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Culture - Salon du livre - Interview

Tomber croyant comme on tombe amoureux

Nicole Hatem enseigne la philosophie à l'Université Saint-Joseph de Beyrouth. Elle a déjà publié le récit d'une expérience intérieure, Surabondance (Orizons, 2012), et un ouvrage de philosophie, Raïssa Maritain ou le courage philosophique (Orizons, 2015). Par ailleurs, elle signe dans les colonnes de L'Orient-Le Jour une chronique attachante, La vie, mode d'emploi, une philosophie de poche, sur la notion du salut dans le monde contemporain. Son nouvel opus, Éric Rohmer, Graham Greene et le pari de Pascal, invite à une réflexion sur la foi à la croisée du roman, du cinéma et de la philosophie. Petite présentation en deux questions :

Pourquoi l'ouvrage « Éric Rohmer, Graham Greene et le pari de Pascal » ?
Prioritairement, pour dévoiler la richesse de deux œuvres, l'une cinématographique (Conte d'hiver), l'autre romanesque (La Fin d'une liaison) lorsqu'on leur applique la grille interprétative que nous offre la pensée de Pascal. Mais, également, pour montrer à mes étudiants, futurs réalisateurs et auteurs, comment les références culturelles, très présentes dans le film et le roman, loin d'empêcher la création, peuvent la susciter et la nourrir. C'est ainsi que chez Rohmer, la référence à Pascal n'est pas illustration plate de ses thèses, mais discussion de leurs présupposés et surtout variation sur elles et compréhension tout à fait originale de leur enjeu. Par exemple, relativement au fameux pari de Pascal en faveur de l'existence de Dieu compris, ordinairement, comme avantageux à la suite d'un calcul de probabilités et même infiniment avantageux parce que « face à l'infini » du gain, le « fini » de la mise s'anéantit, Rohmer montre que le gain « infini » peut être celui d'un sens donné à sa vie ici-bas et que l'espérance même du gain est déjà en elle-même un gain immense.

Pourquoi « Le grand soleil de Chagall » sur la couverture de l'ouvrage ?
Parce que les héroïnes de Rohmer et de Greene, dont il est question dans mon livre, ont des expériences de révélation aussi éblouissantes que celle que peut donner un grand soleil : la première, dans une cathédrale où, comme elle l'affirmera plus tard, elle « a vu » sa pensée et quel est le choix fondamental qu'elle doit faire dans sa vie ; la seconde, dans les ruines d'une maison bombardée avec, à ses pieds, son amant apparemment mort, et où, priant pour un miracle et étant exaucée, elle est, ainsi que nous l'apprend son Journal, « tombée croyante comme on tombe amoureuse », avec la même « certitude » et « une fois pour toutes ». En outre, comme toute révélation suppose une passivité par rapport à ce qui est révélé, je retrouve celle-ci dans l'attitude d'abandon du personnage féminin de Chagall. Que cette femme soit, de plus, enveloppée, avec beaucoup de tendresse, par les bras d'un homme, est tout à fait dans l'esprit de mon livre où se mêlent amour profane et amour sacré. Mais toutes les raisons que je pourrais encore fournir justifiant le choix de ce tableau restent a posteriori. La vérité est que cette toile s'est imposée à moi par sa beauté. Tout simplement ! C'est-à-dire avec l'insondable mystère du beau et du pouvoir qu'il a sur nous.

*Nicole Hatem présente « Éric Rohmer, Graham Greene et le pari de Pascal » (Paris, Éd. du Cygne, 2016) au Salon du livre francophone de Beyrouth, Biel, demain vendredi 11 novembre, à 19 heures, et le signe à 20 heures sur le stand Le Point.

Nicole Hatem enseigne la philosophie à l'Université Saint-Joseph de Beyrouth. Elle a déjà publié le récit d'une expérience intérieure, Surabondance (Orizons, 2012), et un ouvrage de philosophie, Raïssa Maritain ou le courage philosophique (Orizons, 2015). Par ailleurs, elle signe dans les colonnes de L'Orient-Le Jour une chronique attachante, La vie, mode d'emploi, une philosophie de...

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