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Liban - Tribune

C’est par l’éducation qu’Adyan fait face à l’extrémisme et au confessionnalisme

Dans le contexte d'une réforme des programmes scolaires initiée par le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, Élias Bou Saab, avec la collaboration de la Fondation Adyan dans les matières de la philosophie et de l'éducation civique, une controverse oppose des plumes divergentes à ce sujet. Dans le souci de clarifier les enjeux d'une réforme qui, à ses yeux, doit propulser courageusement les Libanais vers l'avenir et ses défis, et non pas les ramener vers des positions assimilationnistes ou idéologiques ambiguës et dépassées, Adyan a souhaité clarifier sa contribution et sa position dans ce débat. C'est dans ce cadre que « L'Orient-Le Jour » offre aujourd'hui une tribune à son président, Fadi Daou.

La Fondation Adyan a été créée il y a dix ans dans la foulée de la guerre de juillet 2006. Des intellectuels et des activistes libanais l'ont proposée comme une forme de refus du défaitisme et du désespoir, dans une société traumatisée par les ennemis du dehors et les conflits internes. L'initiative prit la forme d'une association civile transcommunautaire visant à valoriser le vivre-ensemble et à faire évoluer la bonne gouvernance de la diversité, aux niveaux social, politique, éducationnel et spirituel.
À travers ses multiples programmes, Adyan a choisi de faire face au confessionnalisme par la culture citoyenne et de résister culturellement à l'extrémisme par la diffusion du principe du respect de la différence et de la mise en valeur de la diversité.
Le concept de « citoyenneté inclusive de la diversité » développé par Adyan au cours de ce processus est devenu matière à débats scientifiques et politiques, au Liban et à l'étranger, dans le contexte des nouveaux défis de la gestion de la diversité et de la redéfinition des principes de la cohésion sociale. L'Alliance des civilisations des Nations unies a rendu hommage à Adyan pour sa contribution dans ce domaine et lui a attribué en 2013 le second Prix mondial pour l'éducation à la paix dans un monde diversifié.

Identité nationale et citoyenneté inclusive de la diversité
L'approche théorique d'Adyan repose sur des bases claires concernant l'identité, la citoyenneté et la diversité. Adyan considère en effet que l'identité personnelle repose sur la découverte par l'individu de la dignité de son humanité propre, et qu'une société de citoyens repose sur un pacte social qui garantit l'intérêt général dans un contexte civil et exprime l'identité nationale commune.
Ce concept se propose comme un dépassement de ce qui est présupposé dans le concept dit d'assimilation ou, littéralement traduit de l'arabe, de la « fusion nationale », une perspective en crise du fait de l'impossibilité de la fusion de tous dans le creuset d'une uniformité de forme et de fond.
De plus, le concept de la citoyenneté inclusive de la diversité aspire à affranchir les personnes d'une mentalité confessionnelle de repli et de clientélisme politique dégradant. C'est la raison pour laquelle « la charte nationale de l'éducation au vivre-ensemble au Liban dans le cadre de la citoyenneté inclusive de la diversité », signée en 2013 par le ministère de l'Éducation et l'Union des établissements d'enseignement privés, en plus de la Fondation Adyan, demande le renforcement de la participation des citoyens à la vie publique en fonction de leur citoyenneté et de la culture nationale commune, embrassant la diversité culturelle et religieuse du pays.


(Pour mémoire : L'acceptation de la diversité culturelle et religieuse au cœur de l'amendement des programmes d'éducation civique)

 

La réforme pédagogique, responsabilité nationale partagée
Partant du principe du partenariat entre le secteur public et la société civile, la Fondation Adyan s'est efforcée de faire accompagner ses recherches théoriques d'engagements pratiques susceptibles de produire le changement souhaité. C'est ce à quoi Adyan travaille depuis 4 ans, en partenariat avec le ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et le Centre de recherche et de développement pédagogique (CRDP) ; il s'agit de faire évoluer l'éducation dans le sens de la citoyenneté et de la diversité culturelle et religieuse au Liban, grâce à l'élaboration d'un nouveau programme d'éducation nationale et de formation civique ; grâce aussi à l'établissement d'un guide du programme de service communautaire et au développement de programmes et de manuels pour la matière d'enseignement philosophie et civilisations. Parallèlement, Adyan s'efforce d'en assurer les fonds, grâce notamment à la coopération de l'ambassade de Grande-Bretagne au Liban.

Face à l'extrémisme, le rempart de la philosophie
La matière philosophie et civilisations revêt incontestablement une importance particulière dans le cadre de cette réforme. Aux yeux d'Adyan, elle est prioritaire. Pour développer cette matière, l'argumentation d'Adyan est triple : d'abord, elle souligne l'importance de cette matière et son rôle dans la formation, chez l'étudiant, d'une méthodologie intellectuelle reposant sur le développement de l'esprit critique, du dialogue rationnel, de la capacité de réagir positivement face à la différence et enfin du respect de la liberté de penser et d'expression. Objectif, permettre aux générations montantes de faire front à l'extrémisme, et aux discours populistes et idéologiques.
En deuxième lieu, Adyan considère la civilisation comme une réalité humaine multidimensionnelle, dont la religion serait l'une des composantes, tout en étant sujette à l'interrogation philosophique, de sorte que les civilisations soient perçues par l'étudiant comme représentant l'effort humain pour donner sens à l'existence et à l'interaction culturelle entre les peuples.
Enfin, l'importance accordée à la double dimension nationale et arabe de la matière philosophique renforce la prise de conscience chez l'étudiant de son appartenance à son milieu et l'encourage à s'impliquer dans ses problématiques actuelles.

La diversité comme vecteur de croissance et de créativité
La bonne gouvernance du pluralisme dans les sociétés n'est pas une alternative à la citoyenneté et à l'édification d'une relation saine entre le citoyen et l'État ; au contraire, elle en est partie intégrante. La citoyenneté, en effet, est indissociable d'un sain vivre-ensemble entre les citoyens. La concrétisation de ce vivre-ensemble inclusif est devenue même l'une des grandes problématiques contemporaines, en raison des phénomènes migratoires et des exodes massifs de populations, et de l'augmentation des conflits à caractère identitaire. C'est la raison pour laquelle, dans l'espoir de voir le Liban redevenir un modèle sur ce plan, aussi bien localement qu'internationalement, Adyan a choisi de poser la diversité comme l'un des facteurs de l'édification de l'unité et une matrice de développement créatif de la société, plutôt que de la considérer comme un obstacle à la réalisation de cette unité.

Fadi DAOU
Président d'Adyan

 

Pour mémoire
La fondation Adyane clôture la neuvième édition de son programme « Alwane »

La Fondation Adyan a été créée il y a dix ans dans la foulée de la guerre de juillet 2006. Des intellectuels et des activistes libanais l'ont proposée comme une forme de refus du défaitisme et du désespoir, dans une société traumatisée par les ennemis du dehors et les conflits internes. L'initiative prit la forme d'une association civile transcommunautaire visant à...

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