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Moyen Orient et Monde - Décryptage

Trump et les médias : une guerre inédite dans l’histoire américaine

Le président américain a annoncé qu'il n'assisterait pas au dîner des correspondants de la Maison-Blanche, une tradition qui date de 1921.

Le porte-parole de la Maison-Blanche Sean Spicer répond aux questions des journalistes lors d’un briefing à la Maison-Blanche. Brendan Smialowski/AFP

La guerre entre Donald Trump et les médias américains semble avoir atteint son apogée. Plusieurs médias, dont le New York Times et CNN, ont été exclus d'une conférence du porte-parole de la Maison-Blanche Sean Spicer vendredi dernier. Le jour suivant, le président a annoncé dans un tweet qu'il n'assisterait pas au dîner des correspondants de la Maison-Blanche, une tradition vieille de près d'un siècle qui vise à lever des fonds pour des bourses d'étude en journalisme. Tous les présidents ont participé à l'événement au moins une fois au cours de leur mandat. Depuis 1981, seul Ronald Reagan a manqué à l'appel car il se remettait d'une blessure par balle après une tentative d'assassinat.

Depuis son arrivée au pouvoir, il y a seulement quelques semaines, le successeur de Barack Obama a poursuivi la campagne antimédias qu'il menait déjà comme candidat à la présidentielle. Les attaques à répétition à l'encontre des « médias malhonnêtes » et « fake news » ont rythmé les débuts de sa présidence. Sans compter la divulgation par certains membres de l'administration de fausses informations censées contrebalancer les « mensonges » de la presse mainstream. Ce fut le cas des fameux « faits alternatifs », avancés par Kellyanne Conway, la porte-parole de Trump, au moment du débat sur la foule venue assister à son investiture.

Le 18 février, c'est sur le même ton que le président ouvrait son discours face à ses sympathisants rassemblés en Floride. « Je veux vous parler sans le filtre des "fake news" (fausses informations) », entame alors le 45e président sous les cris de ses sympathisants regroupés dans un hangar à l'aéroport de Melbourne. « Thomas Jefferson, Andrew Jackson, Abraham Lincoln. Nombre de nos plus grands présidents se sont battus contre les médias et ont révélé leurs mensonges », poursuit-il pour justifier ces attaques. La comparaison entre le nouvel occupant de la Maison-Blanche et ces trois pères fondateurs est toutefois loin d'être pertinente. Thomas Jefferson, Andrew Jackson et Abraham Lincoln ont bien eu des conflits avec la presse mais pour autant, ils n'ont jamais remis en question la liberté de celle-ci. Le premier, président entre 1801 et 1809, affirmait d'ailleurs : « Si nous devions avoir un gouvernement sans journaux ou des journaux sans gouvernement, je n'hésiterais pas un seul instant à choisir la dernière hypothèse. »

 

(Pour mémoire : Trump dénonce avec virulence la « malhonnêteté » de la presse)

 

 

Une presse partisane
À son époque, comme à celle de Jackson et de Lincoln, les grands journaux sont rattachés à un parti politique. « Ces trois hommes d'État étaient donc très critiques à l'encontre de la presse, mais de celle-là même qui les critiquait », explique à L'Orient-Le Jour Barbara A. Perry, professeure à l'Université de Virginie et spécialiste des présidents des États-Unis. Du temps de Lincoln, la séparation entre États du Sud esclavagistes et États du Nord favorables à l'abolition arbitre la bipartition des journaux. La presse du Sud est très critique à l'encontre de Lincoln, notamment lors de son élection qui pousse sept États à former les États confédérés. « Les présidents s'inquiétaient bien sûr des histoires que les médias d'opposition pouvaient rapporter à leur sujet », développe-t-elle. En 1800, lors de la campagne présidentielle, Thomas Jefferson subit ainsi les critiques de ses adversaires politiques qui font courir le bruit de sa liaison avec une esclave. Ces attaques s'inscrivaient dans une logique de lutte politique entre une presse partisane et un président représentant le camp adverse. Rien à voir donc avec l'attitude du 45e président des États-Unis qui a désigné l'ensemble de la presse comme son ennemie, indépendamment de la ligne éditoriale des médias critiqués.

Cette hostilité n'est pas sans rappeler la relation qu'entretenait Nixon avec les médias. « Lors d'une conférence de presse en 1970, un journaliste a demandé à Nixon pourquoi il détestait tant la presse. Ce à quoi Nixon a répondu : ''Je ne déteste pas la presse, car on peut seulement détester ce que l'on respecte'' », rappelle Barbara A. Perry. Connu pour ses travers, ses actes de corruption, illégaux et anticonstitutionnels, le président républicain est aussi un homme d'État très paranoïaque. « Dans le scandale du Watergate, Nixon ne s'est pas contenté de mettre sur écoute le Parti démocrate, les journalistes accrédités à la Maison-Blanche étaient aussi concernés », ajoute Sébastien Mort, maître de conférence sur la civilisation américaine à l'université de Lorraine, site de Metz. Dans un enregistrement secret datant de 1972 mais révélé en 2008, il confie à son conseiller Henry Kissinger : « N'oubliez pas. La presse est l'ennemie. » Cette considération fait largement écho au discours de Donald Trump qui, le 17 février dernier, décrivait les médias comme « l'ennemi du peuple américain ». « Seulement Nixon voyait la presse comme son ennemie. Pas l'ennemie du peuple », souligne Barbara A. Perry. Une différence notable qui témoigne du caractère inédit des rapports entre le locataire de la Maison-Blanche et les médias.

 

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commentaires (4)

"Donald-Duck Troump qui décrivait les médias comme « l'ennemi du peuple américain. » !" "Une sorte de gens, quoi, dont l'unique et véritable conviction est l'absence de conviction, associée à une insolence importune et à un art éhonté du mensonge." !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

14 h 14, le 28 février 2017

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Commentaires (4)

  • "Donald-Duck Troump qui décrivait les médias comme « l'ennemi du peuple américain. » !" "Une sorte de gens, quoi, dont l'unique et véritable conviction est l'absence de conviction, associée à une insolence importune et à un art éhonté du mensonge." !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    14 h 14, le 28 février 2017

  • DE TOUT CE QU,IL A PROMIS IL NE VA HONORER QUE SON ANEMOSITE ENVERS L,IRAN ET SES ACCESSOIRES... LE JEU COMMENCE... LES PERIPLES DES GENERAUX DANS LA REGION SE MULTIPLIENT... TOUT COMME LES MISES EN DEMEURE... SA VOIX HAUSSE ET LES AYATOLLAHS TREMBLENT...

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 22, le 28 février 2017

  • Certes, une alliance avec la Russie devrait figurer en tête des priorités de l’administration Trump-pète si celle-ci souhaite empêcher Poutine de s’approcher des frontières de l’OTAN via la Turquie et envoyer par le corridor turc des missiles et autres armements en Syrie. La prétendue suprématie aérienne d’Israël dans l’est de la Méditerranée est un autre sujet sur lequel Trump devra se concentrer en essayant de se rapprocher de Poutine. Cette suprématie n’est plus depuis que les S-300 et S-400 russes sont déployées en Syrie et que le Hezbollah opère librement dans le Golan occupé. L’homme d’affaires qu’est Trump sait bien que tout cela a un prix : il lui faut tous les talents du monde pour convaincre Poutine que « la carte iranienne » qu’il joue à fond en ce moment est la mauvaise et qu’il faudrait y renoncer. Mais que Trump compte-t-il proposer en échange à Poutine ? Les États-Unis ont-ils réellement en leur possession « quelque chose » qui vaille mieux qu’une plus grande profondeur stratégique pour la Russie, à savoir une réelle influence au Moyen-Orient ? Après tout, Poutine n’est pas homme à renoncer à un « rêve » que poursuivait déjà Pierre le Grand…

    FRIK-A-FRAK

    12 h 36, le 28 février 2017

  • Excellent ! la balance de la démagogie professionnelle de l'establishment journaleux BCBG ,penche pour une fois du bon coté , avec les Bisounours du cinéma des canards des OSCAR ...à la moralité intermittente...

    M.V.

    12 h 17, le 28 février 2017

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