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Liban - Attentat d’Istanbul

À Achrafieh et dans le Chouf, les émouvantes « noces » d’Élias et de Haykal

Deux des trois jeunes victimes de l'odieuse attaque du Reina ont été enterrées hier dans une ambiance de deuil national et populaire.

Le cercueil du jeune Élias Wardini, porté lors de ses funérailles hier à Achrafieh. Sur un portrait de la victime, on peut lire « l’ange d’Achrafieh ». Joseph Eid/AFP

Dans une ambiance de deuil national et populaire, le Liban a fait d'émouvants adieux hier à deux des trois jeunes victimes libanaises tombées dans la nuit de samedi à dimanche, lors du réveillon de la Saint-Sylvestre, dans l'odieuse attaque menée par un jihadiste et revendiquée par l'État islamique contre la célèbre boîte de nuit Reina à Istanbul.

Élias Wardini et Haykal Moussallem ont été inhumés hier respectivement à Achrafieh et Biré (caza du Chouf). La troisième victime, Rita Chami, sera enterrée demain jeudi.

En début de matinée, hier, la dépouille mortelle de Haykal Moussallem a été transportée vers son village natal de Biré, où les funérailles ont été célébrées en l'église du Sacré-Cœur, à 16h, par l'archevêque maronite de Beyrouth, Mgr Boulos Matar. Le corps de ce coach sportif de 36 ans, qui s'était tout juste marié il y a quatre mois, reposait à l'Hôtel-Dieu à Achrafieh depuis son rapatriement lundi soir. Plusieurs amis de la victime, dont des professionnels du monde du basket-ball dans lequel Moussallem travaillait, étaient présents à l'inhumation.

Un peu plus tard, c'est le cercueil blanc d'Élias Wardini qui était porté par ses camarades et ses collègues qui se sont rendus à pied à l'église Notre-Dame de la Présentation à Achrafieh au son de la darbouka, comme le veut la tradition, transformant les funérailles en « noces » lorsque le défunt est jeune.
Le corps du jeune homme de 26 ans, entraîneur dans un club de gym, reposait à l'hôpital Saint-Georges, à Achrafieh, depuis son rapatriement. Des feux d'artifice et des tirs ont retenti pendant toute une partie de la journée à Achrafieh, peu après la sortie de la dépouille mortelle de Wardini de l'hôpital. Dans l'église, le cercueil a été porté à bout de bras par les amis et les collègues d'Élias qui l'ont fait « danser » sous les applaudissements, au son des trompettes et du clocher. Les funérailles ont été célébrées par le métropolite grec-orthodoxe de Beyrouth, Mgr Élias Audi.

 

(Lire aussi : « Une joie de vivre émanait de lui à tout instant », se souvient l'ami d'Élias Wardini)

 

Les funérailles de la troisième victime, Rita Chami, 26 ans, étudiante en audiovisuel, devraient avoir lieu demain jeudi à l'église de l'archevêché grec-catholique, rue de Damas, et l'inhumation aura lieu en son village natal, Joun (Iqlim el-Kharroub).

Six autres Libanais ont été blessés dans l'attentat. Ce sont François Asmar, Nasser Béchara, Nidal Bcherrawi, Melissa Pappalardo, Jihad Abdel Khalek et Bouchra Doueihy. Ils ont tous été rapatriés lundi soir, sauf Bouchra Doueihy, fille du député Estéphan Doueihy (Zghorta), et dont l'état de santé est à présent stable. L'attaque a fait au total 39 tués et 65 blessés.

Sur ordre du ministre de la Santé, Ghassan Hasbani, les blessés ont été pris en charge par l'hôpital Saint-Georges et celui de l'Université américaine à Beyrouth dès leur arrivée au Liban. Les frais d'hospitalisation des blessés seront entièrement pris en charge par le ministère de la Santé, y compris les opérations qu'ils pourraient subir dans le futur, a indiqué M. Hasbani hier lors d'une visite aux blessés.
Dans ce contexte, le Premier ministre Saad Hariri a décrété hier un deuil national entre 14h et 15h en hommage aux trois victimes. Le président de la République, Michel Aoun, a pour sa part observé une minute de silence hier à 15h, lors d'une visite d'une délégation du Courant patriotique libre de la diaspora au palais de Baabda.

 

(Lire aussi : « Je me souviendrai surtout de son sourire et de sa tendresse », affirme l'oncle de Haïkal Moussallem)

 

L'État libanais avait dépêché un avion de la MEA en Turquie avec une équipe médicale à bord afin de rapatrier les trois dépouilles mortelles ainsi que les six blessés. Ces derniers ont été accueillis à leur arrivée lundi soir à l'aéroport par une délégation du gouvernement libanais, présidée par Saad Hariri et formée des ministres des Affaires étrangères, Gebran Bassil, de l'Intérieur, Nouhad Machnouk, de l'Environnement, Tarek Khatib, des Travaux publics, Youssef Fenianos, du ministre d'État pour la Planification, Michel Pharaon, et du député Émile Rahmé.

« Le terrorisme n'a pas de religion, il nous vise tous, il vise les gens qui aiment la vie », avait dit M. Hariri lundi, alors qu'il était à l'aéroport de Beyrouth. « Nous sommes responsables en tant qu'État libanais envers nos citoyens. Nous restons aux côtés des proches des victimes et suivons l'affaire avec le gouvernement turc », avait-t-il ajouté. « Ce qui s'est passé aujourd'hui (dans la nuit de samedi à dimanche) en Turquie, où des victimes de différentes nationalités, y compris des Libanais, sont tombées, est un message visant la coopération de la Turquie avec la Russie dans une tentative d'arrêter le bain de sang en Syrie. Il est clair aujourd'hui que les pays stables, ou ceux qui tentent de faire quelque chose pour la Syrie, sont visés », avait par ailleurs estimé M. Hariri dans un communiqué publié dimanche.

 

(Lire aussi : « Elle était une star ! », raconte l'amie de Rita Chami)

 

Condamnations et condoléances
Le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a condamné lundi les attentats et présenté ses condoléances aux familles des victimes tout en souhaitant un prompt rétablissement aux blessés. Il a en outre salué la manière dont l'État a géré cette affaire, notamment l'envoi d'un avion en Turquie pour récupérer les victimes.

Le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, s'est également félicité de la réaction des autorités libanaises après l'attentat. « Nous attendions depuis longtemps de voir l'État libanais réagir comme il l'a fait en prenant en charge les victimes libanaises de l'attentat », a dit M. Geagea, louant « l'efficacité » et la « rapidité » de la réaction des autorités. « Nous avons senti que nous vivons dans un État qui est responsable de tous ses citoyens », a-t-il également dit. « Lorsque l'intention est là, l'État libanais est capable de faire des miracles. »
Le ministre Fenianos a estimé de son côté que « les trois martyrs qui sont tombés lors de l'attentat en Turquie sont comme ceux qui sont tombés au Liban parce qu'ils ont tous été touchés par le terrorisme ». Michel Pharaon a pour sa part appelé à « l'union nationale et l'entente politique » afin de garantir « la protection du Liban et la lutte contre le terrorisme ».

Le directeur général de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim, a souligné dans un communiqué que le Liban « est plus au niveau sécuritaire que les autres pays de la région, et ce pour plusieurs raisons, notamment celles liées au fait que les Libanais qui ont connu la guerre civile sont persuadés que les différences ne peuvent être réglées que par le dialogue ». « La Sûreté générale travaille en collaboration avec les organismes sécuritaires internationaux pour protéger le Liban face à la menace terroriste », a assuré M. Ibrahim.

 

(Lire aussi : L'état de santé de Bouchra Doueihi s'améliore lentement)

 

L'uléma Ali Fadlallah a appelé, dans un communiqué publié hier, « à faire face à ceux qui essaient de répandre le chaos par la mise en place d'une stratégie culturelle et éducative ».
Dimanche, les députés Atef Majdalani et Nadim Gemayel s'étaient rendus chez la famille d'Élias Wardini. Le ministre des Affaires sociales, Pierre Bou Assi, s'est rendu dimanche et lundi auprès des familles des victimes pour leur présenter ses condoléances et celles des Forces libanaises.
Le patriarche grec-catholique, Mgr Grégoire III Laham, les députés Nidal Tohmé, Yassine Jaber et Samir Jisr, le secrétaire général de l'Organisation populaire nassérienne, Oussama Saad, et la présidente de la Ligue populaire à Zahlé, Myriam Skaff, font également partie des personnalités qui ont condamné l'attentat et appelé à une mobilisation des forces pour combattre le terrorisme.

L'ancien député Émile Émile Lahoud a pour sa part appelé à interdire aux ressortissants libanais de se rendre en Turquie afin de garantir leur sécurité. Le ministre des Déplacés, Talal Arslane, a plaidé pour la coopération entre les différentes nations dans le but de faire face au terrorisme.

 

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