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Moyen Orient et Monde - Réactions

« C’est un coup d’État dont vous avez besoin. Il faut la jouer à l’égyptienne ! »

Les Égyptiens mitigés après l'élection de Trump.

Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a rencontré en marge de l’Assemblée générale de l’Onu, en septembre dernier, le candidat Donald trump, à New York. Carlo Allegri/Reuters

Ce matin du 8 novembre 2016 aux aurores, le président Abdel Fattah al-Sissi a été le premier chef d'État à décrocher son téléphone pour présenter « ses sincères félicitations » au nouveau président américain. « La République arabe d'Égypte se réjouit de voir le mandat présidentiel de Donald Trump ouvrir une nouvelle voie pour les relations égypto-américaines et davantage de coopération entre les deux peuples à la lumière des défis majeurs auxquels la région fait face », s'est félicité la présidence dans un communiqué matinal.

Un enthousiasme de l'ex-maréchal qui ne surprend pas. Lors de sa rencontre en septembre dernier avec celui qui n'était encore que candidat à la 45e présidence des États-Unis, Sissi avait exprimé sa confiance en l'homme d'affaires, assurant : « Je n'ai aucun doute que Trump sera un leader fort. » Ce à quoi le candidat républicain avait répondu : « Sissi est quelqu'un de fantastique. » La bonne entente entre les deux hommes se dessinait déjà en filigrane. Quand Hillary Clinton soulevait l'importance de respecter les droits de l'homme auprès du président égyptien, Donald Trump appelait à torturer les terroristes et à cibler leurs proches, en adéquation avec les pratiques controversées du Caire.

 

(Lire aussi : Pourquoi Donald Trump a gagné la Maison-Blanche)

 

« Triomphe »
Du côté des officiels, la victoire de M. Trump est donc, sans surprise, qualifiée de « triomphe ». « C'est un nouveau départ », s'est félicitée dans les colonnes d'al-Masry al-youm, Margaret Azer, une membre du comité des droits de l'homme au Parlement égyptien. « Trump représente une rupture radicale avec le clan Obama-Clinton qui a soutenu les Frères musulmans et d'autres mouvements politiques islamiques », a-t-elle asséné, emboîtant ainsi le pas au Premier ministre et de nombreux députés.
Coté business, Naguib Sawriris, 3e fortune africaine, a également salué « un entrepreneur plein de succès qui fera du bien à l'Amérique. »

Pour Timothy Kaldas, chercheur associé au Tahrir Institute for Middle East Policy, si les pro-Sissi sont au pas derrière Trump, « c'est de manière très simpliste parce qu'il n'est pas Hillary et parce qu'il n'a jamais critiqué Sissi », note-t-il, « mais dans les faits, ils ne savent rien de Trump. Par exemple, ils doivent comprendre que si Trump est prêt à combattre les Frères musulmans, ce n'est pas par simple solidarité avec les Égyptiens, mais parce qu'il souhaite combattre l'ensemble des musulmans ».

Sur Twitter, the Big Pharaoh, un twittos anonyme connu pour ses commentaires acerbes, note aussi : « Le soutien de l'élite égyptienne à Trump est incroyable. Elle continue de penser qu'Obama et que Hillary ont mis les Frères musulmans au pouvoir en Égypte, à travers les urnes. » « La théorie de la conspiration est très répandue », rappelle Timothy Kaldas, « les Égyptiens ont tendance à surestimer l'intérêt que les Américains portent à la politique intérieure égyptienne, mais dans les faits, Trump ou Clinton, ça ne fait pas une grande différence. »

Dans les rues de Dokki, un quartier animé du Caire, Ahmad s'avoue pourtant peu concerné par la victoire du candidat républicain : « Je ne sais pas quoi en penser, je ne connais pas bien ses idées », reconnaît ce trentenaire.

 

(Lire aussi : Quel Donald Trump gérera le Moyen-Orient ?)

 

« Oh fuck you America ! »
Du côté de la jeunesse libérale et révolutionnaire, la colère gronde pourtant. Là où l'administration Obama procédait à une pression discrète sur le régime Sissi pour le respect des droits de l'homme, l'opposition craint désormais un je-m'en-foutisme assumé de la part de Donald Trump avec un impact direct sur l'impunité dont le président égyptien bénéficie déjà. « Oh fuck you America ! On est dans la merde, ça va nous péter à la gueule », se contente de commenter Mohammad, dépité.
« Je dois dire que je comprends que mes amis américains soient choqués, dans un état total d'incrédulité », explique quant à lui Mohannad. « Nous, Égyptiens, savons trop bien ce que c'est de voir les masses applaudir jusqu'à l'absurde et soutenir la tyrannie de manière déraisonnée. »

Certains, toutefois, gardent leur sarcasme légendaire : « Je suis plus que disposé à aider mes amis américains s'ils ont besoin de se marier avec un étranger dans l'optique de fuir la tyrannie », ricane Anis, tournant en dérision les mariages blancs utilisés par certains Égyptiens pour quitter leur pays. Et Mohammad d'ajouter : « J'ai eu une discussion avec un ami américain, il m'a dit c'est mal d'espérer un coup d'État ? » Je lui ai répondu : « Une révolution se fait par le peuple... et le peuple a voté Trump, alors... oui, c'est un coup d'État dont vous avez besoin. Il faut la jouer à l'égyptienne ! »

 

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Ce matin du 8 novembre 2016 aux aurores, le président Abdel Fattah al-Sissi a été le premier chef d'État à décrocher son téléphone pour présenter « ses sincères félicitations » au nouveau président américain. « La République arabe d'Égypte se réjouit de voir le mandat présidentiel de Donald Trump ouvrir une nouvelle voie pour les relations égypto-américaines et davantage...

commentaires (3)

CAD DU QUITTE OU DOUBLE...

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 31, le 15 novembre 2016

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Commentaires (3)

  • CAD DU QUITTE OU DOUBLE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 31, le 15 novembre 2016

  • Égypte, démographie penalisante, de très gros efforts à faire pour nourrir cette population...qui manifestement, et depuis longtemps, n'arrive pas à joindre leurs deux bouts. ( vie décente versus production insuffisante ) Mais Grand Pays Arabo musulman sur la Méditerranée...susceptible d'équilibrer en quelque sûreté , au moins en islamisme et popularité : la Turquie d'Erdogan... Les Frères Musulmans sont à la manœuvre ( directement ou en sous main ) Leur "idéologie islamo mondialiste" est une donnée politique Anne pas négliger,...cela expliquerait l'erreur d'Obamade les voir , un temps, favorablement

    Chammas frederico

    15 h 17, le 15 novembre 2016

  • C'est bien la preuve que Sissi est "en demande" et il sait sans doute..., qu'il ne peut pas compter sur Normal 1er ...a part pour le convaincre d'acheter à crédit des bateaux et des avions ...! car les caisses de l'Egypte sont vides et l'économie en général à plat....

    M.V.

    08 h 34, le 15 novembre 2016

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