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Liban - Eclairage

Autour de Aoun, l’image d’un Liban officiel uni arborée à Riyad

Le général Aoun et la délégation libanaise reçus à l’aéroport par l’émir Fayçal ben Bandar ben Abdel Aziz.

Vingt-six ans après la signature des accords de Taëf, texte fondateur de la IIe République, l'un des plus grands contestataires de ces accords se rend dans le pays qui les a parrainés, l'Arabie saoudite.
Devenu président de cette République, élu à la faveur de la Constitution conçue dans la ville saoudienne du même nom, Michel Aoun a choisi sciemment d'inaugurer ses premiers déplacements à l'étranger par une visite à Riyad. Une escale forte en symbolismes à un moment aussi crucial pour l'avenir de la région mais aussi du Liban, sorti exsangue et épuisé après des années de paralysie et de marasme politique et économique.

Accompagné d'une importante délégation de ministres représentatifs du patchwork politique libanais, dont un ministre chiite, Ali Hassan Khalil, Michel Aoun entend ainsi véhiculer un premier message allusif à ses interlocuteurs saoudiens, celui d'un Liban officiel uni que l'échéance présidentielle aura réussi à ressusciter.
Tirant sa force d'une légitimité populaire importante, le chef de l'État entend ainsi démontrer aux responsables saoudiens qu'il vient en sa qualité de président de l'ensemble des Libanais et d'arbitre suprême et non seulement du camp politique dont il provenait à l'origine.

Il serait ainsi porteur d'un discours de souveraineté et d'une double mission : celle de préserver les intérêts du pays qu'il représente, incarnés notamment dans la politique de distanciation par rapport aux crises dans la région et à la politique des axes. Il s'agit d'une « forme de neutralité positive », dans le sens où elle ne contredit aucunement la logique de l'ouverture envers les parties tierces, dont les États arabes et les pays du Golfe, comme le relève une source du 8 Mars.

 

(Lire aussi : Aoun en terre saoudienne pour tourner la page des malentendus)

 

Un message que M. Aoun avait clairement fait entendre à la délégation saoudienne venue le féliciter à Baabda au lendemain de son élection, lorsqu'il avait affirmé que le « Liban n'est inféodé à aucun État étranger », annonçant, dès le départ, la couleur.
Outre sa légitimité nationale, le président cherche à manifester également sa légitimité internationale, en démontrant clairement sa capacité à « entretenir des relations équilibrées et fondées sur un respect mutuel. Il peut aussi bien s'entretenir, à quelques jours d'intervalle, avec les responsables iraniens et saoudiens », note l'analyste politique Antoine Constantine.
Sa rencontre, vendredi dernier, avec le président de la commission de la Sécurité nationale et de la Politique étrangère au Parlement iranien (Majlis el-Choura), Alaëddine Boroujerdi, lequel avait répercuté la volonté de Téhéran d'apporter une aide à l'armée libanaise, en est la preuve, commente l'analyste.
Il y a un an, un tel scénario était d'autant plus inimaginable pour Michel Aoun, que sa latitude de manœuvre et ses relations externes étaient réduites à un seul camp politique.

Armé d'un changement de contexte qui a fini par retourner en sa faveur, il entend désormais rectifier le tir et « faire de ses alliances avec des pays adversaires son arme de prédilection », note encore M. Constantine.
Pour cet analyste, c'est la définition même d'un « président puissant » qui aspire à restituer au Liban un rôle central sur le plan international en convertissant la crise régionale en un atout sans pour autant se prévaloir de sa capacité de jouer un rôle d'avant-garde dans la résolution du conflit sunnito-chiite qui enflamme la région depuis plusieurs années.

Tout au plus, il pourra contribuer à réduire les tensions tout en mettant à profit ses relations et ses rencontres pour consolider la stabilité du Liban sur les plans politique, sécuritaire, financier et économique, croit savoir également une source politique qui suit ce dossier de près.
Les membres de la délégation libanaise profiteront ainsi de cette visite pour promouvoir au cours des deux prochains jours auprès de leurs interlocuteurs saoudiens le retour des touristes et investisseurs saoudiens potentiels au Liban. La question des réfugiés devrait également figurer au menu des discussions, ainsi que la question de la lutte contre le terrorisme.

 

(Lire aussi : Geagea : « Le seul endroit où l'axe du 8 Mars n'a pas progressé, c'est le Liban »)

 

Pour l'heure, aucune indication sur l'aide des trois milliards de dollars jadis promise au Liban, puis suspendue par le royaume wahhabite, en signe de protestation contre les prises de position hostiles à son égard inspirées par le Hezbollah. L'absence des ministres de la Défense et de l'Intérieur saoudiens qui, selon notre envoyée à Riyad Hoda Chédid, se trouvent en dehors du pays, laisse croire que ce dossier ne figurera pas en tête des échanges officiels.

D'ailleurs, constate un observateur, les informations qui filtrent depuis quelque temps sur la situation économique et financière catastrophique du royaume ne laissent pas présager un déblocage de l'aide saoudienne au Liban, ou certainement pas dans les termes promis en tous les cas.

À Paris, on reste circonspect quant à la possibilité d'une relance de l'aide en faveur du Liban, « quand bien même le bailleur de fonds saoudien n'a jamais ordonné la suspension de la production confiée à la France », comme le souligne notre correspondant à Paris, Élie Masboungi. Ce dernier tient toutefois à rappeler que l'Arabie saoudite a déjà versé 20 % du montant total lors de la signature du contrat de production et de livraison signé par l'Arabie saoudite et Paris (Donas). « Dans les milieux du Quai d'Orsay et du ministère de la Défense, on n'élimine pas non plus un retour de situation en faveur du Liban. Mais rien n'est certain à ce stade », assure M. Masboungi.

 

(Lire aussi : Aide japonaise de 18 millions de dollars aux réfugiés syriens)

 

Face aux objectifs politiques multiples que comporte la tournée du président en Arabie saoudite, « les milliards du roi » ne semblent pas en tête des priorités de M. Aoun en tous les cas. « L'importance de la visite est à rechercher au-delà de l'aide financière promise par Riyad. Sa portée est éminemment politique », commente M. Constantine.

Pour une source du 8 Mars, la visite et les engagements faits par le président de la commission de la Sécurité nationale et de la Politique étrangère au Parlement iranien à M. Aoun à Baabda, il y a quelques jours, a vraisemblablement donné au chef de l'État une force de levier susceptible de l'affranchir de toute sorte de dépendance financière au royaume wahhabite en termes d'aides militaires. Désormais, il a les coudées franches et peut s'entretenir avec ses interlocuteurs saoudiens d'une position de force et non de quémandeur, conclut la source.

 

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commentaires (6)

"...Autour de Aoun l'image d'un Liban officiel uni arborée à Riyad..." pour la photo...peut'être...mais en réalité un Liban mené par le bout du nez par les valets de Téhéran, armés et financés par ce pays ! Irène Saïd

Irene Said

14 h 34, le 10 janvier 2017

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Commentaires (6)

  • "...Autour de Aoun l'image d'un Liban officiel uni arborée à Riyad..." pour la photo...peut'être...mais en réalité un Liban mené par le bout du nez par les valets de Téhéran, armés et financés par ce pays ! Irène Saïd

    Irene Said

    14 h 34, le 10 janvier 2017

  • "Désormais, il a les coudées franches et peut s'entretenir avec ses interlocuteurs saoudiens d'une position de force et non de quémandeur, conclut la source." ! "Non quémandeur" ? Mais bien sûr que si, mais façon libanaiiise en étant ; yâââï ; "exigeannnt!", i.e. : "Chéhhâde wé m'chârâtte" !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    13 h 07, le 10 janvier 2017

  • Regardons bien l'image à partir du drapeau wahabite planté , sur la gauche nos dirigeants LIBANAIS et sur la droite les bensaouds . FAIT ON PARTIE DE LA MEME FAMILLE ARABE ????????? Je sais avec des iraniens ça serait pareil d'un point de vue de l'accoutrement , mais eux ne sont pas arabes , et Dieu merci pour nous autres au Liban , pour avoir pu libérer le sud ...

    FRIK-A-FRAK

    13 h 02, le 10 janvier 2017

  • L'Accord du Caire de 1969 signé par Charles Hélou et le général Boustani avec Yasser Arafat est la source de tous les malheurs dont souffre le Liban jusqu'à aujourd'hui. Il est équivalent à l'accord de Munich de 1938 signé par Edouard Daladier et Neville Chamberlain avec Hitler et qui fut la Cause de la guerre 39-45.

    Un Libanais

    11 h 45, le 10 janvier 2017

  • C'est une pratique de bonne guerre que 2 associés se font en affaire. Dans un rapport de force l'un ( la résistance du hezb ) durcit ses demandes et l'autre ( la résistance du Phare AOUN ) fait dans la modération. ÇA RESTE QUE L'OBJECTIF PRINCIPAL ET FINAL C'EST DE LEUR PIQUER CE QUI LEUR RESTE DE POGNON, ET DE LES TENIR LOIN TRÈS LOIN DE NOS AFFAIRES PRIVÉES DE LIBANAIS DEVENUS FORTS ET FIERS DE L'ÊTRE.

    FRIK-A-FRAK

    10 h 53, le 10 janvier 2017

  • Le démantèlement des accords de Taël et l'abrogation des accords du Caire ....sont ciblé ...

    M.V.

    07 h 24, le 10 janvier 2017

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