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Liban - Commémoration

Michelle Tuéni à « L’OLJ » : Nous réclamons le droit de Gebran à la justice

La présidente de la Fondation Gebran Tuéni s'insurge contre le feu rouge politique qui continue, onze ans après, d'entraver le démarrage de l'enquête sur le meurtre du martyr de l'intifada de l'indépendance 2005.

Michelle Tuéni en compagnie de son père. Photo DR

Onze années sont passées depuis ce funeste 12 décembre 2005, jour où Gebran Tuéni, pilier de la révolution du Cèdre, a été sauvagement assassiné dans un attentat à la voiture piégée. Un attentat ayant aussi frappé en plein cœur plus d'un million d'amoureux de la liberté qui, sur la place des Martyrs, le 14 mars de cette même année, exultaient en répétant le serment du vivre-ensemble que prêtait haut et fort devant eux le PDG d'an-Nahar.

 

Qui a assassiné Gebran ?
Onze années qui se sont aussi écoulées sans qu'il n'y ait le moindre progrès dans la moindre enquête pour élucider l'acte odieux et connaître l'identité de ses commanditaires et auteurs.

À l'occasion de cette onzième commémoration, la présidente de la Fondation Gebran Tuéni, Michelle Tuéni, fille du journaliste et député disparu, exprime à L'Orient-Le Jour sa détermination à poursuivre le combat pour revendiquer le droit à la justice – même à titre posthume – pour son père, lui qui, « tout au long de sa vie, a soutenu avec force ceux dont les droits étaient spoliés ». Cette volonté d'activer le dossier de l'enquête pour obtenir des éléments clairs de réponse se traduit par une question incisive et directe sur laquelle la Fondation Gebran Tuéni a basé cette année sa campagne : « Qui a assassiné Gebran ? »
Mais pourquoi avoir attendu cette année, alors que cette interrogation s'impose depuis le premier jour de l'assassinat ? « Parce que, d'une part, le Tribunal spécial pour le Liban ne semble pas devoir se préoccuper du dossier de Gebran Tuéni, ayant jusque-là écarté toute connexité entre celui-ci et l'assassinat de Rafic Hariri, et d'autre part, parce que nous voulons presser la justice nationale de mener une enquête sérieuse, au moment où une magistrate, Hileneh Iskandar, vient, à cette fin, d'être nommée juge d'instruction auprès de la Cour de justice », explique Michelle Tuéni.

À la question de savoir quelles cibles le slogan lancé par la fondation vise-t-il, Mme Tuéni répond d'emblée : « Chaque responsable politique et chaque citoyen. » Elle déplore ainsi autant l'inaptitude et le manque de courage des hommes au pouvoir que la faculté de banalisation propre aux Libanais.

 

(Lire aussi : Gebran Tuéni, un courage dont l'écho retentit encore...)

 

L'absence de volonté politique
« Beaucoup d'investigations auraient pu être menées par chacune des autorités en charge de faire prévaloir la justice qui se sont succédé jusqu'à ce jour, mais rien n'a été fait », dénonce la jeune activiste, attribuant cette défaillance à « une absence de volonté politique ». Elle relève en outre que ce manquement des responsables à leurs obligations s'était manifesté avant même que Gebran Tuéni ne fût assassiné, « depuis que des informations provenant du Tribunal spécial pour le Liban l'avaient dit menacé et que rien n'avait été fait pour le protéger ».

Michelle Tueni rapporte également des propos du Premier ministre de l'époque, Fouad Siniora, selon lesquels « la scène du crime a été maquillée aussitôt après l'attentat » pour effacer tout indice qui aurait contribué à la découverte de la vérité. « Pourquoi donc les services de renseignements n'ont-ils pas agi ni avant l'assassinat, ni le jour même, ni après ? » s'indigne-t-elle dans ce cadre.

Dans le but de secouer les consciences, la fondation a réalisé un documentaire diffusé dimanche et hier sur les écrans télévisés, dans lequel chacune des personnalités qui, depuis 2005, ont pris les rênes des ministères de la Justice et de l'Intérieur a été priée de dire ce qu'elle a fait pour lever quelque peu le voile sur l'attentat meurtrier. « Personne n'a apporté une réponse à cette question légitime », se désole Michelle Tuéni, affirmant que « les messages d'empathie et de condamnations clichés ne suffisent pas ».

La fille de Gebran Tuéni n'épargne pas non plus les personnalités politiques que son père avait pourtant défendues alors qu'elles étaient exilées ou emprisonnées. « Ont-elles fourni, à leur tour, le moindre effort pour que justice soit faite à Gebran ? » demande-t-elle, visiblement persuadée que la réponse est négative.
« Outre les hommes politiques, la question "Qui a tué Gebran" vise les Libanais dans leur ensemble », poursuit la présidente de la Fondation Gebran Tuéni. « Nous menons notre campagne à travers les médias télévisés et la presse écrite, ainsi que sur les panneaux d'affichage qui jalonnent les routes, afin de sensibiliser tous les citoyens à notre cause qui est aussi la leur et de leur rappeler que, comme un seul homme, plus d'un million d'entre eux étaient descendus dans la rue afin de défendre avec Gebran les valeurs pour lesquelles il s'était battu jusqu'à en perdre la vie. » Et de constater avec amertume que beaucoup de ces personnes ont cédé à la tentation d'anodiser des phénomènes contre lesquels ils s'étaient pourtant mobilisés par le passé en masse et en force, mettant en garde les Libanais contre la tendance à s'adapter aux pires situations, notamment celles dans lesquelles « la justice est bafouée ».

 

(Pour mémoire : Nadim Gemayel : Il faut beaucoup pour enterrer la révolution du Cèdre)

 

 

L'école officielle Gebran Tuéni et les bourses pour l'AUD
En parallèle à ce combat mené en vue de rechercher les coupables qui ont mis fin à la vie du fougueux député de 48 ans, mort avant qu'il n'ait pu concrétiser son rêve d'un Liban basé sur la dignité et la souveraineté, la Fondation Gebran Tuéni entreprend également, depuis sa création en 2010, de pérenniser à travers ses activités socioculturelles la mémoire du martyr de l'intifada de l'indépendance 2005 et sa pensée axée sur la promotion des libertés publiques et la garantie pour les jeunes d'un avenir décent. Pour Michelle Tuéni, les meilleurs moyens de véhiculer ces préoccupations sont le sport, la culture et l'éducation.

« Gebran Tuéni accordait tant d'importance au secteur du sport qu'il lui a consacré un supplément hebdomadaire dans an-Nahar » affirme-t-elle, soulignant que la fondation organise chaque année au centre-ville de Beyrouth un événement baptisé « La journée sportive Gebran Tuéni », marquée par des courses à vélo, des activités de zumba, de body combat, de hip-hop et de yoga. Côté culture, la fondation s'attache également à organiser des récitals et des concerts, ainsi que des concours de photos et de courts métrages en collaboration avec les universités.

Au niveau de l'éducation, une école officielle à Achrafieh vient d'être baptisée du nom de Gebran Tuéni, en coopération avec le ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur. « Nous y avons entrepris des travaux de restauration, notamment dans la salle de théâtre », indique la présidente de la fondation, qui affirme également que l'organisme a introduit un service de psychologie au sein de cet établissement pour venir en aide aux élèves autistes et à ceux en proie à des problèmes familiaux ou sociaux.

Surtout, la fondation s'attelle à perpétuer le message journalistique de Gebran Tuéni en organisant dans les écoles le concours du « Journaliste de l'année ». Pour 2016, le sujet est le suivant : « Que demandez-vous au nouveau président de la République ? » Michelle Tuéni affirme à ce propos que l'objectif d'une telle compétition est de « développer chez les jeunes le sens de l'écriture, le sens critique et la faculté de demander des comptes ».

Enfin, « un accord vient d'être conclu avec l'American University of Dubaï (AUD), en vertu duquel des bourses seront attribuées chaque année à deux élèves de terminale pour suivre une formation de journaliste au sein de cette université », annonce la présidente de la fondation, saluant à cette occasion le ministre de l'Éducation, Elias Bou Saab, auteur de l'initiative.

 

 

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Gebran tueni eternellement present dans cnscience collectives des passtiones dela liberte a travers toute la surface de ce moyen orient malheureux

Mounir Sader

10 h 22, le 13 décembre 2016

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Commentaires (1)

  • Gebran tueni eternellement present dans cnscience collectives des passtiones dela liberte a travers toute la surface de ce moyen orient malheureux

    Mounir Sader

    10 h 22, le 13 décembre 2016

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