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Liban - Patrimoine

Combattre le trafic illicite d’antiquités dans un contexte régional difficile

Une conférence sur le sujet, qui faisait suite à une session de formation d'experts, vient de se tenir à Beyrouth.

Une photo de groupe des participants à la formation sur la lutte contre le trafic illicite d’antiquités. Photo DR

Que l'interminable guerre en Syrie ait ouvert grandes les portes du trafic illicite d'antiquités de ce pays est désormais bien connu. Que le Liban soit souvent une voie de passage pour ces bandes organisées n'est plus vraiment un secret non plus.
Une conférence tenue mercredi au palais de l'Unesco a mis en lumière les efforts fournis par les officiels libanais, notamment les responsables au sein des forces de l'ordre, pour combattre ce fléau, tout en montrant leurs succès, mais aussi les multiples difficultés auxquelles ils sont confrontés.
Cette conférence venait clôturer une session de deux semaines sur les moyens de prévenir ce trafic illicite d'antiquités, organisée en deux temps : du 20 au 25 janvier et du 17 au 22 février.
Cette session de formation s'adressait à des archéologues, avocats et autres personnes, du Liban ou de Syrie, intéressées par le sujet. Elle était mise en place par l'association libanaise de préservation du patrimoine, « Biladi », en collaboration avec Neil Brodie, archéologue et chercheur à Oxford sur le patrimoine en danger dans la région MENA. Plusieurs experts se sont déplacés pour discuter de cet épineux sujet avec les participants. Cette formation était financée par l'ambassade de Norvège et tenue en coopération avec l'organisation internationale « Blue Shield », la Direction générale des antiquités et des musées (DGAM) de Syrie et la Direction générale des antiquités (DGA, ministère de la Culture) au Liban.
Une distribution de diplômes a eu lieu mercredi en présence de l'ambassadrice de Norvège, Lene Lind, du président de Blue Shield, Charles de Habsbourg-Lorraine, de la présidente de Biladi, Joanne Farchakh Bajjaly, de Neil Brodie ainsi que d'un nombre d'experts.
Mme Lind a insisté sur l'importance de la collaboration et du réseautage dans le combat contre le trafic illicite d'antiquités, se félicitant de l'organisation d'une telle session de formation au Liban. Au cours de la conférence, les conventions internationales sur la protection du patrimoine ont été passées en revue par le général Naïm Ziadé, qui a été président du Bureau de droit international et humain au sein de l'armée durant trois ans, et qui travaille actuellement à fonder l'association nationale de Blue Shield au Liban.
Il a fait remarquer d'emblée que « le trafic illicite d'antiquités n'est pas un crime perpétré seulement par des individus, certains États peuvent s'en rendre coupables après occupation d'un autre pays ». La convention de La Haye de 1954 est là pour empêcher les pays de profiter de l'occupation des sols pour sortir illégalement des vestiges archéologiques des pays occupés, a-t-il dit.
Il a cité aussi d'autres textes comme la convention de l'Unesco de 1970, qui consacre un article à l'interdiction de l'importation et de l'exportation d'œuvres archéologiques de zones en conflit. Le général Ziadé a enfin donné des exemples d'arrestations faisant suite à de tels agissements durant les guerres.

Six bandes organisées arrêtées en 2016
La chasse aux trafiquants au Liban a été détaillée par le lieutenant Alaa Dib, du Bureau du crime international, qui poursuit principalement les trafiquants de voitures et d'antiquités (une autre conférence avait été donnée par le lieutenant-colonel Nicolas Saad, chef de ce bureau, quelques jours plus tôt dans le cadre de la formation).
Le lieutenant Dib a expliqué que les cas de trafic d'antiquités ont augmenté exponentiellement depuis le début de la guerre en Syrie.
Ce trafic se pratique exclusivement dans un cadre de crime organisé, a-t-il précisé, citant l'exemple de vestiges venant de la ville syrienne de Maaloula – dont un livre de grande valeur – saisis au Liban aux mains d'une bande de six Syriens. En tout, a-t-il indiqué, six bandes organisées de trafiquants ont été arrêtées par les forces de l'ordre en 2016, après enquête et sur ordre de justice, avec recouvrement de quelque 35 objets archéologiques. Interrogé sur les peines encourues par ces trafiquants, le lieutenant Dib a reconnu qu'elles ne dépassaient pas les trois ans dans les cas les plus graves, mais que les autorités syriennes étaient notifiées de l'arrestation de ressortissants sur le sol libanais.
Les objets sont rendus au pays d'origine dans ces cas. Ces succès sont notamment dus à la coopération des services sécuritaires entre eux ainsi qu'avec des institutions comme les douanes, la DGA ou, à un niveau international, l'Interpol.
Mais de multiples défis persistent également, selon le lieutenant Dib : la difficulté de maîtriser la longue frontière terrestre libano-syrienne ainsi que la frontière maritime, l'expérience de ces bandes organisées qui ne sont pas des novices dans ce domaine, le peu de sensibilisation populaire sur la gravité de ces crimes, le chaos en Syrie qui favorise ce trafic, l'infiltration des réfugiés syriens qui les rend difficilement contrôlables, etc.
Enfin, Charles de Habsbourg-Lorraine, président de Blue Shield, a expliqué que son organisation a été conçue comme une sorte de « Croix-Rouge pour le patrimoine en péril », chapeautée par plusieurs organisations internationales sur les musées et les antiquités, et renforcée par des associations nationales dans les pays. Il a cependant évoqué une modification du concept du patrimoine culturel, élargi pour englober le patrimoine dit « intangible ». Ce patrimoine, qui compte la musique, les habitudes, la cuisine... est la première victime des conflits, a-t-il insisté, et il est mentionné dans une convention de 2003.
M. de Lorraine a souligné enfin la difficulté d'œuvrer à la protection du patrimoine en Syrie, à l'ombre de l'activité de divers groupes hostiles.

Que l'interminable guerre en Syrie ait ouvert grandes les portes du trafic illicite d'antiquités de ce pays est désormais bien connu. Que le Liban soit souvent une voie de passage pour ces bandes organisées n'est plus vraiment un secret non plus.Une conférence tenue mercredi au palais de l'Unesco a mis en lumière les efforts fournis par les officiels libanais, notamment les responsables au...

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Et pendant qu'on protege le patrimoine culturel syrien, on coule ramlet el baida sous une dalle en beton

George Khoury

09 h 51, le 24 février 2017

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Commentaires (1)

  • Et pendant qu'on protege le patrimoine culturel syrien, on coule ramlet el baida sous une dalle en beton

    George Khoury

    09 h 51, le 24 février 2017

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