait leur station radio al-Bayane », explique-t-il.

Les combattants de l'EI ont mis le feu au bâtiment avant de fuir le quartier. À l'intérieur, les murs sont tout noircis. Seul un jouet d'enfant est intact. La cuisine est méconnaissable, des piles de documents ont été réduites en cendres. Des calculatrices, certaines ayant fondu mais d'autres intactes, gisent à terre. Non loin, des carcasses d'ordinateurs. « Tout est totalement brûlé (...) Nous avons trouvé quelques ordinateurs, des affiches, des CD qui seront remis à l'unité de renseignement », ajoute l'officier. Du matériel servant à la diffusion de la radio a également été trouvé, et des membres de la division d'intervention rapide pouvaient être vus portant une table de mixage.

« La propagande, c'est tout pour l'EI »

« Cet endroit appartenait à Daech, personne n'y entrait car c'était interdit », confie un voisin, Obaida Radwane, 22 ans, en utilisant un acronyme en arabe de l'EI. « Ils l'utilisaient comme un centre médiatique pour imprimer leurs pancartes, celles que vous voyez dans les rues, dit-il. C'était aussi utilisé pour la station al-Bayane. »

L'EI a développé une machine médiatique très sophistiquée considérée par les experts comme un élément-clé dans ses opérations. Le groupe ultraradical a utilisé al-Bayane, ainsi que d'autres médias, pour revendiquer des attaques à l'étranger, notamment une fusillade à Orlando (États-Unis) qui avait fait une cinquantaine de morts en juin 2016. Il publie aussi régulièrement des documents visant à louer les opérations de ses combattants ou dépeindre de façon flatteuse leur mode de vie avec l'espoir d'attirer de nouvelles recrues.

« La propagande, c'est tout pour l'EI », une façon de « se vendre à travers le monde » et auprès des habitants des régions qu'il contrôle en Irak et en Syrie voisine, explique Charlie Winter, chercheur au Centre international pour l'étude de la radicalisation et de la violence politique au Kings College. Les médias, « c'est tellement important pour eux », c'est une façon pour eux de continuer à survivre malgré leurs pertes, « de s'ancrer dans l'esprit des gens », ajoute M. Winter.

À l'extérieur de la maison, une boîte avec des centaines de pochettes en plastique pour des CD a été découverte.
Pour M. Winter, le matériel restant dans la maison suggère qu'il avait pu être utilisé pour du matériel distribué dans les « kiosques » que l'EI a mis en place pour diffuser sa propagande. Le chercheur doute cependant que cette villa, située dans un quartier résidentiel où tout le monde semblait savoir ce qu'il s'y faisait, ait été un élément-clé de la machine de propagande jihadiste. « Je serais très surpris qu'ils aient fait leurs vidéos, leur travail de postproduction (...) dans un endroit aussi public, estime-t-il. Je pense que cela se trouve dans un endroit très, très secret. »

L'armée a lancé le 19 février l'assaut pour reprendre Mossoul-Ouest après la reconquête fin janvier de l'est de la cité tombée en 2014 aux mains de l'EI, mais elle se heurte à la résistance des jihadistes. Une reprise de ce secteur lui permettra de contrôler totalement ce dernier grand fief de l'EI en Irak.

 

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