Un convoi humanitaire est entré, hier, à Daraya, le premier depuis le début du siège imposé en novembre 2012 par le régime à cette ville rebelle de la province de Damas, mais l'aide n'inclut pas de nourriture au grand désespoir des habitants affamés. « C'est une bonne nouvelle que les habitants de Daraya aient pu aujourd'hui recevoir leur première livraison d'aide depuis 2012, mais il est choquant et complètement inacceptable que les camions ne soient pas autorisés à transporter de la nourriture », a déploré dans un communiqué Sonia Khush, responsable de Save the Children en Syrie. « Les enfants syriens affamés ne peuvent plus avaler des promesses et des mots creux », a-t-elle ajouté. Selon les Comités locaux de coordination (LCC, militants) de cette ville entièrement détruite, qui a perdu 90 % de ses 80 000 habitants, le convoi porte « des aides médicales » mais pas de nourriture, alors que la population souffre de graves pénuries et de malnutrition.
Cette livraison a été rendue possible après l'entrée en vigueur, hier, dans cette ville qui se situe à 10 km au sud-ouest de Damas, d'une trêve de 48 heures décidée à l'initiative de la Russie et coordonnée avec Washington et le régime de Damas. « Afin d'assurer la livraison de l'aide humanitaire à la population en toute sécurité, une trêve de 48 heures a commencé le 1er juin 2016 à partir de 00h01 à Daraya, dans la province de Damas », selon un communiqué du ministère de la Défense de Moscou.
La ville de Moadamiyeh a également reçu une aide humanitaire pour la première fois depuis le mois de mars.
Dans ce contexte, le Conseil de sécurité des Nations unies tiendra une réunion d'urgence demain sur la Syrie pour décider si des largages d'aide humanitaire doivent être effectués après que le régime de Damas a autorisé des convois humanitaires à accéder aux deux villes assiégées.
De son côté, l'opposition syrienne a demandé à l'Onu d'initier, à l'occasion du ramadan qui débute dans les prochains jours, une trêve dans toute la Syrie à l'exception des secteurs sous contrôle du groupe État islamique (EI), a affirmé, hier, à l'AFP Basma Kodmani, du Haut Comité des négociations (HCN). « Nous avons demandé aux Nations unies une trêve dans les secteurs contrôlés par les parties à même de la respecter – le régime et l'opposition », a dit Mme Kodmani. « Nous parlons de toute la Syrie sauf des zones sous contrôle de l'EI », a-t-elle souligné.
« Offensive menée par les Arabes »
Toujours sur le terrain, la coalition internationale a annoncé hier avoir mené 18 frappes aériennes sur des positions du groupe État islamique à Manbij, dans le nord de la Syrie, où un nouveau front contre les jihadistes s'est ouvert. Les frappes ont notamment détruit sur les dernières 24 heures « un poste de commandement », « des tours de communication », « six ponts utilisés par l'EI » et « huit positions de combat », selon le bilan quotidien des bombardements publié par le Centcom, le commandement militaire américain au Moyen-Orient. Selon des responsables américains, les frappes de la coalition menée par les États-Unis sont destinées à appuyer l'offensive que viennent de lancer les Forces démocratiques syriennes (FDS) pour reprendre à l'EI la ville de Manbij, stratégiquement située près de la frontière avec la Turquie.
« L'offensive a démarré », la prise de Manbij « est le prochain objectif de la coalition », a déclaré un responsable américain de la Défense sous le couvert de l'anonymat. « C'est le premier pas » pour expulser les jihadistes de la « poche de Manbij », le dernier corridor d'accès des jihadistes à la frontière turque, a expliqué ce responsable. Face aux inquiétudes de la Turquie, les responsables américains insistent pour indiquer que les combattants arabes, et non les YPG, sont largement majoritaires dans l'offensive contre Manbij. « C'est une offensive menée par des Arabes », a insisté le responsable américain de la Défense, estimant que les Kurdes représentaient « moins de 20 % » des combattants engagés. Les Kurdes impliqués dans l'offensive « reviendront » dans leur zone d'influence traditionnelle après la bataille, a indiqué un autre responsable américain de la Défense.
Au moins 42 civils ont été tués, hier, dans le nord de la Syrie par des raids de l'armée de l'air syrienne, de l'aviation russe et de la coalition internationale conduite par les États-Unis, a par ailleurs rapporté l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Les raids de l'armée de l'air syrienne ont également tué 15 civils dans la province d'Idleb, tandis que les bombardements aériens russes et du régime de Damas ont fait 11 morts dans la province d'Alep, selon l'OSDH.
C'est dans ce contexte que la diplomatie russe a annoncé que le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et le secrétaire d'État américain John Kerry avaient évoqué hier au téléphone la nécessité « d'actions communes décisives » contre le Front al-Nosra (la branche syrienne d'el-Qaëda). La discussion « concernait la situation en Syrie, plus particulièrement le besoin d'actions communes décisives contre le Front al-Nosra, comme la partie russe l'a constamment proposé », a indiqué le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué.
Cette annonce est intervenue alors que la Russie a déjà proposé mi-mai aux États-Unis de mener des frappes communes contre les groupes jihadistes en Syrie, une proposition qui avait été immédiatement rejetée par Washington. Quelques jours plus tard, Moscou avait affirmé être prêt à se coordonner avec la coalition arabo-kurde et les États-Unis pour chasser les jihadistes de l'EI de leur fief de Raqqa, en Syrie.
(Sources : agences)