Le président français François Hollande dans un camp de réfugiés syriens à Dalhamiyé, dans la Békaa. REUTERS/Bilal Hussein/Pool
La visite au Liban du président français François Hollande, marquée par l'absence d'un chef d’État et la visite d'un camp de réfugiés syriens, a inspiré lundi aux éditorialistes des quotidiens libanais des avis contrastés, entre ceux qui déplorent la situation politique du pays et ceux qui observent l'affaiblissement de la France au Moyen-Orient. Voici une revue non exhaustive des éditoriaux publiés lundi dans la presse locale.
"Une visite incolore"
"La visite de François Hollande, unique en son genre en raison de l'absence d'un homologue libanais, constitue un précédent intéressant et laisse des impressions contradictoires sur la scène interne balançant entre impatience et attente", écrit l'éditorialiste du quotidien an-Nahar, Nabil Bou Monsef dans un billet publié lundi et intitulé "Lorsque Hollande nous démasque".
"Ce serait une grave erreur d'observer cette visite comme si elle ne changeait fondamentalement rien aux crises politique et présidentielle du pays, même s'il y a beaucoup de vrai dans cette analyse", poursuit-il, concluant par cette phrase : "Nous ne nous précipiterons pas pour juger cette visite à peine terminée, mais nous n'y décelons rien de positif, ayant dépassé le stade des formalités politiques, comme si les Libanais n'attendaient de la France que plus d'ingérence".
Pour Johnny Mounayar, éditorialiste du quotidien al-Joumhouria, "personne ne conteste que la visite de François Hollande au Liban était incolore, si on la compare aux visites des présidents français dans l'histoire".
"Il est vrai que personne n'avait placé de grands espoirs sur l'émergence de nouvelles idées à l'aune de cette visite, mais elle a semblé moins solennelle que la normale, même dans la forme, au point que les médias n'ont assuré que le minimum syndical", écrit-il dans un article intitulé "Hollande échoue à restaurer le rôle de son pays",
L'éditorialiste tire néanmoins deux conclusions : la prise de contact avec l'aile politique du Hezbollah, "une idée motivée par la volonté d'ouvrir des canaux de négociation en Syrie, en Irak et au Yémen", et l'absence d'appel au départ du président syrien Bachar el-Assad.
(Lire aussi : La tournée de Hollande dans la Békaa, ou « l’action concrète de la France » dans un pays oublié)
Dans son éditorial intitulé "En marge d'une visite d'un jour", Talal Salmane, directeur de la rédaction du quotidien as-Safir, dresse à travers M. Hollande un portrait sombre de la situation au Liban.
Après avoir remercié le président français d'avoir "pris le temps de se rendre au Liban qui flotte dans un état de vide, à son sommet et dans ses institutions", et d'avoir visité un camp de réfugiés syriens "oubliés par les dignitaires arabes", M. Salmane lance sa première pique : "A travers ses rencontres, le président hôte a forcément tiré la conclusion que les caciques du régime libanais sont plus corrompus que leurs homologues français, et du monde !" "Tous ont pris la photo avec le président Hollande qui pourrait leur servir pour leur campagne électorale", écrit-il plus loin. "Vive le Liban qui défie les lois de la nature, en vivant sans tête tout en s'amusant de cette singularité", conclut-il.
Le directeur de la rédaction du quotidien al-Akhbar, proche du Hezbollah, Ibrahim el-Amine, est plus cinglant envers le chef de l’État français.
"La visite de François Hollande à Beyrouth aurait été un événement à résonance locale, régionale et internationale si l'hôte était à la hauteur de l'importance historique de son pays. Mais avec le président de cette France-là, cette visite a été reléguée au troisième ou quatrième plan, derrière les rivalités des familles beyrouthines sur fond d'élections municipales à Mousseitbé", écrit-il dans son article intitulé "L'hôte français qui pèse".
Accusant la France d'être "depuis plusieurs années l'instrument des États-Unis", l'éditorialiste reproche à M. Hollande de "nous conseiller d'adopter un programme d'implantation des réfugiés syriens sans assumer la responsabilité de leur exil".
Pour Hollande, entre le Parlement et le Sérail, l’ombre de la présidence
Voir aussi : La visite de François Hollande au Liban en images
commentaires (4)
Une fois n'est pas coutume, je me trouve assez d'accord avec le Akhbar. Comme lui, je regrette que "l'hôte n'ait pas été à la hauteur de l'importance historique de son pays". Toutefois je conteste l'expression;"le président de cette France-là". Il fallait dire :"ce président-là de la France". La France vaut tout de même mieux que son président.
Yves Prevost
07 h 08, le 19 avril 2016