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Scan TV - Scan TV

Comme le dit si bien Fouad Yammine...

Il est temps que nous, téléspectateurs, cessions de nous offusquer et que nous n'oublions pas combien le petit écran reste le reflet fidèle de notre société libanaise.

Fouad Yammine et ses trente sirènes.

Ce que nous voyons à la télévision actuellement, ce qui nous choque, n'est rien d'autre que le reflet de la société libanaise, notre reflet... Tous les personnages créés, inventés ou réinventés sont parmi nous. Ils sont dans nos familles, dans nos bureaux, dans nos églises et nos mosquées, partout. Nous nous offusquons, plus ou moins sincèrement, de ce que le miroir télévisé nous renvoie comme image, nous disons que ce n'est pas vrai, que c'est scandaleux, scabreux, humiliant, mais c'est pourtant bel et bien notre image. Parce que le public, c'est nous ; les téléspectateurs, c'est nous... Mais nous continuons à zapper, à regarder, à rigoler, à lancer à notre voisin assis sur le canapé des « maakoul ? » offensés, et nous en redemandons la semaine d'après.
« Les chaînes libanaises ? Beurk. Quelle décadence! Je ne regarde plus depuis longtemps, je ne regarde que les chaînes françaises, moi! » Menteurs ! Nous adorons jouer aux puritains et nous sommes, paraît-il, une (toute) petite minorité qui résiste et crie au nivellement par le bas en dignes gardiens du savoir et, parfois, de la masturbation intellectuelle. Mais la grande majorité des téléspectateurs, elle, est ravie, vraiment ravie, de tout ce qui défile sur le petit écran. Les insinuations sexuelles, les interventions politiques musclées bien arrosées d'insultes masquées ou non, les propos racistes, les relations conjugales mouvementées et extraconjugales pimentées, la drogue, l'alcool, la prostitution, c'est bel et bien nous. Nous plaignons la nouvelle génération, mais ce que nous ne savons pas, ou ce que nous oublions, c'est ce qu'a si bien dit Fouad Yammine, le sympathique présentateur de Take me Out – nakachit diffusé sur la LBCI lors d'une interview : « Ce que vous entendez pendant l'émission, vous pouvez l'entendre partout si vous faites un tour dans la ville. » Ou encore : « La jeune fille d'aujourd'hui n'est plus offusquée si nous lui parlons dès le premier rendez-vous de sa lingerie fine. »
Visiblement, les Libanais aiment bien le concept des trente filles qui viennent pêcher le poisson-garçon avec leur filet aiguisé, sans aucun complexe, en lançant des regards qui ne prêtent à aucune confusion et des remarques à connotation sexuelle à un jeune homme se pavanant impuissant sur le plateau télévisé avec pour seul allié mâle Fouad, objet de son côté de fantasmes féminins exacerbés. Pour ceux qui seraient choqués par le concept improvisé par Roula Saad, il faut savoir qu'en ville aussi, c'est la femme qui choisit désormais, tel une cougar, qui elle veut et qui elle ne veut pas, encore faut-il qu'elle le sache...

Cachés sous leurs couettes
Le regard que nous portons sur la nouvelle génération, que nous ne cessons de plaindre par ailleurs malgré le fait qu'elle soit très épanouie et bien dans ses pompes, nos parents l'ont fait avec nous lorsqu'ils nous interdisaient même de regarder un baiser échangé à la télévision. La télévision cherche à nous plaire et à nous séduire, nous accrocher et répondre à nos attentes. La télévision nous ressemble : elle éduque le matin, enfile son costume, remonte le col, ouvre ses volets et, le soir, elle s'habille de son décolleté, enfile ses bas résille, remplit son verre et s'éclate dans la plus grande désinvolture. Le matin, elle nous parle livres, santé, religion, cuisine et théâtre, et le soir elle tamise la lumière de ses projecteurs, pousse les langues à se délier et les figures emblématiques à se lâcher. Les propos deviennent osés, les sourires diaboliques et sensuels, en laissant derrière eux le stress d'une journée par trop routinière. Les regrets et le vocabulaire recherché, la grammaire irréprochable, nous les laissons pour les lendemains en reprenant, malheureux, le chemin du travail.
Mais la nuit, on s'amuse comme on peut et à mesure qu'elle avance, les émissions se (ré)chauffent et flirtent avec cette espèce de débauche ô combien bénie par plusieurs faux-moralisateurs et autres tartuffes cachés sous leur couette, se morfondant dans leur solitude et priant avec ferveur que cet érotisme télévisé et ces promesses d'amour, ou autre, se matérialisent enfin. Nous aimons parler sexe, scandale et frasques matrimoniales. Nous adorons médire et savourons les scènes de ménage, une tasse de café à la main. D'autres prétendront être plus à l'aise en discutant littérature du XVIIIe siècle avec des gens de leur niveau intellectuel loin de ces gens vulgaires sur le petit écran, avec leurs visages défaits ou refaits et leurs lèvres insufflées d'on ne sait quelle matière et à l'identité sexuelle improbable. Ce qu'ils ont probablement oublié, c'est que la littérature n'est autre que le reflet des questionnements de la société de son époque. Elle se doit de braver le politiquement correct afin de choquer et porter à une réflexion profonde de l'être. Or les questionnements de notre époque (identité sexuelle, libertés sexuelles, tolérance...) semblent pourtant bien cadrer avec la déconfiture télévisée. La télévision n'a jamais prétendu être ce qu'elle n'est pas. Elle a toujours tenu sa promesse de divertir, elle continue de le faire, c'est juste que le public a changé et elle le reflète très bien. Chers téléspectateurs, ce que vous voyez ou prétendez ne pas voir n'est probablement pas le fruit d'une imagination appauvrie, car sans culture, c'est le monde dans lequel vous évoluez ou n'évoluez pas... À vous la liberté de choisir...

Ce que nous voyons à la télévision actuellement, ce qui nous choque, n'est rien d'autre que le reflet de la société libanaise, notre reflet... Tous les personnages créés, inventés ou réinventés sont parmi nous. Ils sont dans nos familles, dans nos bureaux, dans nos églises et nos mosquées, partout. Nous nous offusquons, plus ou moins sincèrement, de ce que le miroir télévisé nous...

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